L’Afrique, terre de rivalités

Ali RASTBEEN

Fondateur et Président de l’Académie de Géopolitique de Paris. Directeur éditorial de la revue Géostratégiques. Auteur de Géopolitique de l’Islam contemporain, Edition I.I.E.S., 2009.

Octobre 2009

DEPUIS DES SIÈCLES, l’Afrique, réservoir de richesses, a été un foyer de rivalités et de convoitises internationales dont domestiques. Aujourd’hui, l’Europe n’est plus la seule puissance qui domine tout ce continent. Depuis plusieurs années, les Etats-Unis ont également assuré leur présence sur ce continent encore meurtri par les colonialismes. Cette présence a été marquée par l’indépendance du Congo : la résis­tance belge, la guerre intérieure, la tragédie de la résistance sans issue de Lumumba et le meurtre du premier secrétaire de l’Organisation des Nations unies, le début d’un mouvement d’indépendances virtuelles en vue de freiner le nationalisme sur l’ensemble du continent. Au début de ce troisième millénaire, la Chine a également fait son entrée sur cette scène tandis que la Russie tente également d’y assurer sa présence. On assiste également à des balbutiements en vue de dépasser le stade pré­liminaire (stade prolongé en raison de la présence coloniale dans ce continent) dans l’action des nouveaux régimes africaines sur les plans régionaux et internationaux.

Les attraits de l’Afrique

Quels sont les attraits de l’Afrique ?! C’est un continent dont la découverte n’est pas récente et l’environnement y est relativement hostile. Certains territoires de ce continent sont composés de déserts arides proches de l’équateur. Or, une partie importante de ce qu’on appelle richesse, à travers l’histoire des civilisations, est concentrée dans ce continent. L’Afrique est le second continent le plus vaste de notre planète. Elle englobe un cinquième des terres du monde. Dans l’histoire des civilisations, elle constitue le plus grand continent, en rivalité avec l’Asie. Les civili­sations de Chine et de l’Inde sont issues de l’Asie, tandis que l’Afrique a été le ber­ceau des civilisations égyptienne, éthiopienne et autres.2 Le voisinage de l’Afrique avec l’Asie et l’Europe a été à l’origine de liens anciens entre ces trois continents. L’Afrique s’étend au sud de la Méditerranée et le détroit de Gibraltar constitue le fossé naturel qui délimite le sud de l’Europe du nord ouest de l’Afrique. Le canal de Suez relie l’Afrique à l’Asie et au désert de Sinaï qui a une place importante dans la littérature religieuse. Avant la construction de ce canal, les deux continents étaient attachés. Deux mille ans se sont écoulés afin que la liaison entre la Méditerranée et la Mer Rouge se concrétise et que les deux continents se séparent.3

Cependant, l’Afrique était restée méconnue jusqu’au début du 19e siècle. C’est au cours de ce siècle que le colonialisme a réussi à explorer l’ensemble de ce conti­nent. Auparavant, le Nouveau monde a été découvert en contournant l’Afrique. Si autrefois les Grecs et les Romains affrontaient l’Egypte, Carthage et l’Ethiopie, en revanche, au Moyen Âge, les produits de la pêche et du commerce de la population de l’Afrique noire étaient à l’origine du progrès du commerce mondial. Le déclin du commerce d’esclaves n’a pas diminué l’intérêt de l’Europe pour ce continent. Le colonialisme a établi le même rapport esclavagiste au sein de ses territoires conquis. Jusqu’à la Seconde Guerre mondiale, la mainmise sur l’Afrique constituait l’objet de rivalités entre les puissances européennes.

Une décolonisation avortée

La décolonisation a été une des incapacités de la Société des nations et plus tard de l’Organisation des nations unies, en vue d’établir un système mondial de la souveraineté des peuples. La Société des nations a limité son rôle en partageant les territoires de l’empire ottoman en Asie et en Afrique entre les vainqueurs de la guerre. Les Nations unies de leur côté ont supporté, pendant une longue période, la présence d’un régime d’apartheid en Afrique du Sud. Les réunions des Nations unies s’étaient transformées en champ d’affrontement entre les partisans et les op­posants d’apartheid. Jusqu’à ce jour, les Nations unies n’ont pas encore joué un rôle efficace dans la défense des peuples des anciennes colonies. L’origine des crises dans les pays nouvellement indépendants de l’Asie et d’Afrique, devrait être recherchée, entre autres dans le manque de responsabilité et plus exactement dans l’incapacité de prendre des responsabilités de l’Organisation des nations unies.

En Afrique (englobant 56 Etats indépendants, dont un seul – l’Egypte – a conquis son indépendance en 1922 et un autre – l’Ethiopie – qui a réussi obstiné­ment à préserver son indépendance face à l’agression de l’Italie mussolinienne ou le Libéria qui depuis 1847 s’est doté d’un pourvoir indépendant), le colonialisme a sévi en tant que régime officiel jusqu’à la moitié du 20e siècle et les pays étaient cités avec le préfixe de la puissance colonisatrice.

La poursuite de la vie tribale constitue la principale difficulté des autres pays africains. Les guerres tribales entre deux pays voisins ou au sein même d’un pays unique sont des événements courants. Même après l’indépendance de ces pays, cette situation se poursuit et bénéficie du soutien des puissances étrangères. À cette manifestation de la politique néo-coloniale, il convient d’ajouter un autre élément, celui des coups d’Etat dus à la carence du système social, le soutien des puissances étrangères rivales et la tradition issue de l’héritage des anciens maîtres.4

Le comportement tribal est présent dans les fondements des systèmes poli­tiques et gouvernementaux. Bien que l’histoire politique contemporaine du monde compte de nombreux combattants issus du continent africain, néanmoins l’infras­tructure sociale restée inchangée depuis des siècles rejette un mouvement harmo­nieux vers des changements. La vulnérabilité des régimes en place est telle qu’il existe encore, dans les pays européens, des légions prêtes à participer aux insécurités dans ces pays. Aux Etats-Unis, certaines sociétés proposent de tels services signes de la poursuite des anciennes politiques coloniales.

Outre ces difficultés politiques internes et externes des Etats du continent afri­cain, la pauvreté et la faim sont deux fléaux qui sévissent sur ce continent depuis l’époque esclavagiste jusqu’à nos jours. Il est à noter que ce sont plutôt les fauteurs de ces fléaux que les défenseurs de ce continent qui en bénéficient.

Une pauvreté assise sur une mine d’or

Est-ce cela la véritable image de l’Afrique ? La réponse est sans doute négative. Si l’Afrique n’était qu’un territoire de pauvreté, de famine et de maladies, pourquoi alors, depuis des siècles, a-t-elle exercé son attrait sur l’ouest, l’est et le nord ? Si sa population autochtone présente des défauts pourquoi alors ces mêmes autochtones amenés en esclave aux Etats-Unis y ont accumulé des richesses et ont contribué à la culture et pourquoi, en France, ils sont devenus des éminences en matière de littérature.5

La principale difficulté du monde réside dans le système international qui le régit et dont la responsabilité officielle relève des Nations unies. Or, dès le début, cette Organisation, compte tenu de ses statuts, n’avait pas eu la possibilité d’être présente dans les domaines politique, économique, social et militaire dominants. La libre concurrence des puissances, dans le cadre de leur domination militaire, écono­mique et politique sur le monde est le facteur principal qui interdit un mouvement harmonieux de la civilisation.

L’Afrique affamée, malade, en proie à des coups d’Etat et aux guerres inces­santes mêlées de génocides militaires et tribales, englobe les richesses les plus va­riées. Aujourd’hui, à l’aube du troisième millénaire, les quatre coins du monde convoitent ce continent. Il suffit de prêter attention à ces statistiques : parmi les cinq continents du monde, l’Afrique occupe la première place quant aux réserves de manganèse, chrome, bauxite, or, plutonium, cobalt, diamant et phosphore, la deuxième place en matière de cuivre, amiante, uranium, graphite et la troisième quant aux réserves de pétrole, gaz, fer, titane, nickel, mercure, étain, zinc et pierres précieuses. De même, l’Afrique dispose d’une nature qui attire la convoitise des acteurs internationaux.6

Les principales réserves de pétrole et du gaz se situent sur les abords de la Méditerranée et du Sahara. La Conférence du commerce et du développement de l’Organisation des nations unies a évalué, en 2001, les réserves de pétrole de l’Afrique à 80 milliards de barils et ses réserves de gaz à 6 trillions de mètres cubes. La Libye, l’Algérie, la Tunisie, le Maroc, l’Egypte (bassin du golfe de Suez), la Guinée, le Nigeria, le Gabon, le Congo et l’Angola sont les principaux pays dis­posant des réserves de pétrole et de gaz. Les réserves de houille de l’Afrique ont été évaluées à 155 milliards et 700 millions de tonnes dont la majeure partie se trouve dans la République d’Afrique du Sud (129 milliards de tonnes) ainsi qu’au Zimbabwe, Suzyland, Botswana, Mozambique, Nigeria, Madagascar, Tanzanie et Zambie. Les réserves de fer de ce continent occupent la seconde place après les Etats-Unis et s’élèvent à environ 42 milliards et 300 millions de tonnes dont 78 % en République d’Afrique du Sud et 21 % au Zimbabwe. Les réserves de manganèse, 12 milliards et 700 millions de tonnes (soit 90 %) sont concentrées en Afrique du Sud. La bauxite : 25 milliards de tonnes dont 21 milliards se trouvent en Guinée. Le cuivre, 162 millions et 700 mille tonnes est en majeure partie concentré en Afrique centrale, au Congo et au Zimbabwe.

Les insécurités et les conflits permanents dans la plupart des territoires de ce continent puisent leur origine dans la rivalité des puissances étrangères pour la mainmise sur ces richesses dont une partie vient d’être mentionnée.

Les ingérences ne se réalisent pas uniquement à travers des présences militaires ou des provocations internes. Une série d’organisations internationales tentent de dévier les efforts économiques des pays africains en instaurant des dépendances sécuritaires et militaires. Une série de ces intrigues provient des recommandations de la Banque mondiale qui constituent des conditions préalables à l’octroi des emprunts. Ces mêmes recommandations dans le cadre des pays asiatiques qui se poursuivent depuis plus d’un demi-siècle y ont provoqué des résultats négatifs. Un exemple de cette action négative de la Banque mondiale vers la fin du 20e siècle a été appliqué au Mali. Derrière l’Egypte, le Mali est le plus grand pays producteur du coton en Afrique. 95 % de la production du coton de ce pays sont utilisés dans les manufactures publiques maliennes. Pour bénéficier des emprunts de la Banque mondiale, l’Etat malien a accepté le plan de privatisation des sociétés de tissage. Suite à l’application de ce plan et la création de six établissements privés qui ont remplacés les entreprises publiques, la production de coton de Mali a diminué de 415 mille tonnes à 320 mille tonnes dans une période de deux ans. Les sociétés privées n’ont pas pu se substituer aux entreprises d’Etat et les conséquences ont été subies par les agriculteurs et les champs de coton.

Les recommandations financières et économiques de la Banque mondiale, sans que cette institution soit responsable des conséquences, ont été catastrophiques dans d’autres pays et ont abouti à une plus grande dépendance des économies lo­cales. Aujourd’hui les pays africains sont tributaires de leurs dettes extérieures et régulièrement les pays contractant sous couvert de pseudo générosité effacent une partie de leurs dettes ! Ces dettes constituent, en réalité, une chaîne de dépendance qui lie les emprunteurs à leurs créanciers.7

le poids des États-unis

La présence des Etats-Unis en Afrique n’est pas un fait nouveau ! Dès le début de la vague d’indépendance des pays africains, Washington a instauré son parapluie de protection sur les nouveaux Etats en vue d’assurer ses propres objectifs. Les pays européens, en proie à leurs crises intérieures, ne pouvaient qu’accepter la présence américaine dans leurs colonies africaines. À l’époque, Washington cherchait sur le plan de sa politique internationale de s’assurer du plus grand nombre de voix des membres de l’Organisation des nations unies face à Moscou. À l’apogée de la rivalité entre Moscou et Washington, les membres des Nations unies étaient sur­nommés la « machine à voter des Etats-Unis ». Cet avantage politique n’était pas le seul recherché. Lors de la guerre d’indépendance en Algérie contre la France, où la question du pétrole était prédominante, les Etats-Unis ont suivi la même politique que lors de la guerre entre l’Egypte d’une part, la France et l’Angleterre de l’autre, à propos du canal de Suez. Défendre la partie la plus faible en vue d’assurer sa propre présence. Cette politique fut également poursuivie par Washington, après des an­nées de soutien apporté au régime d’apartheid de l’Afrique du Sud, ce qui a abouti à la création du gouvernement de Nelson Mandela. Cependant, les Etats-Unis ont besoin d’une présence sans rivale en Afrique. Dans le passé, les Etats-Unis n’ont d’ailleurs jamais cessé d’assurer leur présence dans les événements qui se sont dé­roulés en Afrique. Dans certains cas, ils ont même avancé des pions radicaux, ainsi certains mouvements radicaux dans les guerres intestines, jouent le jeu planifié par la politique pétrolière américaine. En Angola, cette politique a été à l’origine d’une crise de longue durée.

Les efforts déployés pour s’assurer du monopole pétrolier

Les néo-conservateurs de l’administration Bush avaient également prévu pour l’Afrique, à l’instar de l’Asie occidentale, des objectifs pétroliers dans le cadre de leur stratégie en Irak et en Afghanistan. Au début du troisième millénaire, Washington a visé l’Afrique à travers une invasion silencieuse. En janvier 2003, Le Monde di­plomatique rapportait les propos du vice-ministre américain des Affaires étrangères dans les affaires africaines : « Le pétrole du continent africain est devenu un des intérêts nationaux stratégiques des Etats-Unis ». Il y est également rapporté de la bouche d’un sénateur américain président du Comité latéral : « Depuis le 11 sep­tembre, pour assurer la sécurité nationale, le pétrole du continent africain doit être considéré comme une priorité ». Le journaliste du Monde diplomatique avait égale­ment fait allusion à un groupe d’activistes américains en Afrique : « Les interventions préventives dans le soutien aux négociations de paix au Gabon, la sous-entendue invitation adressée au Nigeria pour quitter l’OPEP, le premier voyage d’un ministre américain des Affaires étrangères au Gabon, l’invitation au petit-déjeuner par M. Bush de dix chefs d’Etat d’Afrique centrale, le voyage à but de renseignements d’un général américain de haut rang appartenant au commandement militaire suprême des Etats-Unis en Europe à Sao-Touré et Principe pour examiner la question de la sécurité des opérateurs pétroliers dans le golfe de Guinée, la probable installation d’un commandement militaire de second degré dans cette région… », mais, pour les sociétés pétrolières américaines, bien avant le 11 septembre 2001, l’Afrique pé­trolière s’était transformée en priorité géopolitique. Robert Murphy, conseiller aux Affaires étrangères des Etats-Unis en Afrique insistait sur la nécessité de « préserver la plupart de ces réserves à l’égard des insécurités politiques et sociales ».

L’évolution de la politique en Afrique

Depuis plus d’un siècle, la question de domination des réserves pétrolières s’inscrit en tête de liste des efforts du capitalisme et, pour ce faire, il a enchaîné de nombreux peuples à travers le monde. Cependant, le pétrole n’est pas la seule richesse qui régit la destinée des peuples africains. Ce continent est en proie à de nombreuses difficultés liées à sa diversité naturelle, sa structure géographique parti­culière, la poursuite historique de la mainmise étrangère, la nécessité de la poursuite de l’existence tribale signe de résignation instinctive face à la nature et qui se pour­suivent depuis des millénaires.

La population de l’Afrique ne correspond guère à sa superficie dont la raison réside non seulement dans sa géographie mais également dans la période du com­merce d’esclaves. Ce facteur agit également aujourd’hui sous forme d’exode vers des anciens pays colonisateurs et qui sous l’appellation de « l’étranger » offre des services bon marché et difficiles, sous forme d’un « esclavage voilé » au sein des couches sociales vivant à la périphérie des villes.

Bien que le christianisme s’est propagé en Afrique avant l’Islam, néanmoins la majeure partie et la plus importante de ce continent est soumise à l’Islam jouant un rôle prépondérant dans la culture et la civilisation islamiques. De son côté, la progression de l’Islam a eu une influence réciproque sur ses territoires conquis leur conférant une identité arabe (c’est la même métamorphose qu’on constate au Moyen-Orient). Depuis l’invasion coloniale de l’Afrique jusqu’aujourd’hui, les mis­sionnaires chrétiens ont joué un rôle de premier plan dans l’instauration du colo­nialisme sans qu’ils puissent, pour autant, provoquer une métamorphose à l’instar de l’Islam.

L’influence culturelle de l’Occident sur le continent africain, conformément à leur domination, peut-être constatée à travers les pays francophones et anglo­phones. Cette influence culturelle a été utilisée par la suite comme un moyen de communication de la part des pays occidentaux. Cette classification a, à un certain point, transformé ces pays en leur arrière-cour.

Durant les soixante dernières années, la décolonisation a coûté très chère aux mouvements nationaux. Mais, compte tenu des évolutions mondiales, elle se pour­suit progressivement. Outre les luttes nationales, pour lesquelles tous les peuples du monde ont payé un prix fort, la tendance pour une unité d’action en vue de sauvegarder la souveraineté et les intérêts de chaque pays a trouvé de plus en plus d’adeptes au sein du groupe des Etats africains. Les efforts déployés au niveau mon­dial ainsi qu’au niveau continental durant le siècle dernier, pour la création du front des pays non alignés, face aux deux blocs d’Est et de l’Ouest avec la participation de certains dirigeants africains, ne sont pas étrangers à cette volonté d’union.

Les évolutions mondiales au cours des deux dernières décennies du 20e siècle, ont renforcé le rôle politique de Nelson Mandela en Afrique et l’apparition d’une république indépendante en Afrique du Sud a préparé de nouveau le terrain en vue de l’union des Etats de ce continent. Actuellement, au travers de cette union, des ef­forts sont entrepris, parallèlement à ceux de l’Organisation des nations unies, en vue de résoudre les défis internes du « continent noir ». Cette même union est l’interlo­cutrice des Nations unies, en vue de solutionner les difficultés : les conflits tribaux, les guerres entres Etats ou dans les affrontements entre les Etats et leurs propres armées. L’Union africaine est loin d’avoir l’influence nécessaire pour contrôler tout ce qui se passe dans le continent, mais le fait même qu’elle a pu se hausser au ni­veau d’un interlocuteur vis-à-vis du monde revêt une grande importance. Les Etats africains se préparent à jouer leur rôle dans le domaine des relations internationales.

Un « non » louable

En janvier 2008, le rédacteur en chef du Monde diplomatique, dans un article consacré au rejet du « traité économique (APE) » de la part des dirigeants africains, lors de la seconde réunion des dirigeants de l’Europe et de l’Afrique à Lisbonne, a exprimé son admiration à l’égard des dirigeants africains : « Ce qu’on ne pouvait même pas imaginer vient de se réaliser. L’Afrique qui, en raison de sa pauvreté se trouvait sous la domination, s’est reprise et par un enthousiasme révolutionnaire a fait fi de la fierté des européens et leur a dit « non » : « non » au traité des colla­borations économiques (APE) qui, comme une camisole, assujettissait l’Afrique…, « non » à tous les vestiges des « traités coloniaux ».

La signature de ce traité, dans le sens de l’Organisation mondiale du commerce, était l’objet de la rencontre entre les dirigeants du Sénégal, de l’Afrique du Sud et un délégué de la Namibie représentant l’Union africaine. Le président du Sénégal, dénonçant les termes de ce traité l’a rejeté, tandis que le Président de l’Afrique du Sud et le délégué namibien n’ont pas également signé le traité. La conférence des chefs d’Etats européens et africains s’est soldée par un échec.

Cette démonstration d’indépendance n’est pas le fruit du hasard ; elle est le résultat d’un ensemble d’événements dans la politique internationale comme en Afrique. Un de ces événements est l’apparition d’Attac, mouvement de résistance face à la mondialisation du capitalisme dans le cadre de l’Organisation mondiale du commerce et de la Conférence annuelle de Davos qui, à travers un mouvement international a dénoncé les dangers de ce type de mondialisation ou monopolisa­tion. Parallèlement, en Amérique latine, en Asie et en Afrique, nous assistons à la réapparition d’une tendance visant à régénérer l’Organisation des pays non alignés. On peut constater cette tendance à travers les relations difficiles de certains pays avec l’Europe et les Etats-Unis.

Une seconde prise de position de l’Union africaine concerne la question mon­diale des gaz à effet de serre. Un objet principal de conflit entre le Nord et le Sud. Des négociations se déroulent entre les Etats africains membres de l’Union dont le siège se trouve en Ethiopie, afin de participer par prise de position unitaire, à la conférence de décembre des Nations unies destinée à examiner le droit des pays vulnérables à l’égard des gaz à effet de serre (et dans la production desquels ils ne jouent aucun rôle).

L’Afrique contemporaine se trouve dans une situation où elle peut accepter toute rivalité pacifique dans l’investissement et la collaboration économique. L’entrée de la Chine sur la scène africaine ne porte préjudice à personne, au contraire, c’est une contribution à la découverte d’un continent qui, pendant plusieurs décennies, a subi des dommages naturels et humains assez conséquents. L’avantage des Chinois dans le cadre de la rivalité en Afrique est qu’ils sont étrangers par rapport aux an­técédents coloniaux du continent. Dans la crise financière et économique qui sévit encore dans le monde, les Chinois font partie des sinistrés de cette tempête soulevée par les puissances financières qui dominent le monde. Le sentiment d’une entente mutuelle avec les membres de l’Union africaine et les Etats qui faisaient hier partie des rangs des non alignés et qui, aujourd’hui, sont des opposants aux puissances dominatrices du monde, est une carte gagnante qui utilisée à bon escient par les Chinois, pourrait ouvrir sur l’Afrique un nouvel horizon dans l’évolution des rela­tions et de la coopération des peuples.

Notes

  1. Histoire générale de l’Afrique de Joseph Ki-Zerbo, Unesco, Comité scientifique in­ternational pour la rédaction d’une histoire générale de l’Afrique.
  2. Grandes civilisations : Afrique, Amérique, Asie, Europe, Océanie de Philippe Jacquin, (sous la direction de José Garanger), Ed. Collectif.
  3. Géopolitique de l’Afrique de Philippe Hugon.
  4. Rapport sur le développement en Afrique 2008/2009 : Règlements des conflits, paix et reconstruction en Afrique.
  5. L’Afrique du XXIe siècle l’Afrique de nos volontés de Jacques Bonjawo.
  6. Richesses et Misères des Forets de L’Afrique Noire Française. Mission Forestière : A.E.F. – Cameroun – A.O.F. 1945 – 1946. Auteur : Aubreville A., Inspecteur géné­ral des eaux et forêts des colonies.
  7. La Banque Mondiale et les pays en développement. Badara DIOUBATÉ.
  8. Organisation of Islamic Conference ; Research Centre for Islamic History, Art & Culture. Institut fundamental d’Afrique Noire. Edité par Samba Dieng. Préface par Ekmeleddin Ihsanoglu. IRCICA. IFAN.
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