Japon-Corée : l’interminable après-guerre

Lionel BABICZ

Trimestre 2010

L’année 2010 marque le centenaire de l’annexion de la Corée par le Japon. En effet, le 22 août 1910, était conclu entre les deux pays un traité stipulant que l’empereur de Corée concédait « totalement et définitivement sa souveraineté entière sur l’ensemble de la Corée » à l’empereur du Japon qui, pour sa part, acceptait cette « concession ». Durant trente-cinq ans, jusqu’à la capitulation du Japon, le 15 août 1945, la Corée est soumise au contrôle brutal de l’Empire nippon. Un siècle plus tard, la mémoire de cette époque ombrage toujours les relations nippo-coréennes. D’un côté, il y a les deux Corées, où le souvenir de l’époque coloniale demeure vivace, et de l’autre le Japon, où ces événements semblent bien souvent avoir été oblitérés de la conscience collective.

Certes, les travaux de recherche japonais sur le passé colonial abondent, et les structures officielles et civiles se penchent également sur ce passé douloureux. Ainsi, une commission officielle d’historiens japonais et coréens a publié en 2005 un épais rapport sur l’histoire des relations nippo-coréennes. Une seconde commission est en train de rédiger un nouveau document, qui devrait aussi se pencher sur les manuels scolaires des deux pays[1].

Néanmoins, au niveau des représentations populaires, c’est le plus souvent l’ignorance qui prévaut. Comme l’explique l’historien japonais Mitani Hiroshi, « les Japonais ordinaires possèdent peu de connaissances sur ce que leur pays a fait subir à ses voisins, et sur ce que l’annexion a véritablement signifié pour les Coréens. Moi-même, je n’ai vraiment compris que le jour où un collègue coréen m’a dit : « Une partie de notre histoire est celle d’un autre pays. »[2]

Divergence des mémoires et liens inexorables

Cette divergence des mémoires constitue l’un des éléments fondamentaux pour appréhender les relations nippo-coréennes. Un autre élément essentiel est leur inévitabilité. Depuis la nuit des temps, par leur proximité géographique, la péninsule Coréenne et l’archipel japonais sont inexorablement liés. Sur la carte, on dirait que l’excroissance coréenne tire le croissant japonais vers le continent asiatique, comme pour l’y amarrer. Depuis la préhistoire, d’incessants échanges humains et matériels se sont déroulés entre ces deux morceaux de terre.

Ceci est toujours vrai aujourd’hui. Ainsi, en 2009, plus de deux millions et demi de Japonais visitaient la Corée du Sud[3], et un million trois cent mille Coréens se rendaient au Japon[4]. Sur le plan économique, la Corée du Sud constitue le troisième marché d’exportation du Japon[5], et le Japon le troisième marché d’exportation de la Corée[6]. En outre, le Japon est la deuxième source des importations coréennes, juste derrière la Chine, et bien avant les États-Unis[7].

Les échanges culturels nippo-coréens sont également en pleine expansion, surtout depuis l’organisation conjointe du Mondial de football en 2002. La culture populaire sud-coréenne est très présente au Japon, notamment par le biais de séries télévisées qui jouissent d’une grande popularité auprès du public féminin. Dans le sens inverse, la levée progressive, depuis 1998, de l’interdiction d’importer des produits culturels japonais, a permis au public sud-coréen d’accéder plus facilement à la culture de l’ancien colonisateur.

Il n’existe pas de statistiques globales concernant ces échanges culturels, mais il est clair que, depuis 2002, ceux-ci se sont intensifiés dans tous les domaines – du cinéma à la littérature, des mangas aux séries télévisées, et jusqu’à l’apprentissage des langues. Au plan politique, le Japon et la Corée du Sud sont tous deux alliés des États-Unis, et abritent d’importantes bases militaires américaines. Depuis 1954, Les États-Unis et la Corée du Sud sont liés par un traité de sécurité. En 1978, a été établi un commandement militaire unifié (CombinedForces Command, CFC) américano-coréen, chargé de défendre le Sud contre une éventuelle attaque du Nord[8]. De leur côté, le Japon et les États-Unis ont conclu un traité de sécurité en 1960, et cet accord constitue, depuis, la pierre angulaire des relations nippo-américaines et de la politique de défense japonaise[9]. Ces deux alliances sont d’ailleurs bien plus que deux pactes bilatéraux séparés. Ils présentent souvent l’allure d’un véritable « partenariat trilatéral » États-Unis-Japon-Corée, formant le « triangle de sécurité » qui est à la base de la paix et de la sécurité dont jouit l’Asie orientale depuis un demi-siècle[10]. Pour toutes ces raisons, les relations avec la Corée du Sud sont d’une extrême importance pour le Japon. D’ailleurs, depuis 1981, les Premiers ministres japonais successifs ont presque tous effectué leur premier déplacement à l’étranger à Séoul[11]. L’actuel Premier ministre, Hatoyama Yukio, a respecté la tradition en effectuant sa première visite officielle à l’étranger en Corée du Sud, quelques semaines après son entrée en fonctions. Le 9 octobre 2009, Hatoyama tenait à Séoul une conférence de presse conjointe avec le président coréen Lee Myung-bak, où il déclarait que les relations avec la Corée du Sud constituaient « le cœur de la politique du Japon en Asie »[12].

La question des rochers du Liancourt

Cependant, malgré cette réelle proximité, les relations nippo-coréennes ne sont pas exemptes de tensions. Celles-ci sont essentiellement de deux ordres: la divergence des mémoires historiques évoquée plus haut, et le différend territorial des rochers du Liancourt, lui aussi fruit de l’histoire.

Les rochers du Liancourt – nommés par référence au baleinier français Le Liancourt, qui les découvrit en 1849 – sont un minuscule archipel constitué de deux îlots rocheux et d’une centaine de récifs, situé au large de la Mer du Japon (ou Mer Orientale pour les Coréens), à mi-chemin entre le Japon et la Corée. Les Japonais appellent ces îles Takeshima, et les Coréens les nomment Dokdo.

Les rochers sont actuellement sous souveraineté coréenne, mais font l’objet d’une revendication japonaise s’appuyant sur le fait qu’ils ne sont pas mentionnés dans le traité de paix de San Francisco (1951). Le Japon affirme avoir contrôlé l’archipel durant des siècles, avant de l’incorporer au département de Shimane en 1905. Les Coréens rejettent cette argumentation, soutenant que leur pays a de tout temps gouverné ces îlots, et que l’incorporation au département de Shimane fut un acte illégitime accompli dans le contexte de l’impérialisme japonais de l’époque.

Cette question est ainsi intimement liée à la vision et à l’interprétation de l’histoire moderne des relations nippo-coréennes. En 1965, lorsque le Japon et la Corée du Sud normalisèrent leurs relations, la question fut éludée au moyen d’un échange de notes affirmant que tout conflit entre les deux pays serait résolu par des moyens diplomatiques. À ce jour, le différend territorial des rochers du Liancourt est toujours pendant, et la question ne cesse de hanter les relations bilatérales.

Des deux premiers temps des relations nippo-coréennes…

Les tensions liées à l’histoire maintiennent donc les relations nippo-coréennes dans une interminable après-guerre[13]. On ne peut donc saisir leur complexité sans avoir à l’esprit les principaux développements de l’époque moderne. Ceux-ci peuvent se diviser en trois temps :

1876-1910 : la période précoloniale voit le Japon accroître son influence dans la péninsule coréenne, et finalement annexer le pays voisin. En 1876, le Japon impose à la Corée un « traité inégal », le traité de Kanghwa. Deux conflits majeurs, dont l’enjeu principal est le contrôle de la Corée, se déroulent alors : la guerre sino-japonaise de 1894-1895 et la guerre russo-japonaise de 1904-1905. En 1905, la Corée devient un protectorat japonais, avant d’être annexée en 1910.

1910-1945 : la période coloniale, durant laquelle la Corée est annexée au Japon. Les années les plus rudes sont celle de la guerre (1937-1945). Les besoins militaires croissants du Japon le conduisent alors à imposer progressivement un contrôle de plus en plus serré sur la péninsule. La population coréenne se voit mobilisée pour l’effort de guerre. C’est le temps du recrutement forcé de main-d’œuvre, une main-d’œuvre utilisée en Corée même, sur le territoire japonais et dans tout l’Empire.

Parallèlement, une campagne de japonisation forcée est mise en œuvre : interdiction de l’usage de la langue coréenne, obligation d’adopter des noms japonais, pèlerinages obligatoires dans les sanctuaires shintoïstes. Cette politique d’assimilation ne surgit pas spontanément. Ces mesures sont latentes, dès 1910, dans l’idéologie qui sous-tend l’annexion. La Corée et les Coréens sont perçus comme une partie inaliénable du territoire et de la nation japonaise. La Corée n’est pas une « colonie », mais une « province extérieure », ou tout simplement « la péninsule ». Même si ses habitants ne se voient jamais attribuer un véritable statut de citoyen japonais.

C’est également l’époque où des dizaines de milliers (au moins) de femmes coréennes sont mobilisées comme prostituées forcées au service de l’armée impériale. L’existence de ces « femmes de réconfort » ne sera révélée qu’au début des années 1990[14]. Depuis, Le Japon a présenté excuses et indemnités aux victimes. Cependant, en raison d’une série d’ambiguïtés qui accompagna ces gestes[15], et également de la réticence d’une partie de la classe politique à reconnaître le caractère coercitif du recrutement des « femmes de réconfort », la question est toujours à l’ordre du jour. Ainsi à Séoul, d’anciennes femmes de réconfort manifestent tous les mercredis après-midi face à l’ambassade du Japon[16].

..à l’après-guerre, ou la période postcoloniale

L’après-guerre des relations nippo-coréennes débute le 15 août 1945, avec la capitulation du Japon et la libération de la Corée, et, sur un plan formel, s’acheva avec la Corée du Sud en 1965, par la conclusion d’un traité de normalisation. Avec la Corée du Nord, par contre, l’après-guerre se poursuit encore officiellement, les conversations de normalisation entamées en 1991 n’ayant toujours pas abouti. En réalité, la période de l’après-guerre n’est close avec aucune des deux Corées.

Trois périodes sont discernables depuis 1945, dont voici une brève chronologie.

1945-1965 : de la capitulation du Japon au traité de normalisation Japon-Corée du Sud ;

1948 : partition de la Corée ;

1950-1953 : guerre de Corée ;

1951 : ouverture des conversations de normalisation avec la Corée du Sud ;

1965 : traité de normalisation Japon-Corée du Sud.

1965-1983 : du traité de normalisation aux premières visites officielles réciproques des dirigeants des deux pays ;

1973 : enlèvement à Tokyo de l’opposant Kim Dae Jung par les services de sécurité sud-coréens ;

  • : assassinat du président Park Chung Hee ;
  • : massacre de Kwangju.

Depuis 1983~ : rapprochement et tensions;

1991 : ouverture des conversations de normalisation avec la Corée du Nord (n’ont pas abouti à ce jour) ;

1998 : Déclaration commune nippo-coréenne (accord Obuchi-Kim) ;

  • : seconde crise des manuels scolaires (la première crise avait eu lieu en

1982) ;

  • : organisation commune du Mondial de football par la Corée du Sud et le Japon ;

2002 : première visite officielle d’un chef de gouvernement japonais, Koizumi Junichirô, en Corée du Nord ; début de la crise autour des enlèvements de ressortissants japonais.

Du fait de la partition de la Corée en deux États, les relations nippo-coréennes sont des relations triangulaires, auxquelles il convient également d’ajouter les sept cent mille Coréens résidant au Japon, divisés entre originaires du Nord et du Sud. Tout cela amplifie encore plus la complexité et la sensibilité des liens.

1945-1965 : indifférence et oubli

Au lendemain de la guerre, mis à part de faibles échanges commerciaux, les relations nippo-coréennes étaient pratiquement inexistantes. En 1951, des conversations préliminaires s’ouvrent entre le Japon et la Corée du Sud, à la demande des Etats-Unis avec, à l’ordre du jour, le statut légal des Coréens du Japon, la normalisation des relations diplomatiques et les demandes de réparations. Ces premières rencontres ne donnent aucun résultat, et les conversations sont suspendues en 1953, après qu’un délégué japonais a tenté d’expliquer à ses interlocuteurs coréens les « bienfaits » que la colonisation japonaise avait apportés à leur pays. En 1958, les conversations reprennent ; elles aboutissent, en 1965, à la conclusion du Traité fondamental nippo-coréen, qui rétablit les relations entre les deux pays.

Les vingt années 1945-1965 sont, au Japon, une période de désintérêt total pour la Corée. Ce phénomène extraordinaire constitue une réaction à l’étreinte mutuelle de la période coloniale. À la fin de la guerre, quelque sept cent mille Japonais résidaient en Corée, et plus de deux millions de Coréens se trouvaient au Japon. Les trente-cinq année de la période coloniale avaient été une époque certes douloureuse, un temps d’oppression et d’exploitation, mais aussi une époque où Coréens et Japonais avaient été en contact rapproché, et avaient parfois partagé joies et douleurs, amours et amitiés.

Le brusque et total désintérêt qui suit cet embrassement exprime un désir d’oubli. En conséquence, entre 1945 et 1965, la Corée s’évapore de la conscience japonaise. Ceux qui y avaient vécu n’en parlent plus, et les enseignants évitent soigneusement d’y faire la moindre allusion. La péninsule voisine, qui a constitué un des sujets d’intérêt principaux depuis les années 1880, a comme brusquement cessé d’exister. Dans le domaine universitaire, les résultats de décennies de recherche sur la Corée sont soudain rejetés et ignorés. Et, en l’absence de relations diplomatiques, les échanges humains et culturels sont également réduits au minimum. Les événements dramatiques qui se déroulent dans la péninsule n’éveillent qu’un intérêt limité. Même des incidents impliquant directement le Japon, comme la capture et l’éloignement de bateaux de pêche ayant pénétré dans les eaux territoriales coréennes, ne suscitent qu’indifférence parmi le grand public. Quant aux Coréens du Japon, ils se retrouvent enfermés dans une bulle d’ignorance et de mépris. Le Japon avait éliminé la Corée de sa conscience, et s’était replié sur lui-même pour soigner ses blessures et se régénérer. Cette indifférence est également réciproque. La Corée du Sud, dévastée par la guerre contre le Nord, choisit de se consacrer à la défense de son territoire et à la restauration de son économie, avec le soutien des Etats-Unis. Et dans un tel contexte, un Japon dévasté n’a rien à lui offrir.

Cette indifférence réciproque explique pourquoi les conversations en vue d’une normalisation des relations, ouvertes en 1951 sous la pression américaine, n’aboutissent qu’en 1965 avec le traité de normalisation.

 

1965-1983: normalisation

Ce traité est à la fois le résultat de pressions des Etats-Unis, intéressés à renforcer la stabilité régionale, et d’une convergence d’intérêts, essentiellement économiques, entre la Corée et le Japon. Les investisseurs japonais sont attirés par le marché coréen, et la Corée avide de capitaux japonais. Pour le régime militaire coréen de Park Chung Hee, l’accord avec le Japon s’inscrit aussi dans le contexte d’un resserrement des liens avec les Etats-Unis – en 1965. la Corée envoie des troupes au Vietnam – et d’une méfiance accrue à l’égard de la Chine, qui a atteint l’année précédente le rang de puissance nucléaire. C’est pourquoi la Corée a renoncé à obtenir des conditions plus honorables.

L’essentiel du traité consiste en l’établissement de relations diplomatiques, et en l’octroi, par le Japon, d’une importante aide économique à la Corée du Sud. Le reste n’est que désaccords et ambivalences. Une première ambivalence a trait au statut du gouvernement sud-coréen. Celui-ci est-il le gouvernement légal de l’ensemble de la Corée (selon l’interprétation de Séoul), ou bien seulement du sud de la péninsule (selon l’interprétation de Tokyo, qui désire laisser une porte entrouverte en direction de la Corée du Nord)?

Néanmoins, l’ambivalence la plus importante du traité de 1965 a trait à l’histoire. L’ensemble des accords et traités conclus avant le 22 août 1910 entre le Japon et la Corée y sont « reconnus comme déjà nuls et non avenus ». La formulation évite de fixer clairement le statut du traité de protectorat de 1905 et du traité d’annexion de 1910. Selon les thèses officielles japonaises, ces accords ont été conclus légalement, et la validité du traité d’annexion a pris fin le 15 août 1948, avec la création de la Corée du Sud. Pour Séoul, il s’agit de documents signés sous la contrainte et dépourvus de toute légitimité ou validité. La formule est à l’avantage du Japon, qui juge qu’elle le dispense de formuler des excuses ou de verser des indemnités pour la période coloniale. Les dons et prêts massifs que Tokyo octroie à Séoul le sont uniquement au titre d’aide économique, sans lien aucun avec le passé.

Malgré ses imperfections, le traité de 1965 marque une étape importante. Il permet d’ouvrir un nouveau chapitre, et contribue grandement au démarrage économique sud-coréen. S’ouvre une période d’introduction massive de capitaux, technologie et information en provenance du Japon, et un nouvel intérêt pour le Japon voit le jour en Corée. Mais ce regain d’intérêt n’était pas réciproque. En réalité, bien que le traité entraîne une reprise des relations entre les deux pays, jusqu’en 1983, il s’agit de liens essentiellement à sens unique, du Japon vers la Corée. Certes, un nombre croissant de Japonais se rendent, essentiellement pour raisons de travail, dans le pays voisin, mais au niveau du grand public, la Corée ne continue qu’à susciter rejet et indifférence. Et les protestations des organisations de gauche, qui voient dans l’aide massive japonaise à la Corée du Sud une manœuvre destinée à faire obstacle à la réunification, ne rencontrent qu’un faible écho auprès de l’opinion.

En 1973, les choses se modifient brusquement. L’enlèvement à Tokyo de l’opposant coréen Kim Dae Jung[17] par les services de sécurité sud-coréens propulse la Corée à la une des media japonais. Des protestations s’élèvent contre la violation de la souveraineté nationale et le caractère dictatorial du régime sud-coréen. Après une éclipse d’une trentaine d’années, la Corée regagne l’ordre du jour public japonais.

Comme un siècle auparavant, le « problème coréen » est également perçu comme une question touchant directement le Japon, qui ne peut se permettre de rester indifférent à la situation dans la péninsule. Les dramatiques événements des années suivantes – en 1979, l’assassinat du président coréen Park Chung Hee et le coup d’Etat qui porte au pouvoir Chun Doo Hwang, en 1980 le massacre de Kwangju, et la condamnation à mort de Kim Dae Jung[18] – contribuent au maintien de cet intérêt, mais également renforcent l’image négative du pays voisin, ressenti comme brutal et dictatorial.

Dans les années 1970, la situation des quelque sept cent mille Coréens présents dans l’archipel commence à éveiller, lentement, les consciences japonaises, avec de premières avancées dans leur statut. En 1974, l’entreprise Hitachi se voit contrainte par la justice à réengager un Coréen qu’elle a licencié après avoir appris son origine nationale. Pour la première fois, un tribunal mentionne explicitement la discrimination en vigueur dans la société japonaise, qui avait forcé l’employé à dissimuler son véritable nom à son employeur. La fin des années 1970 voit également un renouveau relatif d’intérêt pour certains aspects de la culture coréenne. Des chansons coréennes sont traduites en japonais, voir même chantées directement en coréen par des chanteurs d’origine coréenne. Dans les centres culturels s’ouvrent timidement, pour un public limité, des cours de langue coréenne.

 

Le tournant de 1983

Le véritable tournant a lieu en 1982 avec l’accession au poste de Premier ministre de Nakasone Yasuhiro. Ce « nouveau conservateur » est persuadé de la nécessité stratégique, économique et politique, d’un rapprochement avec la Corée. Nakasone effectue son premier déplacement à l’étranger, en 1983, en Corée du Sud, première visite officielle d’un chef de gouvernement japonais en Corée. Nakasone promet à Séoul une assistance de quatre milliards de dollars, et les dirigeants des deux États proclament l’ouverture d’une « nouvelle ère pour les relations nippo-coréennes ». Quelques mois plus tard, le président coréen Chun Doo Hwan se rend au Japon, pour y sceller une alliance conservatrice américano-nippo-coréenne.

Ce rapprochement est d’autant plus remarquable qu’il intervenait au lendemain d’une première crise autour des manuels scolaires. En effet, en 1982, la demande du ministère japonais de l’Éducation de remplacer, dans les manuels d’histoire, certains termes — par exemple « invasion » par « avance » pour décrire le déclenchement de la guerre sino-japonaise — a suscité les protestations de nombreux pays asiatiques, et particulièrement des gouvernements chinois et sud-coréen. Finalement, la crise fut résolue au moyen d’une directive gouvernementale demandant aux enseignants de tenir compte des critiques émises par les États de la région, et d’une promesse de futures révisions. Effectivement, dans les années suivantes, un certain nombre de changements sémantiques sont introduits dans les ouvrages incriminés, et le différend s’apaise, du moins au niveau officiel.

 

Un Mondial à l’ombre du passé

Mais ce n’est pas la fin des différends historiques, loin de là. En fait, les deux Corées attendent avant tout du Japon des excuses pour les souffrances et les humiliations de la période coloniale : la politique d’assimilation forcée, les déportations de Coréens dans l’archipel, les « femmes de réconfort ». Certes, les expressions de remords se suivent et se font de plus en plus explicites. Cependant, deux éléments essentiels manquent encore : l’adoption d’une résolution parlementaire japonaise claire et sans équivoque sur l’annexion et la période coloniale[19], et une visite impériale en Corée, qui serait accompagnée de gestes forts et d’excuses inédites[20]. Les Coréens réitèrent régulièrement leur invitation à l’empereur, mais le Japon refuse tout aussi régulièrement, invoquant des raisons de sécurité[21].

Toutefois, en 1998, une étape importante du processus de réconciliation est franchie lors d’une rencontre au sommet entre le président coréen Kim Dae Jung et le Premier ministre japonais Obuchi Keizo. Ce dernier publie une déclaration écrite où il « reconnaît humblement le fait historique selon lequel le Japon a, durant une certaine période du passé, infligé au peuple coréen, par son pouvoir colonial, d’énormes dommages et souffrances, et exprime de profonds remords et des excuses sincères ». Le président Kim Dae Jung répond par un vibrant appel à tourner la page : « Le présent appelle nos deux pays à s’efforcer de surmonter leur histoire malheureuse et à développer des relations tournées vers l’avenir, fondées sur la réconciliation et une coopération amicale et de bon voisinage ».[22]

Cette rencontre constitue la tentative la plus spectaculaire pour clore le chapitre de l’après-guerre. C’est la première fois que les dirigeants des deux pays font, dans un document écrit officiel, référence au passé. À la veille du XXIe siècle, le Japon et la Corée du Sud décident de tourner leurs regards vers l’avenir, et accompagnent cette résolution d’une série d’accords sans précédent. Ce « Nouveau partenariat nippo-coréen pour le XXIe siècle » comprend un catalogue détaillé de mesures, depuis l’établissement de rencontres au sommet annuelles jusqu’à l’ouverture partielle de la Corée aux produits culturels japonais, dont la diffusion était jusqu’à présent officiellement interdite.[23]

L’une des causes de ce rapprochement spectaculaire est la proximité du Mondial de 2002. La Fédération Internationale de Football, ne pouvant départager le Japon et la Corée, a invité les deux Etats, en 1996, à organiser conjointement la compétition. Cette décision sans précédent a été imposée par l’histoire douloureuse des relations nippo-coréennes. Le choix de l’un aurait atteint l’autre au plus profond de sa dignité nationale. Cette collaboration forcée est d’abord acceptée avec réluctance par les deux parties. Mais le choc initial passé, on est bien obligé de faire contre mauvaise fortune bon cœur. L’arrivée au pouvoir en Corée du Sud de Kim Dae Jung, en 1997, facilite également les choses. L’ancien opposant est mieux disposé à l’égard du Japon que ses prédécesseurs, et est persuadé de la nécessité de tourner la page sur le passé et de regarder vers l’avenir.

Les années 1998-2002 pouvaient ainsi marquer la fin de l’après-guerre des relations nippo-coréennes. Il n’en fut rien.

D’abord, l’organisation même du Mondial donne lieu à d’interminables désaccords. Depuis l’appellation officielle de la compétition (Japon-Corée ou Corée-Japon – finalement, les deux appellations sont adoptées, la première au Japon et la seconde en Corée) jusqu’à la question du lieu de la cérémonie d’ouverture (la Corée) et de clôture (le Japon). Ensuite, un événement, la seconde crise des manuels d’histoire, qui éclate en 2001, met en péril la tenue même du Mondial. À l’origine de l’affaire ne se trouvent pas les manuels déjà en usage, mais l’autorisation accordée par le ministère japonais de l’Éducation à un nouveau manuel rédigé par un groupe d’historiens révisionnistes. Cet ouvrage, intitulé simplement Nouveau manuel d’histoire, s’insurge contre ce qu’il considère une approche dominante « masochiste » de l’histoire, et aspire à inculquer aux jeunes Japonais un sentiment de fierté à l’égard du passé, et plus particulièrement de l’histoire moderne, de leur pays. Le Nouveau manuel provoque un tollé en Corée, et dans d’autres pays d’Asie. La tenue du Mondial semble même un instant menacée. Mais finalement, le faible taux d’adoption de l’ouvrage par les établissements scolaires japonais permet de calmer les esprits, et de résoudre partiellement la dispute. D’autant plus que le Mondial approche, et que personne ne souhaite vraiment son annulation.

À la veille de l’ouverture des compétitions, les gestes de bonne volonté se succèdent. L’empereur va ainsi jusqu’à rappeler l’ascendance coréenne de la mère d’un de ses lointains prédécesseurs, Kammu (780-806). Le monarque japonais renonce, cependant, à se rendre en Corée pour les cérémonies d’ouverture, comme il a été un temps envisagé. Ainsi est manquée l’occasion d’une visite historique, qui aurait contribué, accompagnée des gestes et déclaration appropriés, à clore le chapitre de l’après-guerre.

Malgré ce ratage, le Mondial nippo-coréen de 2002 est une incontestable réussite. C’est la première fois que les deux pays organisent conjointement un événement d’une telle ampleur. Mieux encore : l’année 2002 voit le début, au Japon, d’un boom culturel coréen d’une ampleur sans précédent. La Corée (du Sud) devient subitement un pays qui attise la curiosité d’un large public. Le phénomène s’est amplifié depuis, et est tangible dans les domaines les plus divers.

 

Le Japon et la Corée du Nord: enlèvements et menace nucléaire

À l’automne 2002, Cette nouvelle appréhension positive de la Corée est ternie lorsque la Corée du Nord reconnaît avoir enlevé par le passé onze citoyens japonais. Certes, Séoul n’est pour rien dans cette affaire, mais elle est l’occasion d’une résurgence des stéréotypes négatifs liés aux Coréens. Cette révélation nord-coréenne part pourtant de bonnes intentions. Il s’agit pour Pyongyang de faire un geste à l’égard du Japon à l’occasion de la première visite officielle en Corée du Nord d’un chef de gouvernement japonais, en l’occurrence Koizumi Junichiro. Comment en est-on arrivé là?

Depuis les années 1950, des contacts entre le Japon et la Corée du Nord existent. Contacts humains : à la fin des années 1950 et au début des années 1960, plusieurs dizaines de milliers de Coréens du Japon choisissent de rentrer en Corée du Nord, parfois accompagnés de leur conjoint japonais[24]. Contacts économiques et culturels, à partir des années 1970 : accord sur le commerce en 1972, sur la pêche en 1977, participation nord-coréenne à un festival de la jeunesse en 1985…

Cependant, il y a également des incidents assez graves. En 1983, en représailles à la défection d’un soldat nord-coréen au Japon, l’équipage d’un navire de transport japonais, le Fujisan Maru 18, est arrêté dans le port nord-coréen de Nampo. Deux de ces marins sont retenus en Corée du Nord durant sept années.

À la fin de la guerre froide, les Japonais accomplissent un certain nombre de gestes à l’égard de Pyongyang. En 1989, le Premier ministre Takeshita Noboru présente des excuses pour le passé et exprime son désir d’améliorer les relations. En 1990, une délégation conjointe du Parti Libéral Démocrate au pouvoir et du Parti Socialiste d’opposition se rend en Corée du Nord y négocier les conditions d’ouverture de conversations en vue d’une normalisation des relations. Ces négociations, débutées en 1991, n’ont à ce jour pas encore abouti. Car, dès le départ, le Japon doit faire face à une massive demande d’indemnités pour la période coloniale. Pour sa part, Tokyo soulève la question des enlèvements présumés de citoyens japonais par la Corée du Nord, et exprime ses craintes face au programme nucléaire nord-coréen. En 1992, les conversations sont interrompues pour reprendre seulement en 1997.

Puis, en 1998, après le tir d’un missile nord-coréen au-dessus du territoire japonais, Tokyo adopte une série de sanctions, levées l’année suivante. En 2002, désireux d’effectuer une percée dans les relations avec la Corée du Nord, le Premier ministre Koizumi Junichiro accomplit une spectaculaire visite d’une journée à Pyongyang. Mais ce qui aurait dû marquer un nouveau départ dégénère en un immense scandale, qui n’est pas encore refermé. À l’origine, en guise de geste de bonne volonté, Pyongyang reconnaît avoir enlevé treize citoyens japonais dans les années 1970. Huit seraient morts, et cinq seraient encore vivants. Les cinq survivants sont autorisés à effectuer une visite au Japon, au cours de laquelle, sous la pression de l’opinion publique, le gouvernement décide ne pas les renvoyer en Corée du Nord comme il a été convenu. Pyongyang proteste contre la décision japonaise, et décide de suspendre à nouveau les conversations de normalisation.

Cependant, en 2004, Koizumi effectue une seconde visite à Pyongyang, où il annonce que la Corée du Nord autorise le départ pour le Japon des membres des familles des cinq Japonais enlevés. Au terme de son voyage, le Premier ministre regagne triomphalement Tokyo, accompagné de cinq proches des Japonais enlevés.

Quelque temps plus tard, un déserteur américain qui a épousé un des Japonaises enlevées est, à son tour, autorisé à quitter la Corée du Nord.

Néanmoins, la question des enlèvements est toujours à l’ordre du jour. Le Japon refuse notamment d’accepter les explications nord-coréennes concernant le sort de certains des disparus. La figure de la japonaise Megumi Yokota, enlevée en 1977 à l’âge de treize ans, et dont les Nord-Coréens affirment qu’elle est décédé en 1994, est ainsi devenu emblématique. La famille de Megumi et la grande majorité du public japonais continuent à croire en la survie de cette dernière et réclament son retour au Japon[25]. Les relations avec la Corée du Nord sont donc aujourd’hui encore très tendues, même si le Japon participe aux conversations à six qui ont débuté en 2003, et des rencontres bilatérales se tiennent épisodiquement. Mais la Corée du Nord est le seul État que le Japon considère comme menaçant directement et immédiatement sa sécurité, et de la part duquel il redoute une attaque directe sur son territoire. Ce sentiment de danger a contribué récemment à un resserrement des liens avec la Corée du Sud du président Lee Myung-bak, qui a adopté une ligne plus dure à l’égard de Pyongyang.

 

Vers la fin de l’après-guerre?

Un siècle après l’annexion de la Corée par le japon, soixante-cinq ans après la libération de la Corée, les signes annonciateurs se multipliant en faveur de la fin de l’après-guerre nippo-coréenne. Néanmoins, celle-ci refuse aussi obstinément de s’achever. La cause principale de cette persistance est le poids de l’histoire. L’incapacité de l’accord de normalisation de 1965 à affronter les questions historiques se fait ainsi sentir jusqu’à aujourd’hui. En 2010, la légitimité et la validité du traité d’annexion font toujours l’objet d’un vif débat.

Les ambiguïtés du traité des 1965 pèsent également sur les négociations en vue d’une normalisation avec la Corée du Nord. Pyongyang a repris à son compte l’argumentation sud-coréenne sur l’absence de légitimité du traité d’annexion, et exige, en conséquences, excuses et indemnités de la part du Japon. Au-delà des questions politiques, économiques ou stratégiques, l’évolution de l’attitude japonaise à l’égard de la Corée est également, en grande partie, le reflet du regard que le Japon porte sur lui-même. Le rejet et l’indifférence des deux premières décennies de l’après-guerre (1945-1965) exprimait le désir de faire du passé table rase, d’oublier le militarisme et la guerre, de faire comme si ceux-ci n’avaient jamais existé. La Corée représentait alors la mauvaise conscience d’un Japon défait, humilié et dévasté.

L’intérêt essentiellement politique des deux décennies suivantes (1965-1983) reflétait l’accès du Japon au rang de puissance économique et d’État démocratique. Tokyo était en mesure d’octroyer une généreuse aide économique à la Corée du Sud, non seulement dans son propre intérêt, non seulement pour répondre aux attentes américaines, mais également dans une perspective idéaliste. Le Japon se considérait comme chargé d’une mission de démocratisation et de développement de l’État voisin.

Enfin, l’intérêt culturel des dernières décennies (depuis 1983 et, avec une vigueur accrue, depuis 2002) est l’expression d’une vision internationale et multiculturelle que le Japon contemporain désire avoir de lui-même. La Corée, par sa proximité et son étrangeté simultanées, permet au Japon de définir son identité et sa spécificité dans un monde ouvert à tous vents.

Le centenaire de l’annexion va-t-il fournir au Japon et à la Corée du Sud l’occasion de refermer l’interminable chapitre de l’après-guerre ? Les gestes japonais nécessaires – une visite impériale et une résolution parlementaire d’excuses – ont l’air peu probables. En revanche, il semblerait que la Corée du Sud ait choisi, plutôt que de ressasser le passé colonial, de mesurer le chemin parcouru en un siècle – d’un pays dont l’existence nationale avait été annihilé jusqu’à un État situé au treizième rang des puissances économiques mondiales. En 1910, la Corée était effacée de la carte politique du monde. En 2010, la Corée, démocratique et prospère, accueille le sommet du G20. « Cent ans après la honte historique de l’annexion forcée, la nation (coréenne) joue un rôle dirigeant dans la formation d’un nouvel ordre mondial », a déclaré le président Lee Myung-bak. « La Corée s’est frayée un chemin de la périphérie asiatique au centre du monde »[26]. Ces paroles expriment une confiance inédite en l’avenir de la Corée, renforcée par la bonne performance de l’économie coréenne[27]. Un siècle après l’annexion, la Corée a ainsi le sentiment d’avoir rattrapé le Japon, voire d’être en mesure de bientôt dépasser l’ancien colonisateur[28]. Cet optimisme incitera-t-il la Corée du Sud à refermer, face au Japon, l’interminable chapitre de l’après-guerre, ou bien les anciennes querelles vont-elles continuer à ombrager les relations entre ces deux pays souvent décrits comme étant si proches, et pourtant si éloignés?

 

Éléments bibliographiques

Une bibliographie en anglais sur les relations nippo-coréennes se trouve sur le site Korean History: A Bibliography de l’université de Hawaii (édité par Kenneth R. Robinson) : http://www.hawaii.edu/korea/biblio/index.html

Les récents développements relatifs aux relations nippo-coréennes sont présentés et analysés dans la revue en ligne Comparative Connections, publiée trimestriellement par le CSIS (Center for Strategic and InternationalStudies) : http://csis.org/program/comparative-connections

On consultera également le site de NAPSNet (Northeast Asia Peace and Security Network) qui contient un abondant matériel sur le sujet, y compris des revues de presse quotidiennes : http://www.nautilus.org/napsnet/dr/index.html

BABICZ, Lionel. Le Japon face à la Corée à l’époque Meiji. Paris, Maisonneuve et Larose, 2002.

BABICZ, Lionel. « Japon, Chine, Corée: vers une conscience historique commune? », Ebisu, n° 37, printemps-été 2007, pp. 19-46. http://www.mfj.gr.jp/publications/ebisu/no_37/index.php

BABICZ, Lionel. « Japon-Corée: de vaines excuses? » Raison Publique, n° 10, mai 2009, pp. 17-28.

BUZO, Adrian. The Making of Modern Korea. London; New York, Routledge, 2002.

CHA, Victor. Alignment Despite Antagonism: The United States-Korea-Japan Security Triangle. Stanford University Press, 2000.

CUMINGS, Bruce. Korea’s Place in the Sun: A Modern History. New York: W.W. Norton, 1997.

DUDDEN, Alexis. Troubled Apologies Among Japan, Korea, and the United States. New York: Columbia University Press, 2008.

DUUS, Peter. The Abacus and the Sword: The Japanese Penetration of Korea, 1895-1910. Berkeley: University of California Press, 1995.

 

FUKUOKA, Yasunori. « Koreans in Japan: Past and Present. » Saitama University Review, 31(1):1-15. 1996. http://www.han.org/a/fukuoka96a.html

HOARE, J.E., and Susan PARES. North Korea in the 21st Century. Folkestone: Global Oriental, 2005.

HOOK, G. D., J. GILSON, C. W. HUGHES, and H. DOBSON. Japan’s International Relations: Politics, Economics and Security. RoutledgeCurzon, 2005.

LONE, Stewart, and Gavan McCORMACK. Korea since 1850. Melbourne, Australia; New York: Longman Cheshire; St. Martin’s Press, 1993.

QUINONES, C. Kenneth, and Joseph TRAGERT. Complete Idiot’s Guide to UnderstandingNorth Korea. Indianapolis, IN: Alpha, 2003.

SHIN, Gi-Wook, Soon-Won PARK, and Daqing YANG. Rethinking Historical Injustice and Reconciliation in Northeast Asia: The Korean Experience. New York: Routledge, 2007.

YAMAZAKI, Jane W. Japanese Apologies for World War II: A Rhetorical Study. London, New York:

Routledge, 2006.

 

Résumé

Entre 1910 et 1945, la Corée était annexée au Japon. Un siècle plus tard, la mémoire de cette époque ombrage toujours les relations nippo-coréennes. Le Japon et la Corée du Sud sont liés aux États-Unis par des alliances militaires, et les échanges humains, économiques et culturels entre les deux pays sont très importants. La menace de la Corée du Nord tend également à rapprocher les deux États. Cependant, la divergence des mémoires historiques et le différend territorial des rochers du Liancourt sont source de tensions parfois très vives. L’année 2010 marquera-t-elle la fin de l’après-guerre des relations nippo-coréennes? Il est peu probable que le Japon accomplisse les gestes requis – visite impériale en Corée et résolution parlementaire d’excuses. Néanmoins, la prospérité économique de la Corée du Sud et le succès de ses institutions démocratiques incitent le pays à contempler avec satisfaction le chemin parcouru en un siècle, et à se tourner vers l’avenir.

* Université de Sydney, Département d’Études Japonaises. Directeur du Programme d’Études Asiatiques de l’Université de Sydney. Ancien chercheur à la Maison franco-japonaise, Tokyo. Auteur de Le Japon face à la Corée à l’époqueMeiji, Paris, Maisonneuve et Larose, 2002.

. Cf. BABICZ, Lionel. « Japon, Chine, Corée: vers une conscience historique commune? », Ebisu, n° 37, printemps-été 2007, pp. 19-46. http://www.mfj.gr.jp/publications/ebisu/no_37/index.php

[2]

MITANI, Hiroshi. « Historical Memories in East Asia: Political Settings and Problems in the History Textbook Issue. » Historical Dialogue and Reconciliation in East Asia. Colloque au Harvard Yenching Institute, 12-13 septembre 2008. http://hyi.hmdc.harvard.edu/files/uploads/Historical_Memory_Issue_MITANI_Hiroshi.pdf

[3]

Une augmentation de 35% par rapport à 2008. http://www.tourism.jp/english/statistics/outbound.php

[4]

Une diminution de 40% par rapport à 2008. http://www.tourism.jp/english/statistics/inbound.php

[5]

Avec 7.6 % des exportations. Le premier destinataire des exportations japonaises est les États-Unis (17.8%), suivis de la Chine (16%), selon les chiffres de 2008. https://www.cia.gov/library/publications/the-world-factbook/geos/ja.html

[6] ,

Avec 6.6% des exportations. Le premier destinataire des exportations coréennes est la Chine (21.4%), suivie des États-Unis (10.9%). Chiffres de 2008. https://www.cia.gov/library/publications/the-world-factbook/geos/ks.html

[7]

Chine 17.7%, Japon 14%, États-Unis 8.9%. https://www.cia.gov/library/publications/the-world-factbook/geos/ks.html

[8]

ZISSIS, Carin, and Youkyung LEE. « The U.S.-South Korea Alliance. » Council on Foreign Relations, April 14, 2008. http://www.cfr.org/publication/11459/ussouth_korea_alliance.html

[9]

HOOK, G D, J GILSON, C W HUGHES, and H DOBSON. Japan’s International Relations: Politics, Economics and Security. RoutledgeCurzon, 2001. pp.124-126; NYE, Joseph S. Jr. « An Alliance Larger Than One Issue. » The New York Times, January 6, 2010.

[10]

JO, Hyeran, and Jongryn MO. «Does the United States Need a New East Asian Anchor? The Case for U.S.-Japan-Korea Trilateralism.» Asia

Policy 9, January 2010, pp. 67-99; CHA, Victor. Alignment Despite Antagonism: The United States-Korea-Japan Security Triangle. Stanford

University Press, 2000)

[11]

La spectaculaire visite en Corée de Nakasone Yasuhiro en 1983 (il se rend à Séoul avant de se rendre à Washington) est la première visite

officielle d’un Premier ministre japonais dans la péninsule depuis la fin de la guerre.

[12]

http://www.kantei.go.jp/foreign/hatoyama/statement/200910/09kyoudou_e.html 1257D 12:02 14/02/10 2/2

[13]

Le Japon et la Corée ne furent jamais, à proprement parler, en état de guerre. Le terme « après-guerre » désigne donc ici la période post-coloniale,

qui s’ouvrit le 15 août 1945.

[14]

Par l’historien japonais Yoshimi Yoshiaki et le quotidien Asahi.

[15]

Les indemnités versées, par exemple, proviennent de donations de la société civile, et non de fonds gouvernementaux 1257D 12:02 14/02/10 3/3

[16]

Les manifestations du mercredi débutèrent en 1992. Le 13 janvier 2010, a eu lieu le neuf centième rassemblement. 1257D 12:02 14/02/10 4/4

[17] Kim Dae Jung (1925-2009), président de la Corée du Sud de 1998 à 2003.

[18]

La peine devait être commué en vingt ans de prison, puis Kim Dae Jung finalement expulsé vers les États-Unis 1257D 12:02 14/02/10 6/6

[19]

Une résolution parlementaire aux termes équivoques a été adoptée à une faible majorité en 1995.

[20]

Cf. BABICZ, Lionel. « Japon-Corée: de vaines excuses? » Raison Publique, no. 10 (mai 2009) pp. 17-28.

[21]

En septembre 2009, le président Lee Myung-bak a invité le Japon à marquer le centenaire de l’annexion par une visite impériale en Corée. http://world.kbs.co.kr/english/news/news_newissue_detail.htm?No=1353

[22]

http://www.mofa.go.jp/mofaj/kaidan/yojin/arc_98/k_sengen.html

[23]

http://www.mofa.go.jp/mofaj/kaidan/yojin/arc_98/k_kodo.html 1257D 12:02 14/02/10 8/8

[24]

Au total, entre 1959 et 1984, quelques cent mille Coréens du Japon ont regagné Corée du Nord. 1257D 12:02 14/02/10 9/9

[25]

Cf. p. ex. le film Abduction: The Megumi Yokota Story. http://www.abductionfilm.com/ 1257D 12:02 14/02/10 10/10

[26]

«Korea looks to elevate national prestige.» The Korea Herald. 1/1/2010.

http://www.koreaherald.co.kr/NEWKHSITE/data/html_dir/2010/01/01/201001010063.asp

[27]

En 2010, la Corée du Sud devrait connaître une croissance annuelle d’environ quatre à cinq pour cent.

[28]

«Nikkan heigo hyakunen, medatanu hihan.» Asahi shinbun. 5/1/2010 1257D 12:02 14/02/10 11/11

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