Le « nouveau terrorisme » sous le prisme des « Nouvelles guerres »

Tewfik Hamel

Chercheur en histoire militaire et études de défense à l’université de Montpellier

Résumé :

Tout changement historique dramatique comme la fin de la guerre froide entraine, ou est associé à, un effort de contestation des compréhensions géopolitique et sociologique existantes. Les transformations de cette nature nécessitent de nouveaux horizons d’interprétation et paradigmes explicatifs pour guider actions et pratiques. Parallèlement, les changements dans les stratégies militaires, les idéologies et les pratiques politiques, les moyens de l’art de gouverner, contiennent toujours une dimension linguistique importante. A ce titre, la période post-guerre froide a connu une inflation conceptuelle. Même la « mondialisation » -le « mot » à la mode du moment dont une série de concepts lui sont directement liés- pose d’épineux problèmes épistémologiques. Le concept s’exprime dans toutes les principales langues du monde. Pourtant, à part l’idée que dans le processus beaucoup est en train de changer, sa définition est « problématique ». Dans les sciences sociales, il est souvent difficile de retracer l’origine des concepts, théories et idées qui sont des produits d’efforts collectifs.

Il est donc extrêmement difficile de déterminer qui a utilisé ce terme pour la première fois. Ce qui est certain en revanche est que la mondialisation est à la fois une série de pratiques institutionnelles et un ensemble de concepts, discours et récits l’accompagnant. Le « nouveau terrorisme » et « nouvelles guerres », qui sont l’objet de cet article, font partie d’un travail re-conceptualisation plus large. Cela implique deux choses au moins ; travailler sur les concepts, les noms et la nature d’une époque est un exercice de stratégie, pas de taxonomie ; les constructions théoriques et conceptuelles puisent dans des sources institutionnelles et culturelles profondément ancrées. Quatre phénomènes interdépendants -sources de confusion- obscurcissent les causes et les enjeux des conflits en cours, et rendent la guerre inévitable et la nature de la violence insaisissable ; (1) « culturalisation » croissante de la politique ; (2) « politisation » croissante de la culture ; (3) militarisation croissante de la politique et ; (4) « arsenalisation » croissante de la culture. 

Summary: Any dramatic evolution such as the end of the Cold War, seriously challenges existing sociological dynamics and parameters. New horizons of interpretation and explanatory paradigms must take place, despite the fears. Which in turn metamorphoses political ideologies, and operates changes in military strategies. For example, there now exists a holistic world approach or globalization that is the blossoming of internationalization – a re-defining of everything so that blossoming can be rhythmed.

 

Il est devenu banal d’affirmer que le 11 Septembre 2001 (11/9) a eu un impact sur ​​la définition de la sécurité au XXIe siècle. Beaucoup ont clamé que ces attaques ont « tout » changé, le monde ne sera plus pareil et qu’il y a un avant 11/9 et un après 11/9. Mais, enfin, cet environnement, tel que décrit, n’a rien de nouveau. Les menaces qui lui sont associées étaient au cœur des préoccupations de la communauté stratégique bien avant. Le phénomène des États faillis et ses liens supposés avec le terrorisme, la criminalité transnationale, les insurrections, et une foule d’autres maladies à la sécurité nationale ne sont guère nouvelles, et certainement pas limités au monde post-11/9 comme certains voudraient nous le faire croire.[1] La théorie du chaos avait en effet déjà gagné des convertis parmi les planificateurs militaires et la communauté du renseignement et des services à l’étranger. Son influence a été manifeste dans une série de politiques et d’engagements américains à l’étranger. L’idée est que la violence collective à grande échelle ne se produit pas dans le vide. La recherche se concentre sur la faillite de l’Etat comme une variable clé et la mondialisation qui est le principal catalyseur.[2]

Al-Qaïda n’a pas émergé soudainement. Son origine remonte à la fin des années 1980. Ses intentions hostiles étaient connues et ses capacités étaient visibles dans plusieurs attaques antérieures.[3] L’idée selon laquelle une attaque sur des cibles urbaines américaines représentait un événement de « cygne noir » inimaginable[4] est non seulement sans fondement, mais pourrait aussi être un alibi trompeur qui soulage et dédouane les décideurs. Le terrorisme est une construction généralisée tirée des concepts de la morale, du droit et des règles de la guerre, alors que les terroristes sont façonnés par la culture, l’idéologie, la politique, la géopolitique, etc. –facteurs spécifiques inchoatifs qui motivent diverses actions. Sont nombreux qui ont conclu que les événements ont démontré la validité de la thèse selon laquelle il y avait un « nouveau » terrorisme, religieux et apocalyptique, de plus en plus en réseau plutôt qu’hiérarchique et très différent du « vieux » terrorisme.[5]

Le « nouveau terrorisme »

Après avoir été la logique dominante avant le XIXe siècle, le terrorisme d’inspiration relieuse réapparait à partir des années 1980 alors que certains facteurs ont catalysé sa sécularisation au XXe siècle. Durant ce siècle, l’évolution était plutôt vers le terrorisme laïc qui fut alimenté par certaines notions comme le nationalisme et la citoyenneté de la Révolution française. L’anticolonialiste et de les luttes de libération nationales qui ont suivi la Seconde Guerre mondiale ont influencé l’identité ethnique et le caractère idéologique des terroristes séparatistes qui se sont fait connaître dans les années 1960 et 1970. Mais depuis les années 80, on assiste à la renaissance du terrorisme motivé par des impératifs divins conformément à la tendance en cours à propos du retour du religieux dans un vide idéologique. Au niveau international, la révolution iranienne, le retrait soviétique d’Afghanistan (que beaucoup d’islamistes considèrent comme une victoire pour les moudjahidines), et l’intervention américaine en Irak ont donné un nouvel élan à la re-politisation de l’islam.[6] L’intervention, indirecte en Syrie[7] et directe en Libye, a encore aggravé la situation. Ce processus de re-politisation façonne un processus plus large où une série de facteurs sont à la fois produits, composantes et catalyseurs. Alors qu’hier, le terrorisme est considéré comme une facette de la politique laïque, principalement associée à la montée du nationalisme, l’anarchisme et le socialisme révolutionnaire, le terrorisme islamiste s’inscrit dans ce que appelle la « quatrième vague », celui motivé par des impératifs divins[8].

Le nouveau « représente une menace très différente et potentiellement beaucoup plus mortelle que les ‘groupes terroristes traditionnels ». Le changement est tellement profond qu’il « brise certaines de nos hypothèses les plus fondamentales sur les terroristes », impliquant un réexamen de facto « de notre réflexion sur le terrorisme et les politiques nécessaires pour le contrer »[9]. Les hypothèses que le terrorisme pourrait être contenu pourraient s’appliquer aux terroristes séculiers, mais en aucun aux terroristes religieux. Car « une transformation radicale, sinon une révolution, dans le caractère du terrorisme » a eu lieu. L’évolution des tendances au sein de la quatrième vague a conduit à un changement significatif en termes de degré de menaces posées à la société. Par conséquent, « de nouvelles définitions et de nouveaux termes peuvent être développés pour les nouvelles réalités »[10]. Au-delà des motivations, les terroristes de la « quatrième vague » de terrorisme opèrent désormais dans un environnement très différent -saturé de médias de masse[11], et où l’accès à des armes est de plus en plus facile. Les terroristes innovent ; exploitent les nouvelles technologies, apprennent les uns des autres, imitent les tactiques, produisent des manuels d’enseignement basés sur l’expérience, les tactiques, les objectifs et les limites de la violence, et justifient leurs actions avec des doctrines et des théories. Quelques tendances peuvent être décelées :

  • Le terrorisme est devenu plus sanglant.
  • Les terroristes ont développé de nouvelles ressources financières, de sorte qu’ils sont moins dépendants de l’Etat.
  • Les terroristes ont évolué vers de nouveaux modèles d’organisation.
  • Les terroristes peuvent désormais mener des campagnes mondiales.
  • Les terroristes exploitent efficacement les nouvelles technologies[12].

Les allégations au sujet de la nature spécifique de la violence religieuse reposent sur un certain nombre d’arguments. Tout d’abord, les terroristes religieux ont des objectifs antimodernes avec une version idéalisée du passé. En même temps, leurs objectifs sont absolutiste, inflexible, irréaliste, dépourvu de pragmatisme politique et hostile à la négociation contrairement à « la plupart des organisations terroristes actives dans les années 1970 et 1980 [qui] avaient des objectifs clairement politiques […et] souvent cherché des concessions politiques spécifiques. Maintenant, un pourcentage croissant d’attaques terroristes sont conçus pour tuer autant de personnes que possible ». Pour certains analystes, le terrorisme a évolué pour devenir une fin en soi (non pas un moyen), et que de nombreux groupes radicaux cherchent la destruction et le chaos comme une fin en elle-même. L’ancien directeur de la CIA, James R. Woolsey, prévient que « les terroristes d’aujourd’hui ne veulent pas d’un siège à la table, ils veulent détruire la table et tout le monde assis autour de celle-ci »[13]. Un argument suggère que les terroristes religieux emploient un autre type de violence. C’est-à-dire « pour le terroriste religieux, la violence d’abord et avant tout est un acte sacramentel ou un devoir divin exécuté en réponse directe à une demande théologique ou impérative. Le terrorisme prend une dimension transcendantale et ses auteurs ne sont donc pas contraints par les contraintes politiques, morales ou pratiques qui semblent affecter d’autres terroristes ».[14]

Hoffman met l’accent sur des systèmes de valeurs, et des mécanismes de légitimation et de justification radicalement différents. Les concepts de moralité embrassés par les terroristes et la vue millénariste qui informe souvent leurs processus de pensée et leurs actions sont également différents. Tandis que la religion semble être la tendance générale dominante de la quatrième vague du terrorisme, les attentats suicide semblent être la force motrice de la hausse de la létalité. En effet, certaines ruptures ont profondément bouleversé la donne en matière de la létalité : 1) la généralisation des attaques suicides ; 2) le culte de la mort collectif (tuer autant que possible) ; 3) le choix d’attaques de cibles plus faciles (en partie dû au manque de capacités pour frapper des cibles difficiles car les terroristes ne cessent pas de s’adapter aux nouveaux environnements opérationnels dans lesquels ils doivent exister ) ; 4) le déclin des groupes (atomisation et autonomisation). La voie est à la privatisation de la violence mettant fin à la fameuse expression : « le terrorisme, c’est peu de victimes mais beaucoup de spectateurs ». Désormais, tuer autant que possible. « Le terrorisme motivé en totalité ou en partie par un impératif religieux, où la violence est considérée par ses praticiens comme un devoir divin ou un acte sacramentel, embrasse des moyens de légitimation et de justification nettement différents de ceux que commettent les terroristes laïcs, et ces traits distinctifs conduisent, à leur tour, à une effusion de sang et de destruction encore plus grande ».[15]

Le terrorisme de la quatrième vague est indissociable de l’émergence des « nationalismes religieux ». Les « nationalistes religieux sont modernes sans être modernistes ». Ils « sont unis par un ennemi commun –le nationalisme séculier occidental- et un espoir commun pour la renaissance de la religion dans la sphère publique ». Le nationalisme religieux est la relation entre nationalisme et une croyance religieuse particulière. Cette relation peut être décomposée en deux aspects: la politisation de la religion et l’influence réciproque de la religion sur la politique. Dans le premier aspect, une religion commune peut être considérée comme contribuant à un sentiment d’unité nationale, un lien commun entre les citoyens de la nation. L’autre aspect politique de la religion est le support à une identité nationale, semblable à une ethnie, la langue ou la culture. L’influence de la religion sur la politique est plus idéologique, où les interprétations des idées religieuses inspirent l’activisme politique et l’action, par exemple, les lois sont votées pour favoriser un respect plus strict des religions[16]. La renaissance de l’Islam comme une force dans les affaires mondiales est l’une des idées de base de la contestation islamiste radicale. Et à ce niveau mythique, l’islamisme radical « partage des points de similitude avec les mouvements politiques d’opposition d’autres temps et lieux, y compris les mouvements nationalistes laïcs, qui appellent eux aussi à la réaffirmation collective ». On peut citer l’IRA irlandais dont « la conscience politique et la volonté d’adopter la violence politique a été façonnée par la vision d’une renaissance de l’Irlande ». D’autres exemples pourraient être cités mais, en somme, sont de « mouvements [qui] diffèrent sur une multitude de points, y compris leur engagement à l’action directe, mais tous partagent la prémisse sous-jacente de la régénération de la communauté par la lutte »[17].

Au sein de la quatrième vague, on distingue deux types de terrorisme religieux : le « terrorisme religieux politique » qui vise des objectifs politiques, par exemple les insurgés qui utilisent la religion comme un moyen pour attirer des disciples et justifier ses actions ; et le « terrorisme millénariste » qui n’a pas un tel objectif et se bat pour un but plus abstrait sacré qui est impossible à atteindre. Les groupes millénaristes n’ont aucun problème à attaquer des cibles civiles. Ils se voient comme non contraints par des valeurs ou des lois séculières. C’est ce dernier type qui affecte le plus les sociétés occidentales et que l’on craint le plus. J. Piazza montre que les groupes liés à Al-Qaïda sont beaucoup plus meurtriers (36,1 morts par attaque) que les groupes religieux qui ne sont pas affiliés à Al-Qaïda (9,1 morts par attaque). Al-Qaïda et Daech sont le meilleur exemple d’un groupe symbolisant le terrorisme millénariste. Seuls les groupes millénaristes semblent perpétuer des attaques au cœur de l’Occident[18]. Après le 11/9, décideurs politiques, commentateurs, stratèges, etc. se sont empressés de se réapproprier cette thèse que le monde fait face à un terrorisme de type différent qui rend obsolètes les analyses précédentes. Dès la fin de la guerre froide, commentateurs, analystes et stratèges cherchaient à développer (et certains prétendaient posséder) une théorie unifiée de la stratégie, une théorie unifiée de la guerre et un métarécit connexe pour le XXIe siècle. La réflexion sur le terrorisme est incluse dans cet effort plus large sur la guerre sous-entendant qu’elle est en train de changer profondément. Les « nouvelles guerres » sont présentées comme constituant le cadre conceptuel de la guerre du XXIe siècle selon lequel « les nouvelles guerres et le nouveau terrorisme sont liés conceptuellement »[19].

 

A l’origine du nouveau terrorisme : Changement de paradigme

Un courant composite de penseurs influents de toute une gamme de diverses disciplines (études de sécurité, économie politique, relations internationales, théorie politique, etc.) suggère qu’ « un changement de paradigme dans la guerre a sans doute eu lieu ». Il a adopté le concept des « nouvelles guerres » selon lequel « l’ancien paradigme est celui de la guerre interétatique industrialisée. Le nouveau est le paradigme de la guerre parmi les populations […qui] peut avoir lieu n’importe où : en présence de civils, contre des civils, pour la défense des civils »[20]. Ce sont des guerres menées essentiellement par des réseaux d’acteurs non-étatiques, où les batailles sont rares et la violence est principalement dirigée contre des civils. Sont apolitiques, irrationnelles et caractérisées par un nouveau type d’économie politique fortement dépendante d’une « économie de guerre mondialisée », qui combine des politiques extrémistes et criminalité. Par conséquent, il faut « changer les perceptions dominantes de la guerre, en particulier parmi les décideurs politiques ».[21] Face à un ensemble de centres et sources de désordre, la victoire exige la mise en œuvre de « capacités militaires pour la ‘guerre parmi les populations’ »[22]. C’est la conclusion du Général Stanley A. McChrystal, Commandant de la Force internationale d’assistance à la sécurité (FIAS) en Afghanistan. « C’est un autre type de combat », prévient-il dans son évaluation de la guerre dans ce pays. Par conséquent, « notre stratégie ne peut pas être portée sur […] détruire les forces insurgés, notre objectif doit être la population. Dans la lutte pour gagner le soutien du peuple, chaque action que nous entreprenons doit permettre cet effort  […] nous devons interagir plus étroitement avec la population et se concentrer sur les opérations qui apportent la stabilité, tout en les protégeant de la violence insurrectionnelle, la corruption et la coercition »[23].

Le « texte théorique fondateur de la thèse » que la guerre est en train de changer est le livre The Transformation of War (1991) de van Creveld. Sa thèse a rapidement été contestée, considéré comme reflétant la proximité personnelle de l’auteur avec Israël (un cas classique de généralisation lié à la première Intifada de 1987-88). La coïncidence de sa publication avec la première guerre du Golfe explique aussi pourquoi il a eu peu d’écho[24]. A ses yeux, le déclin des guerres entre les grandes puissances et la montée des problèmes de sécurité non traditionnels remet en cause de nombreuses hypothèses philosophiques inhérentes à la pensée militaire occidentale. L’ère de la guerre entre les États organisés cède maintenant la place à une ère de guerres non-trinitaires entre les peuples dans laquelle les distinctions classiques de Clausewitz entre l’armée, l’Etat et le peuple, sont érodées. « Partout où nous regardions, les États existants soit se combinent dans les grandes collectivités ou en train de s’effondrer, partout où nous regardons, les organisations qui ne sont pas des Etats prennent leur place ». La guerre sera livrée sur les questions de l’identité et de la religion. Elle « ne sera pas menée par des armées, mais par des groupes que nous appelons aujourd’hui terroristes, guérillas, bandits et voleurs […] Leurs organisations sont susceptibles d’être construites sur les lignes charismatiques plutôt qu’institutionnelles, et d’être moins motivées par le ‘professionnalisme’ que basées sur des loyautés fanatiques basées sur l’idéologie »[25].

Les événements dans les Balkans et ailleurs ont réhabilité la vision de van Creveld de la guerre que le conflit dans le système postmoderne mondial aura un caractère semblable à celui de la guerre prémoderne[26]. Des constats compatibles avec ses analystes qui prétendent que la transformation de la guerre est en cours, conduisant à une augmentation de la barbarisation et l’« irrégularisation » et de la guerre[27]. En effet, les différentes guerres au Caucase, en Yougoslave et à travers l’Afrique ont persuadé certains commentateurs que le monde est entré dans une nouvelle ère de guerres « post-clausewitziennes ».[28] La fin de la guerre froide a entraîné la démolition des frontières, soit politiques, sociales ou économiques. Les vastes régions de l’Europe de l’Est et de l’ex-Union soviétique ont été ouvertes au capitalisme de marché. Les trafiquants de toute sorte ont émergé. Par exemple, pendant et après la guerre et les troubles qui ont englouti les Balkans dans les années 1990, cette région est devenue un itinéraire de trafic important. Dans d’autres régions, les insurgés, la guérilla et les groupes terroristes, qui avaient été pris en charge par l’une ou l’autre des superpuissances pour des raisons stratégiques, se sont retrouvés soudainement frappés d’ostracisme, et se tournent vers le trafic de drogue et la criminalité pour financer leurs activités. En d’autres termes, suite à la perte de leur idéologie et bailleurs de fonds idéologiques, ces groupes ont simplement abandonné leur idéologie et sont devenus des entreprises criminelles.

Dans les cercles militaires, cette ligne générale de l’analyse a initialement été surnommé « guerre de quatrième génération » (G4G)[29]. Apparue à la fin des années 1980, la théorie de la G4G se réactualise constamment que les spécialistes parlent de « guerre nième génération »[30]. Devenue populaire en raison des récents rebondissements dans la guerre en Irak et les attentats terroristes à travers le monde, elle s’est réinventée une fois de plus après le 11/9 quand ses promoteurs ont affirmé qu’Al-Qaida menait une G4G, une forme évoluée d’insurrection qui emploie tous les réseaux disponibles pour atteindre ses objectifs. Elle « est un modèle qui tente d’expliquer une méthode de guerre qui se développe partout dans le monde en réponse à la western way of war et plus particulièrement aux doctrines américaines des guerre terrestres de masse et de manœuvre et des attaques aériennes de précision contre les nœuds et les infrastructures critiques. La guerre de quatrième génération reflète l’idée que la guerre continue à évoluer, mais n’évolue pas selon » le modèle de la RAM (Révolution dans les affaires militaires). La G4G est « exploré par des adversaires et ses techniques ont abouti à de nombreuses victoires »[31]. Sous cet angle, est suggéré que les conflits contemporains que l’on décrit diversement comme « guerres parmi les populations »[32], « nouvelles guerres »,[33] « guerres de troisième type »[34], « guerres non-trinitaire »[35], « guerres ethniques »[36], « guerre à trois volets »[37], présentent tous des caractéristiques communes.

La description de Kaldor est représentative de la re-conceptualisation de ces nouvelles guerres typiques de l’ère mondialisée. La mondialisation, dit-elle, est un « processus complexe contradictoire qui implique effectivement à la fois mondialisation et localisation, intégration et fragmentation, homogénéisation et différenciation »[38]. La montée des militant nationalistes et mouvement religieux peut être expliquée en termes de processus volatiles liés à la mondialisation, et il faut s’attendre à ce que ces mouvement se développent à l’avenir « en raison de l’insécurité croissante et parce qu’ils commencent seulement à exploiter pleinement les possibilités organisationnelles offertes par la mondialisation »[39]. L’argument central est qu’« au cours des deux dernières décennies du XXe siècle, un nouveau type de violence organisée s’est développé, en particulier en Afrique et en Europe de l’Est, qui est un aspect de l’ère mondialisée actuelle ». La Bosnie-Herzégovine est le paradigme de la nouvelle forme de guerre dans les années 1990. Par extension de ce paradigme, elle fait ressembler l’Irak à la Yougoslavie en notant qu’ils étaient deux Etats faillis, déjà en phase de désintégration de l’intérieur (depuis les années 1970 dans le cas de la Yougoslavie). L’invasion a seulement condensé le processus dans un délai de trois semaines dans le cas de l’Irak. La guerre de guérilla au sens large est perçue comme la forme d’expression la plus dangereuse des communautés mécontentes sur le plan social, ethnique et national au niveau mondial[40]. Les activités irrégulières sont le thème dominant de l’environnement de sécurité, principalement « caractérisé par le terrorisme, l’insurrection, la criminalité grave et le désordre »[41].

Traits distinctifs des « nouvelles guerres »

En effet, des penseurs influents de diverses disciplines ont embrassé le paradigme des « nouvelles guerres » selon lequel les conflits depuis la fin du XXe siècle sont différents de leurs prédécesseurs. « Pendant les années 1990, un sous-ensemble distinctif d’insurrections a émergé », affirment Drew et Snow. A bien des égards, « les nouvelles guerres civiles […] sont différents ». Elles sont apolitiques. Mais pas seulement. « Tandis qu’elles sont asymétriques en ce sens qu’elles rejettent ou ignorent les règles conventionnelles de la guerre, elles ont été plus ouvertement non conventionnelle que les insurrections traditionnelles, à la fois dans leurs méthodes et leurs objectifs […]. Ce qui distingue ces conflits à part a été le l’extrême désordre, violence, et absurdité apparente de la souffrance qu’elles ont exigé, essentiellement contre les populations civiles de leurs concitoyens. Ces conflits ont été extrêmement amers, sanglants et horribles dans leur conduite, impliquant souvent la commission de crimes contre l’humanité, et habituellement à des fins qui sont le plus souvent vénales qu’élevées. […] Ils peuvent varier aussi largement par la protection ou l’entretien du trafic de stupéfiants (un sous-ensemble de nouvelles guerres civiles parfois appelées narco-insurrection) ou la fourniture d’un environnement dans lequel le commerce du diamant peut être contrôlée illégalement (connu aussi sous le nom insurrection criminelle) ».[42] Une distinction est vitale entre les « nouvelles guerres » et (qui auraient remplacé) les « vieilles guerres ». Elles sont réparties au-delà des frontières nationales, impliquant une multitude d’acteurs particulièrement non-étatiques aux et, surtout, ciblant les populations civiles. Elles sont apolitiques et irrationnelles. Globalement les traits de différence sont les suivants ;

  • Les nouvelles guerres diffèrent en termes de portée ; elles sont civiles plutôt qu’interétatiques et la privatisation de la violence est règle. Jusqu’aux deux dernières décennies, la guerre a été principalement caractérisée par un conflit armé entre des entités étatiques. Cette nature de la guerre a changé de façon spectaculaire après la fin de la guerre froide. La guerre tend à s’éloigner des conflits interétatiques alors que la marée des conflits ethniques et religieux transnationaux et communautaires est en marche. Deux ans après « Tempête de Désert », Alvin et Heidi Toffler ont souligné que les nations font la guerre à la manière dont elles créent la richesse. Tout comme les ères agricoles et industrielles avaient chacune son propre style distinctif la guerre, l’ère de l’information implique l’avènement d’un nouvel type de guerre[43] : la « guerre postindustrielle »[44] voire la « chaoplexic warfare où règnent les réseaux, dont le cadre est construit sur ​​les nouvelles sciences de la non-linéarité, la complexité, le chaos et l’auto-organisation, et où la guerre est menée par des cellules, des équipes décentralisées ou des essaims -ce que nous appelons à la fois la G3G et G4G »[45]. En tant que tel, les changements les plus spectaculaires de la guerre ne viendront pas des forces conventionnelles, mais des « Netwars »[46]. Les partisans de la G4G ont émis l’hypothèse que les super-terroristes à venir pourraient ne pas avoir une base ou une identité nationale, mais plutôt transnationale, comme une idéologie ou une religion[47]. L’ère de l’ennemi sans visage a sensiblement bouleversé « l’art de la guerre ».
  • En plus d’impliquer plusieurs acteurs le plus souvent non étatiques avec différents griefs, ces guerres sont irrationnelles. Tous les actes de guerre sont des actes politiques et par conséquent la conduite de la guerre doit être faite pour soutenir les objectifs politiques. Mais les nouvelles guerres, de par leur nature, défient les efforts de médiation extérieurs, car elles sont alimentées par des passions qui ne laissent aucune place à un compromis politique rationnel. Elles sont tout simplement « apolitique »[48]. Les « vieilles » -« un affrontement entre des intérêts ou entre des groupes organisés caractérisés par l’utilisation de la force militaire »- sont des guerres menées au nom de la raison d’Etat, et la rencontre décisive est la bataille entre des forces armées.[49]Les politiques identitaires principalement exclusives (ou « la revendication du pouvoir sur la base d’une identité particulière –qu’elle soit nationale, clanique, religieuse ou linguistique ») sont au cœur du concept de nouvelles guerres, remplacent bon nombre des notions réalistes de puissance qui ont formé la base des conflits dans le passé. Ces politiques identitaires constituent une représentation « réinventée » du passé et évoluent en l’absence d’autres sources de légitimité politique.
  • En contraste avec les précédentes guerres qui ont été menées au nom d’objectifs collectifs et, donc, bénéficié d’un soutien populaire fort, les « nouvelles guerres » sont le plus souvent motivées par des fins égoïstes et illégitimes. Ces guerres prédatrices, présentant un nouveau type de violence, varient aussi par la protection ou l’entretien du trafic de stupéfiants (narco-terrorisme, narco-insurrection) ou la fourniture d’un environnement dans lequel le commerce illicite peut être contrôlé illégalement (insurrection criminelle)[50]. Les économies de guerre irrégulière, marquées par la coïncidence de la violence armée et l’économie informelle, offrent aux acteurs étatiques et non-étatiques un accès unique aux opportunités économiques. Dans les situations de conflit, les limites des opportunités économiques sont définies, en premier lieu, par la force relative des factions en guerre. Comme les parties à ces conflits manquent de soutien populaire, ils recourent à la coercition. Un facteur décisif dans la détermination de la stratégie de financement du conflit est le rapport de l’équilibre du pouvoir entre les forces étatiques et non étatiques. La force d’un groupe est en partie déterminée par sa puissance et capacité à contrôler le territoire. Sa liberté d’action dépend à la fois par sa relation à la société dans son ensemble et sa force relative vis-à-vis de l’Etat. En conséquence, la violence sans limite sous forme de massacres, déportations (et/ou viols) de masse est utilisée pour provoquer la peur et compenser enfin le manque de soutien. « Ce qui donne aujourd’hui aux guerres civiles une perspective nouvelle et terrifiante, c’est quelles sont menées sans enjeu de chaque coté, qu’elles sont des guerres sans aucun but », explique Hans Magnus Enznsberger en 1994.[51]Elles sont livrées par amour et pour les sensations fortes qu’elle procure ; « au fur et à mesure que les États s’effondrent, les leaders et les organisations qui font la guerre vont se fondre les uns dans les autres », et « il n’est pas nécessaire de postuler l’existence d’objectifs ultérieurs autres que la guerre elle-même »[52].
  • Le recours un à des techniques de guerre non conventionnelles est une autre caractéristique de ces nouvelles guerres. Les grandes batailles sont ainsi évitées, et « gagner les cœurs et les esprits » est la vraie mesure de la victoire. Un autre aspect de ces groupes d’identité est qu’ils opèrent la plupart du temps en dehors du domaine de l’administration centrale et, n’ayant pas les infrastructures militaires des Etats, ont tendance à se battre avec des tactiques de guérilla. La menace n’est pas seulement le terrorisme, qui n’est qu’une technique. La menace est une G4G, qui est un phénomène beaucoup plus large. Contrairement aux « vieilles guerres », ces nouveaux conflits sont fondés sur des tactiques de combat irrégulières (terrorisme et guérilla au lieu des champs de bataille classiques) ; stratégies militaires différentes (contrôle de la population plutôt que la capture de territoires) ; utilisent différents types de combattants (armées privées, bandes criminelles et seigneurs de la guerre au lieu de soldats ou de conscrits professionnels) et sont très décentralisés. Les unités qui combattent comprennent une gamme disparate de différents types de groupes –chefs guerriers locaux, unités paramilitaires, gangs criminels, groupes de mercenaires, etc. La menace est un ensemble de centres et sources de désordre. « Le danger majeur viendra plutôt de terroristes, de clans armés, de mafias, de cartels, d’extrémistes, de criminels ne respectant aucune contrainte et dont la rationalité ne sera pas la nôtre »[53].
  • Un autre facteur clef de la ces guerres est le nombre et l’identité des victimes. Les civils sont devenus la principale cible des belligérants. Frapper les civils devient un objectif stratégique pour affaiblir l’adversaire, plus qu’un « dommage collatéral ». Les lois régissant les conflits armées (droit international coutumier et droit des traités, y compris les Règles de La Haye, les Conventions de Genève de 1949, les Protocole additionnel et d’autres accords internationaux) prohibent formellement de viser « les biens de caractère civil »[54]. Mais « dans les guerres d’aujourd’hui, les stratégies adoptées par les groupes armés cherchent à amener la bataille plus immédiatement, plus systématiquement et plus massivement au noyau de la population civile »[55]. Une idée soutenue par les adeptes de la G4G, prétendant que l’« infrastructure politique et la société civile [vont] devenir des cibles du champ de bataille »[56]. Les quatre principes de base sont nécessités militaires, humanité, distinction et proportionnalité. Le but principal est de protéger combattants et non-combattants des souffrances inutiles, et sauvegarder les droits fondamentaux des civils et personnes qui ne prennent pas ou plus part au conflit. Ces lois prévoient une protection pour certaines personnes et objets, et réglementent les types d’armes et de munitions qui peuvent légalement être utilisés. De même, elles imposent des limites sur ce qui légalement peut être ciblé. Ces lois présentent des défis particuliers pratiques lorsque le conflit implique des adversaires ne respectant de telles dispositions. Bien que reposant principalement sur le modèle de la guerre interétatique, les Conventions de Genève de 1949 ont également abordé les exigences humanitaires des guerres non-internationales. En 1977, les pressions supplémentaires générées par la décolonisation ont été reflétées dans le Protocole additionnel II, qui accordait des droits à la guérilla qui lutte pour la libération nationale. Les effets collatéraux indésirables et illégitimes des « veilles guerres » sont devenus le principal mode de combat des nouvelles guerres. « Le ratio de victimes militaires par rapport aux victimes civiles était de 8 pour 1 » dans les veilles guerres, les nouvelles guerres ont inversé cette tendance avec un « ratio de victimes civiles par rapport aux victimes militaires d’environ 1 pour 8 ».
  • Les nouvelles guerres sont également considérées comme chaotique, brouillant les divisions traditionnelles (illégal versus illégal, privé versus public, civil versus militaire, interne versus externe, local versus mondial). En droit international, une guerre doit être déclarée, et une fois est déclarée, ses belligérants acquirent des droits légaux et seront soumis à des obligations légales. Mais la tendance actuelle est que les Etats ne déclarent pas la guerre. « Une des leçons de la guerre moderne est que la guerre ne peut plus être appelée la guerre »[57]. Susceptibles d’être largement dispersées et largement indéfinies, les guerres sont devenues floues et le paysage de sécurité est caractérisé par beaucoup d’acteurs dont les motivations, les opérations et les objectifs sont difficiles à cerner. Elles n’ont pas de finalités claires et les forces armées tendent de plus en plus à rejeter la pertinence des définitions classiques de la victoire. L’âge de l’ennemi sans visage a bouleversé « l’art de guerre » et, dans ce type de conflit, la réalisation de la victoire stratégique est susceptible d’être de plus en plus difficile à atteindre. La distinction entre la guerre et la paix sera floue au point de disparaître. La guerre sera non-linéaire, peut-être au point de ne pas avoir des champs de bataille ou des fronts définissables. La distinction entre civil et militaire peut disparaître. L’environnement de sécurité sera caractérisé par la fragmentation et le brouillard de la paix. Le résultat ; des guerres de facto se produisent, qui sont clairement des guerres, mais qui ne sont pas nécessairement régies par les lois des conflits armé. La GWOT fait partie de (et est une étape supplémentaire dans) ce processus : Les prisonniers à Guantanamo, par exemple, ont été privés des droits normaux des prisonniers de guerre, mais sans qu’il leur soit accordé les droits des criminels, y compris ceux d’un procès par jury[58].

La mondialisation : matrice explicative

En réponse aux lacunes idéologiques laissées par la fin de la guerre froide et en réaction à la croyance que la mondialisation était irréversible, de nombreux chercheurs ont avancé de nouvelles lectures paradigmatiques expliquant les nouvelles dynamiques de la conflictualité mondiale. Leur pensée traduit ce que Sadowski appelle la « théorie du chaos mondial », qui a attiré l’attention générale en Amérique dès 1993[59]. Pour ce courant, les nombreux aspects de la mondialisation produisent de puissantes forces de la fragmentation sociale, créent des vulnérabilités critiques et sèment les graines de la violence et des conflits. Ses effets sont inégaux et souvent contradictoires. La mondialisation économique n’implique pas nécessairement l’occidentalisation, mais le rejet des valeurs occidentales. Au-delà de ses effets économiques inégaux, elle a aussi suscité un contrecoup politique et culturel, souvent violent, contre l’extension de l’influence politique et culturelle occidentale –et le terrorisme n’est que l’une de ces manifestations. Dès le milieu des années 1990, cette vision d’un monde détourné par la mondialisation était en cours de diffusion parmi les éditoriaux, hommes politiques, stratèges militaires qui, implicitement ou explicitement, suggèrent que la source des conflits ethniques et religieux, du terrorisme, de la dislocation sociale, de la dissonance, du désordre, etc. est dans la réponse irrationnelle des gens (« retour de bâton ») à la mondialisation.

En raison de nombreux facteurs, la fragmentation, l’une des conséquences les plus importantes de la mondialisation, marquera le nouveau millénaire. La souveraineté de l’État-nation est en grande partie limitée par ce processus de sorte que beaucoup prédisent la crise de l’État et la désintégration des nations. Mondialisation et fragmentation sont devenues deux thèmes de la littérature scientifique et populaire qui traite de l’avenir des États et du monde dans son ensemble. Il en résulte la diffusion du pouvoir-autorité des Etats dans deux directions : les organisations internationales, les domaines locaux et tribus, et les individus. Les causes de cette désintégration sont doubles: 1) le processus de mondialisation a entraîné une réduction des capacités des Etats, la perte de leur légitimité, et l’émergence et renforcement des acteurs non-étatiques ; 2) la fin de la guerre froide a conduit à l’affirmation de l’identité et héritage culturel, la montée à la surface des intolérances ethniques et les religieuses et conduit à des conflits armés. L’idée générale est que la mondialisation fait plus que remodeler l’économie mondiale. Elle façonne aussi la politique internationale et les affaires de sécurité. Ce courant prétend que la mondialisation modifie profondément le système international, conduit au déclin du système westphalien de gouvernance basé sur l’Etat et la montée des acteurs non étatiques, et est en train de changer la façon dont les guerres sont menées dans le XXIe siècle.

En clair, ces théoriciens du « chaos mondial » décrivent la mondialisation comme un processus de fragmentation, érodant la souveraineté des États et fomentant la renaissance de nouvelles loyautés sociales, culturelles et religieuses. Ils ont prédit un monde divisé selon des lignes religieuses civilisationelles alors que le monde sombre dans une ère de violence ethnique et culturelle. Au minimum, la grande mobilité des personnes, marchandises, capitaux et idées signifie une mobilité accrue des acteurs non étatiques, des armes (y compris de destruction et perturbation massive), et du fondamentalisme radical de tous types, etc. Globalement, disent-ils, les différents aspects de la mondialisation se combinent pour augmenter les dangers d’une myriade de menaces transnationales (en particulier dans les Etats fragiles) allant de la prolifération des armes, aux cyber-attaques, en passant par les rivalités et violences ethniques, le nationalisme, l’antagonisme religieux, la criminalité, la criminalité et trafic de drogue, la dégradation de l’environnement, la propagation des pandémies, la concurrence sur les ressources, etc.[60]. L’Afrique de l’Ouest est considérée étant le symbole de ce paysage de sécurité dans lequel l’anarchie criminelle apparaît comme le véritable danger « stratégique ». Dépérissement des Etats, hausse du primordialisme, pandémies, surpopulation, migrations, criminalité, autonomisation des armées privées et entreprises de sécurité, cartels de la drogue, rareté des ressources, érosion des frontières nationales, etc. « sont profondément liées » (dégradation de l’environnement + explosion démographique + rareté des ressources = guerre)[61].

Une bonne partie de l’élite américaine post-guerre froide est dans l’état d’esprit des architectes du chaos dont un grand nombre inclut des personnalités influentes dans le débat public américain notamment Graham Fuller, Robin Wright, William Pfaff, Daniel Moynihan, Ralph Peters, Martin van Creveld, Thomas Friedman, Robert Kaplan, Benjamin Barber, Samuel Huntington. Dans une partie intitulée ‘Global Order and Disorder’ d’un ouvrage sur la mondialisation spéculent sur les futures distributions de puissance entre l’État et la société, ces trois derniers notent dans des articles distincts que les sources du conflit seront basées sur un ou plusieurs des éléments suivants: les divisions culturelles; re-tribalisation; désintégration mondiale versus homogénéisation; raréfaction, criminalité, conflits ethniques, surpopulation, la maladie. Ceux-ci donneront lieu à des conflits « entre des nations et des groupes de différentes civilisations », entre culture contre culture, tribu contre tribu, ou entre un réseau mondial commercialement homogène et l’anarchie mondiale et le régionalisme[62]. Bien que les libéraux comme Friedman ne partagent pas cette vision pessimiste, les partisans de ce paradigme voient la mondialisation comme la matrice explicative et une source de conflits[63] et convergent, tous, vers la thèse huntingtonienne.

Malgré les différences considérables entre les différentes visions et versions de ces théories, elles ont toutes été assimilées dans le discours politiques des officiels de Washington comme composite. La mondialisation est devenue une sorte de fourre-tout pour couvrir un vaste éventail de défis, menaces et phénomènes contradictoires parfois sans lien. Progressivement, ce qui fut appelé « la théorie du chaos a pénétré le discours de Washington non pas comme un système intégré d’analyse, comme une grande stratégie, mais comme un assemblage fragmentaire d’épigrammes. Les métaphores et les icones que les théoriciens du chaos ont inventés –comme le slogan ‘l’Occident contre le reste’ et les images des nations verrouillées sous l’emprise des fanatiques du djihad- ont gagné plus de crédibilité. En partie, cette réception fragmentée de la théorie du chaos mondial reflète la nature fractionnée du mouvement lui-même »[64]. Cela signifie que des éléments (ou des slogans à partir) de théories même incompatibles pourraient facilement être fondus ensemble. Par exemple, la vision avancée par Huntington que le monde post-guerre froide serait défini par « un choc des civilisations » était théoriquement distinct des diagnostiques des conflits découlant de la mondialisation, les commentateurs à Washington ont réussi à fusionner les deux images dans la notion de conflit primordial sur des valeurs (plutôt que sur des intérêts)[65].

Cette rhétorique et lecture ont continué après le 11/9 en considérant les attaques comme motivées par une rage irrationnelle et un « contrecoup à la mondialisation ». La réponse a eu lieu sans aucun effort pour comprendre « le pourquoi ». L’approche officielle évite la causalité en centrant le débat sur « pourquoi nous-haïssent-ils ? ». Pourtant, les sondages et les études montrent l’inverse, que la plupart des reproches des musulmans portent sur « ce que font les Etats-Unis » et non pas sur  « qui sommes-nous »[66]. Le conflit était « civilisationnel » dans le sens, où il serait entre la civilisation et la barbarie; peut-être pas si différents après tout de « l’Occident contre le Reste ». Le terrorisme est construit comme une menace omniprésente pour l’humanité entière et les terroristes comme des individus fanatiques (le « mal ») qui cherchent seulement à instaurer un régime barbare, mettant fin aux valeurs et réalisations de la civilisation. « Nous menons une guerre pour sauver la civilisation elle-même », prétendait l’ancien président Bush.[67] Comme une « nation civilisée », lui fait écho le procureur général John Ashcroft, « nous allons défendre la civilisation […] contre les barbares »[68]. Chacun doit choisir son camp « soit vous êtes avec nous, soit contre nous ». L’expression « choc des civilisations » détourne l’attention du rôle de la politique et des conflits d’intérêt dans l’équation. John Lynn, par exemple, note que les opérations des groupes islamistes « se sont transformées en problèmes religieux, qui dépassent les questions froidement rationnelles. Pour les terroristes engagés, le conflit a une dimension religieuse-culturelle, même s’il ne s’agit pas d’un choc des civilisations au sens de Huntington »[69]. L’administration américaine a désigné un « axe de mal » expansible et construit l’ennemi comme une bande de malfaiteurs barbares qui ont attaqué la civilisation américaine par haine des valeurs chères à l’Occident.

Tout au long de la décennie 1990, des voies s’élèvent pour noter qu’« au cours des dernières années, la communauté américaine de politique étrangère a découvert que le monde est truffé de conflits ethniques, nationalistes et séparatistes (guerres ‘ENS’, dans le langage du Pentagone) »[70]. Huntington ainsi que d’autres prévoient une épidémie de guerres civils et la hausse des conflits ethniques et identitaires. La culture au sens large est devenue la lentille à travers laquelle à la fois le monde et les conflits (en passant par la Somalie, Haïti, Bosnie, Kossovo, etc.) sont appréhendés[71]. Même Friedman n’y échappe pas. “Lexus and the olive tree” était une métaphore décrivant la tension entre l’intégration économique et l’identité nationale[72]. Robert Kaplan subordonne la violence ethnique et culturelle islamique à sa thèse de l’anarchie à venir. Pour lui, l’activisme dans l’islam est subordonné à l’identité culturelle plus large. En plus des préoccupations avec le terrorisme (B. Barber) et l’hostilité interculturelle (Huntington), la fin de la guerre froide a donné lieu à des préoccupations occidentales sur la prolifération des armes, la croissance démographique, la migration et d’autres questions géopolitiques. Mais d’une façon ou d’une autre, la culture est impliquée et les conflits d’intérêts ont complétement été effacés du discours émergent. « Les problèmes culturels ont pris une importance telle que la pensée sociale doit s’organiser autour d’eux ».[73] Ce discours a trouvé un terrain fertile en Europe où il s’est rapidement propagé et vulgarisé. Aucune étude sociologique sérieuse sur la radicalisation de citoyen européen. Les causes souvent avancées sont la culture (d’origine…), connexion avec le Moyen-Orient, internet, etc. 

Reconfiguration de l’Etat : Déclin de l’Etat-providence 

Dans le second volume de sa trilogie consacrée à L’ère de l’information, Castells examine la menace posée à l’Etat-nation par la montée de les identités de résistance collectives, qui peuvent, au fil du temps, se développer en « identité-projet » avec à l’esprit des objectifs spécifiques socialement transformateurs. Son champ d’application est vaste, englobant tout sous l’étiquète d’« anti-mondialisation » ; le mouvement zapatiste au Mexique, Al-Qaïda au Moyen-Orient, la montée des milices aux États-Unis, les vastes projets anti-patriarcaux lancés par les féministes, et les militants écologistes, etc. Son analyse ne fait pas référence à la présence continue de la religion comme une caractéristique fondamentale des sociétés dans le XXIe siècle, mais pour son rôle décisif dans l’entretien de la construction des identités de résistance contre la domination des valeurs de marché dans le processus de la mondialisation. Les grands segments de la population mondiale -qui sont économiquement, culturellement et politiquement privés de leurs droits- ne se reconnaissent pas dans les valeurs triomphantes des cosmopolites conquérants, et donc ils se tournent vers la religion comme une source de sens et de sentiment communautaire en opposition au nouvel ordre. Un nouvel ordre qui non seulement ne parvient pas à bénéficier à la plupart des pauvres de la planète, mais les prive aussi de leurs propres valeurs, comme ils sont invités à chanter la gloire de notre condition technologique mondialisé sans la possibilité de relier les nouvelles paroles -les leurs[74]. Le terrorisme en ce sens est considéré comme un « contrecoup » à la mondialisation.

Ces guerres émergent dans le contexte de la libéralisation économique effrénée qui sape les Etats déjà affaiblis, entraînant la « désintégration de l’ordre public » et leur effondrement[75]. Lorsque l’Etat se désengage, la société s’y déconnecte et les gens cherchent refuge dans d’autres structures alternatives, qu’elles soient tribales, culturelles, etc. La quête de sens personnel et l’ordre dans les cadres traditionnels s’étaient se répand. Ceci s’est manifesté sous deux formes interdépendantes. Le fondamentalisme religieux ; et le « primalism » où la politique est définie par les identités infranationales comme l’ethnicité ou du tribalisme. Historiquement, le monopole de la contrainte organisée a été l’un des facteurs qui ont contribué à la consolidation et la hausse du pouvoir de l’État-nation. Les gouvernements centraux se fortifiaient en Angleterre, en France et ailleurs parce qu’ils étaient en mesure de vaincre militairement les challengers internes et externes. L’Etat a alors atteint la légitimité car il pourrait protéger les populations la plupart du temps[76]. Donc, avec le retrait l’Etat, le tissu social se desserre et les populations agissent rationnellement en recherchant des solutions et s’organisant en conformité avec les allégeances concurrentes à l’Etat ; elles cherchent des canaux alternatifs de soutien et d’ordres symboliques. La société fait ainsi de plus en plus appel à des outils informels de relations sociales (famille, clan, tribu, religion, etc.) qui se répandent alors que les institutions officielles perdent tout sens d’ordre symbolique ou politique. C’est sur ​​les ruines de ces États faillis que les « nouvelles guerres » apparaissent.

L’incapacité de concurrencer au niveau mondial affaiblit l’économie de l’Etat et, par là même, sa capacité à tirer les ressources nécessaires, ouvrant ainsi la porte à la corruption systématique, la criminalité et par conséquent à la privatisation générale de la violence. « Les États faibles pourraient aussi dériver vers la coopération avec les terroristes »[77]. Au Sahel, les groupes terroristes « trouvent même, dans les États les plus faibles, des complicités jusque dans l’armée ou dans la police », assure un officier de liaison. « Dans cette partie du globe, la drogue finance l’islamisme radical », déclarait le directeur général de la police nationale, Frédéric Péchenard, lors d’une réunion des unités de coordination antiterroriste européennes[78].  Dans des situations chaotiques, de larges segments de la société peuvent déplacer leurs loyautés de l’Etat à un acteur non étatique capable (comme Daech) de fournir la sécurité, des vaccins et des soins de base. Le résultat est l’émergence d’une triade de « la mondialisation du crime organisé, la montée de l’Etat courtisan et la corruption de la société civile ». Un Etat embourbé par la guerre civile est compromis car il risque de devenir un « État défaillant » dont son rôle est d’être un « Etat courtisan » -servir « les intérêts incorporés dans la mondialisation néolibérale »[79]. La faillite de l’Etat crée donc un nouvel environnement où gangs, terroristes, seigneurs de guerre contrôlent les restes des structures étatiques, et en s’appuyant sur la criminalité, ils réalisent des politiques identitaires pour répandre la terreur contre ceux considérés comme une menace à leur groupe ethnique ou religieux. En effet, la perte de ressources a un impact négatif significatif sur l’économie d’un État, et augmente la probabilité de troubles internes -y compris des guerres civiles dans certains cas.

Plus inquiétant est l’habileté croissante des organisations criminelles et terroristes à exploiter la diffusion mondiale des réseaux sophistiquées d’information et financiers. Ainsi, les organisations et les réseaux basés en Amérique du Nord, Europe, Amérique, au Moyen-Orient, Asie, etc. élargissent l’échelle et la portée de leurs activités. Ils formeront des alliances lâches les uns avec les autres, avec de petits criminels, et avec des insurgés pour des opérations spécifiques. Ils vont corrompre des dirigeants d’Etats instables économiquement fragiles ou faillis, s’insinuer dans les banques et les entreprises en difficulté, et coopérer avec les mouvements politiques insurgés pour contrôler les zones géographiques importantes[80]. Ce qui explique pourquoi les gangs sont en plein essor dans les villes à travers le monde, et ils ne vont pas disparaître de sitôt, prévient Hagedorn. L’équation est simple: l’urbanisation + pauvreté = gangs. L’urbanisation massive, l’immigration et les Etats affaiblis sont l’une des causes de la croissance sans précédent des gangs. Selon lui, « de vastes zones dans les mégapoles sont devenues, de l’aveu de tous, ingérables, et les groupes armés interviennent pour gérer les espaces ingérables ». Ainsi les « gangs institutionnalisés et d’autres jeunes hommes armés [qui] sont devenus des éléments permanents dans de nombreux ghettos, quartiers, et favelas à travers le monde sont toujours une option présente pour les jeunes marginalisés. Les gangs sont des signes évidents que tout n’est pas bien et que des millions de personnes sont exclues des merveilles d’une économie mondialisée »[81].

En Afrique par exemple, l’impact de la criminalité est profond car elle dépouille les institutions de l’Etat, menace la sécurité humaine, et accroît les difficultés pour les voyageurs et les opérateurs économiques. Plus indiquant est le flirt entre criminalité et terrorisme. Le terrorisme est une stratégie utilisée dans la poursuite d’objectifs politique, ethniques, révolutionnaires ou religieux. La criminalité organisée, en revanche, cherche un gain matériel par la contrebande d’armes, de drogues, de biens de consommation, le trafic d’être humains, les transferts de fonds illégaux, etc. Il est difficile d’imaginer comment ces deux types de maux mondiaux font cause commune et dans quelles conditions les terroristes à motivation politique coopèrent avec les cartels et réseaux de criminels, et vice versa. Dans la conduite de leurs activités illégales, les motivations et le comportement sont différents, mais ils partagent de nombreuses caractéristiques communes. Ils emploient souvent les mêmes itinéraires : blanchir leur argent en utilisant les mêmes schémas, et mener des activités multiples et parallèles. Egalement, « les crises et les catastrophes humanitaires, le nettoyage ethnique, les guerres et les insurrections sont également devenues des occasions pour le crime organisé » et le terrorisme. « Les personnes désespérées qui fuient leurs Etats sont une cible facile »[82].

Certaines faiblesses structurelles de la région du Sahel (parmi les plus pauvres et instable au monde avec des populations vulnérables, Etats fragiles et frontières poreuses) font que toute organisation criminelle ou terroriste puisse imposer sa loi par la terreur plus facilement. Le trafique de diamant a été l’une des sources de financement d’Al-Qaïda. La connexion avec les réseaux ouest-africains a été cimentée en septembre 1998[83]. L’Afrique a toujours tenu un rôle périphérique dans le commerce des drogues, mais progressivement est devenue un lieu de trafic important y compris de cocaïne. Des estimations récentes suggèrent que, chaque année entre 46 et 300 tonnes métriques de cocaïne sud-américaine transitent en Afrique de l’Ouest vers l’Europe. Les derniers niveaux saisis de cocaïne sont nettement plus élevés que ceux de la fin des années 1990 et début des années 2000, qui, dans toute l’Afrique a rarement dépassé 1 tonne par an[84]. Ce n’est pas anodin que cette hausse intervient au moment où le continent connait une augmentation des groupes et activités terroristes. De manière générale, tout futur environnement opérationnel devra tenir compte de la présence d’éléments criminels. Avec la hausse dans le nombre et la présence d’organisations criminelles, il y aura aussi un brouillage croissant des activités criminelles, des conflits civils, et des activités terroristes. Ces éléments se mélangent avec la population et deviennent de plus en plus difficile à pénétrer.

Nous assistons à une mutation dans les modes opératoires des organisations terroristes. Le recours massif aux enlèvements, devenus la principale source de financement, est l’un des aspects du phénomène de « gangsterisation » du terrorisme et radicalisation des gangsters. Selon Lyes Boukra, ancien directeur du Centre africain d’étude et de recherche sur le terrorisme, « la prise d’otages comme mode opératoire de financement est très rentable du point de vue financier. Il n’offre que des avantages et aucun risque majeur ». La narcotisation de certaines zones -Sahel, l’Afghanistan, etc.- prend de l’ampleur. Cela nous amène à parler du deuxième élément fondamental de mutation du terrorisme islamiste qui est sa connexion, de plus en plus grande, avec les narcotrafiquants. Une AQMI s’est montré disposé à collaborer avec les trafiquants de drogue, les contrebandiers et autres éléments criminels. Le groupe opère au Sahel où il s’engage dans la une sorte de « police islamique » des routes commerciales traditionnelles, exerçant chantage et exigeant de l’argent, matériel et armes contre protection des passeurs. En effet, il y a des faits avérés sur le fait que les islamistes sous-traitent pour les narcotrafiquants. Ils assurent la sécurité et la logistique des convois de cocaïne latino-américaine. Une prestation de service qui risque d’évoluer vers le pire au cas où un groupe terroriste (Al-Qaïda, Daech, ou d’autres) arrive à avoir le contrôle ou la direction du processus du trafic de drogue. « Des indices laissent croire que cette évolution est en train de se concrétiser sur le terrain pour faire apparaître sur la scène des narcoterroristes islamistes »[85].

« Culturalisation » de la politique et la politisation de la culture

« Pour chaque mille pages sur les causes de la guerre », constate l’historien Geoffrey Blainey dans The Causes of War, « il y a moins d’une page évoquant directement les causes de la paix ». Peut-être exagère-t-il, mais il ne fait aucun doute que les chercheurs ont généralement été plus intéressés par l’explication des origines de la guerre que des déterminants de la paix. Cela est particulièrement vrai en ce qui concerne le déclin remarquable des guerres à l’ère post-guerre froide. Tout comme la guerre est graduelle, il en va aussi de la paix, qui peut aller d’un cessez-le-feu fragile à des accords formels de paix, au désarmement et à la démocratie[86]. La réalité est plus complexe que ce que révèlent les discours dominants. Toutefois, ce n’est pas le lieu ici d’aborder tous les aspects liés aux concepts, discours, récits et pratiques associés à la mondialisation, aux « nouveau terrorisme » et aux « nouvelles guerres ». La littérature sur ces questions contient des éléments à fois objectifs et subjectifs[87]. Cette partie tente toutefois de mettre la lumière sur quelques fausses idées seulement.

Le monde n’est pas devenu plus chaotique ou plus violent. A biens d’égards, le monde est plus paisible aujourd’hui (même en tenant compte des tensions récentes entre Washington, Moscou-Pékin) qu’à n’importe quel autre moment durant le siècle dernier. Les périodes précédentes étaient « une des époques les plus destructrices et les plus terrifiantes de l’histoire humaine »[88]. Les données actuelles ne font que conforter les prédictions du début des années 1990[89] qui a été la décennie la moins violente depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Au début du XXIe siècle, la probabilité d’un pays en proie à un conflit armé est inférieure à tout moment depuis le début des années 1950. Le « conflit au XXIe siècle est devenu beaucoup moins meurtrier que l’était il y a encore un demi-siècle […] Aujourd’hui, en moyenne, 90 % des personnes de moins sont tuées chaque année dans des conflits que la moyenne à l’apogée d’un conflit dans les années 1950 »[90]. Au cours des 30 dernières années, trois des changements remarquables dans la politique internationale ont eu un impact majeur et positif sur la sécurité mondiale. 

  • D’abord par le début des années 1980, les guerres de libération nationale de la décolonisation, qui représentaient entre 60 % et 100 % des guerres internationales, avaient pratiquement cessé. Ce changement est aussi profond qu’il est rarement reconnu. Entre 1816 et 2002, on comptait environ 81 guerres de conquête coloniale et luttes subséquentes pour l’indépendance. Avec la disparition du colonialisme, les principaux moteurs des conflits internationaux avaient tout simplement disparu[91].
  • La fin de la guerre froide, une autre cause majeure de conflits armés dans le système international. La fin de la confrontation bipolaire a non seulement éliminé la seule menace réelle de guerre entre les grandes puissances, mais signifié aussi que Washington et Moscou ont cessé de soutenir les guerres par procuration dans le monde en voie de développement. Environ un tiers de toutes les guerres dans l’après-Seconde Guerre, trouvait ses origines dans la géopolitique de la Guerre froide[92]. Sans doute, ces évolutions sont favorables à une plus grande stabilité dans le Tiers Monde. Elles sont compatibles avec de nombreuses études récentes sur l’évolution des conflits internationaux qui nient l’existence d’un effet de décompression pour le système international dans son ensemble. En effet, « dans le monde en développement, la fin de la guerre froide a joué un rôle crucial dans la baisse des conflits armés »[93].
  • La hausse sans précédent des activités internationales visant la prévention et résolution des conflits. L’ONU, en particulier, s’est engagée dans une multiplication par six de la diplomatie préventive, une multiplication par quatre des missions de pacification, une multiplication par quatre des opérations de paix, et une augmentation de onze fois les sanctions. En effet, l’ONU « a activé seulement 13 opérations de maintien la paix dans les 40 années entre 1948 et 1988.Au cours des 10 années suivantes, l’organisme international a activé ou approuvé 36 autres »[94]. Plus important, le coût annuel pour la communauté internationale pour soutenir les efforts de l’ONU coûte à peine 1% des dépenses militaires mondiales. « Le coût de fonctionnement de l’ensemble des 17 opérations de paix de l’ONU dans le monde entier pendant une année entière est inférieur à ce que dépensent les États-Unis en Irak en un seul mois »[95].

La guerre n’a pas radicalement changé avec la mondialisation. « Irak et Afghanistan nous rappellent que la guerre n’est pas assujettie à la réinvention » quoi que disent les partisans de la RAM ou du « choc et effroi ». La nature essentielle de la guerre est fixe, permanente et irrépressible. Les guerres d’aujourd’hui peuvent sembler nouvelles alors qu’elles n’ont tout simplement pas été traitées correctement[96]. Il existe au moins trois concepts à l’œuvre dans toute discussion sur la « guerre » ; le « caractère de bataille » ; la « forme de la guerre » ; et, « plus fondamental », la « nature du conflit. C’est le plus haut niveau stratégique de l’analyse et traite les causes et le caractère des graves différents politico-militaro-socio-économiques dans le système international ». La plupart des analyses ne distinguent pas adéquatement ces trois niveaux. La plupart traite la forme de guerre, avec les implications sur le caractère de la bataille. Mais c’est un non-sens de s’attaquer à ces questions, sans comprendre le contexte stratégique plus large qui ouvre la voie à la guerre et la bataille. En d’autres termes, « la guerre est un produit de la politique internationale, et la forme de la guerre, qu’elle prend, est étroitement liée à ses causes ». A cet titre, deux faits importants a souligner dans toutes discussions sur l’avenir de la guerre : « d’abord, la forme que prend la guerre dérive de, et ne peut pas être envisagée sans référence à, ses causes et ; deuxièmement, les théories en vogue sur l’avenir de la guerre sont pour la plupart silencieuses sur ces causes »[97]. Les causes de la guerre sont multiples. La mondialisation comme une matrice explicative est trop simple. Elle obscurcit au lieu de clarifier les causes[98]. Aucune étude prospective de Daech et l’expansion du terrorisme dans le monde n’est utile sans noter potentiel déstabilisant de la politique américaine y compris l’intervention en Irak. Une stratégie antiterroriste efficace implique un réexamen profond de la politique des Etats-Unis, et certains de leurs alliés européens et arabes.

Les guerres d’aujourd’hui peuvent sembler « nouvelles » alors qu’elles n’ont tout simplement pas été traitées correctement. « Les guerres actuelles présentent plus de similarités que de différences avec les guerres classiques des XIXe et XXe siècles ». Les effets géopolitiques et politiques de la fin de la guerre froide ont coïncidé avec des changements sociaux et technologiques qui ont également contribué à la transformation de l’environnement dans lequel la puissance militaire est exercée. Les innovations technologiques particulièrement aux Etats-Unis sont annoncé la perspective de la RAM. La guerre du Golfe de 1991 a révélé les potentialités des nouvelles armes de haute technologie et de précision. Au lieu de nouvelles formes de violence, on rencontre des processus qui se sont intensifiées depuis la naissance de l’ère moderne: bureaucratisation cumulative de coercition et idéologisation centrifuge. La RMA combinée à des changements sociaux importants dans un seul et même temps a eu un impact sur la manifestation de la violence. Cela ne signifie pas que rien n’a changé dans la relation entre la guerre et la société. Ce qui a changé de manière significative est le niveau de dépendance sociale de (et recours à) la technologie et, surtout, le contexte social, géopolitique et idéologique dans lequel les guerres récentes ont été menées. Les nouvelles technologies ont transformé les moyens de combat, mais pas les fins ou les causes de la guerre[99].

Ce discours est contredit empiriquement. L’histoire militaire regorge d’exemples de conflits asymétriques. La guerre irrégulière est plus fréquente historiquement que ce que révèle le discours répondu de la guerre. La plupart des guerres sont, et ont toujours été, irrégulières. Au cours des 200 dernières années, seulement environ 20 % des guerres étaient des conflits conventionnels –les 80% ont impliqué des insurgés, des milices, des pirates, des bandits, ou des guérilleros. Statistiquement parlant, « les 464 guerres [qui] se sont produites entre 1916 et la fin du XXe siècle montrent que seulement 79 (17 %) étaient des conflits interétatiques ‘conventionnels’ entre les forces armées régulières des États-nations, tandis que 385 (83 %) étaient des guerres civiles ou des insurrections ». Les affrontements violents comprennent souvent des forces ou des factions irrégulières qui existent en dehors de l’autorité des Etats établis, comme le montre entre autres War In The Shadows: The Guerrilla In History de Robert Asprey –un document sur deux mille ans de conflit entre les forces régulières et irrégulières. En 1965, le Bernard Fall, a décrit le XXe siècle comme « le siècle des petites guerres ». Dans un sens, « les conflits comme la Seconde Guerre mondiale représentent à la fois une aberration et un raffinement de la tradition réelle de la guerre. La forme traditionnelle de la guerre est en fait plus irrégulière » que régulière[100]. Egalement, l’idée que les guerres civiles modernes sont plus brutales et insensées que jamais a vivement été contestée.

La distinction des guerres entre « nouvelles » et « anciennes » est déficitaire. Ce paradigme échoue dans ses explications des causes et objectifs des conflits violents récents. Les différences sont nettement exagérées. La littérature sur le sujet est biaisée, dénouée de critiques de ces étiquettes quand elle ne puise dans l’« orientalisme ».[101]La nature de la relation entre représentations géographiques, identité nationale et politique mondiale peut être saisie à partir du travail d’Edward Said[102]. Les études bien argumentées et saturées d’exemples historiques de Kalyvas révèlent que toutes les caractéristiques associées aux nouvelles sont aussi propres des anciennes guerres[103]. Les informations sur les « nouvelles guerres » sont déficientes alors qu’il y ait peu d’études historiques profondes récentes sur les « vieilles guerres ». Le changement a davantage eu lieu dans la façon d’appréhender la guerre que dans la nature profonde de la guerre y compris civile en tant que telle. Ce qui a changé est l’effrontément de guerre comme une institution sociale. La « tolérance publique de la violence de l’Etat », écrit Keegan, « a diminué à un point où il est difficile de voir comment les gouvernements occidentaux pourraient gagner l’approbation de faire la guerre, sauf contre un État voyou comme Irak »[104]. L’accent mis sur les valeurs et facteurs identitaires (là où un conflit d’intérêt pourrait exister) rendent la guerre inévitable et, par là même, participe à un processus de mobilisation de l’opinion publique. Il y a des préoccupations de sécurité légitime, mais la lutte contre le terrorisme n’a pas commencé avec le 11/9. L’Algérie (entre autres) y faisait face depuis une décennie plutôt.  

Une grande partie des analyses des « nouvelles guerres » tombe dans l’« orientalisme ». Selon cette ligne de pensée, si « les Occidentaux ont abandonné la religion en faveur de raisons plus éclairés pour l’abattage d’un autre », ce n’est pas le cas partout ailleurs. Dans le monde musulman, c’est un devoir de « se battre et mourir pour la plus grande gloire de Dieu »[105]. L’idée d’une « Eastern way of war » est extrêmement problématique. De fausses idées découlent des efforts des stratèges et universitaires occidentaux de définir l’ « Orient » en termes d’un ensemble orientalisé et exotisé de stéréotypes qui existent principalement pour poser l’ « Occident » comme une culture supérieure dominante. Quatre exemples ont été étudiés par Porter : le Japon, Gengis Khan, Talibans et Hizbollah-Israël en 2006. Selon lui, la guerre en Afghanistan en 2001 a exposé la compréhension limitée que l’Occident a eue sur de cette région de l’ « Orient ». Pour la plupart des Américains, les Afghans n’étaient que des membres de tribus violentes, incapables de progrès ou de sophistication. Les médias occidentaux ont renforcé et contribué à façonner ce point de vue, les représentants comme des hommes de montagne avec des armes primitives. Motivés par la vengeance et la soif de sang, ces terroristes veulent rien de plus que la destruction de l’American way of life[106].

Dans le cas des Talibans, « le comportement en temps de guerre des Afghans suggère que leurs croyances et tabous enracinés dans la culture ne sont pas d’une importance décisive […] Alors que leurs codes tribaux et idées religieuses peuvent avoir une grande autorité, sous la pression de la guerre les talibans ont constamment choisi parmi et entre les tabous, la survie, la loyauté et le succès ». En d’autres termes, « ils se sont révélés être pragmatiques et innovants. Lorsqu’ils sont forcés de choisir entre un compromis efficace et une dogme de ligne dure, les chefs talibans choisissent le premier ». La perspective à partir de laquelle l’Occident considère ses ennemis orientaux est une raison principale pour laquelle les conflits sont souvent inévitables et ont des implications directes sur la façon dont les Etats-Unis exécutent la politique étrangère. « La guerre en Afghanistan en octobre-novembre 2001 a dispersé les talibans avec peu de victimes américaines. Cela a créé un climat d’intoxication, enhardi Bush sur l’invasion de l’Irak. Dans la vision triomphale de Bush, la victoire finale est assurée parce que l’Amérique était sur ​​le bon côté de Dieu et de l’histoire »[107]. Parmi les facteurs de l’échec de la politique américaine figurent quatre phénomènes interdépendants ; « culturalisation » croissante de la politique ; « politisation » croissante de la culture ; militarisation croissante de la politique ; et « arsenalisation » croissante de la culture dont l’Human Terrain System (HTS) est l’une des manifestations concrètes. 

Le concept « culture », qui « varie de tentatives pour isoler les traits culturels et leur impact sur la stratégie, à des conceptualisations plus larges où la culture est presque omniprésente », est utilisé de manière abusé par les stratèges militaires occidentaux. Le FM 3-24 (le manuel de contre-insurrection de 2006) mentionne le mot « culture » quatre-vingt-huit fois et « culturel » quatre-vingt dix fois en 282 pages. Les cultures de guerre contiennent des récits rivaux s’affrontant, « un répertoire ambigu d’idées concurrentes qui peuvent être sélectionnées, instrumentalisée, manipulées […] L’orientalisme n’est ni uniforme ni nécessairement cohérent, mais tire sa force de son ambivalence, sa capacité à soutenir des idées et des images contradictoires »[108]. L’ouvrage « Guerre, technologie, anthropologie » de Stroeken « ne renvoie pas seulement à la technologie de la guerre comme un objet de recherche anthropologique, mais reconnaît aussi que l’anthropologie elle-même peut être une technologie de guerre »[109]. L’utilisation d’anthropologues en tant que composante de l’HTS est un exemple de cette « arsenalisation » conceptuelle -et peut-être littérale- de la culture.

Lors du 4e Sommet de TRADOC (U.S. Army Training and Doctrine Command) en avril 2010, le général David Hogg a appelé l’armée à penser « la culture comme un système d’armes ». Les formations culturelles et linguistiques sont passées de la compétence de quelques spécialistes à un outil central dans l’arsenal des différents services.[110] La « participation des anthropologues à des entreprises militaires légitimise l’invasion » de l’Irak et d’autres guerres ailleurs[111]. Car il y a toujours le problème concernant la manière dont la connaissance des sciences sociales est appropriée par une organisation militaire. Celle-ci a des préoccupations différentes et la traduction de ces connaissances se fait dans ses propres logiciels. A la question, pourquoi font-ils de telles choses étranges ? Etant la technicité de la culture militaire, la réponse est simple : leur « culture » ou « religion » leur impose de faire ça, par exemple. Les structures sociales et expériences historiques, etc. n’ont pas leur place dans l’analyse. La compréhension que les militaires se font des autres est superficielle ; une image composite de traits et stéréotypes divers et parfois contradictoires, choisis parmi les différentes cultures et isolés à partir des traditions, valeurs et vie de ces cultures. Placer trop l’accent sur les facteurs identitaires « peut fausser la réalité sociale plus grande »[112]. De manière générale, les « études multidisciplinaires de la stigmatisation ont révélé ses trois aspects les plus importants: peur, stéréotypes et contrôle social, qui sont sa principale composante affective, cognitive et comportementale. Ces études indiquent également que, à côté de l’effet restrictif habituellement invoqué des différences indésirables qu’elle a sur les réalisations et les opportunités sociales, l’imposition d’un contrôle social est décisive dans la stigmatisation »[113].

Dans leur théorie globale de la guerre, Levy et Thompson ne font pas apparaitre la centralité de la culture dans leur théorie co-évolutive de la guerre en identifiant six « ingrédients » clés (technologie, organisation militaire et politique, économie politique, environnement de la menace, et la guerre) qui interagissent de manière complexe ; un changement significatif dans un domaine conduit à des changements importants dans les autres, et conduisant à des accélérations périodiques révolutionnaires dans la guerre. Trois accélérations ont été distinguées ; 1) l’Age du Bronze en Mésopotamie ; 2) l’Age de fer en Chine et la Méditerranée orientale ; et 3) l’industrialisation de l’Europe. Chacune de ces accélérations était associée à des transformations massives et des intensités accrues de la guerre qui, à leur tour, ont déterminé les interactions mondiales et la nature de la guerre dans chacune des phases successives. Parce que la majeure partie du monde non occidental n’a pas connu la troisième accélération, l’arc de guerre fonctionne différemment dans les pays du Sud, où les Etats « ont tendance à être plus faible et nettement vulnérables à la guerre interne, et combattent de moins en moins des guerres entre Etats ». Si les trois trajectoires diffèrent l’une de l’autre, chacune d’elle est marquée par une puissance politico-militaire qui devient le leader régional prédominant dans les phases successives de la centralisation, compétition et décentralisation, avec chaque puissance successive intégrant les enseignements technologiques et organisationnels tirés du leader régional de façon évolutive. « Des armées (et des marines) paradigmatiques qui développent les innovations qui alimentent ce que nous appelons changement co-évolutionnaire », est commun aussi à chaque trajectoire[114].

Conclusion

Le 11/9 a été un moment clef dans le développement de la stratégie américaine au sens où le terrorisme est explicitement désigné comme la préoccupation stratégique centrale alors que la « guerre mondiale contre le terrorisme » (GWOT) est hissée en « principe organisateur » des relations mondiales, un « principe organisateur » de nature à produire discursivement des ordres hégémoniques[115]. Ainsi, un métarécit cohérent s’est rapidement imposé, permettant à la fois de guider et légitimer les programmes et stratégies véhiculés sous la GWOT. En termes de cette guerre, les Etats-Unis ont opéré un processus de « macrosécurisation ». Le discours de la GWOT semble avoir atteint une hégémonie mondiale dans le sens où il a gagné une large acceptation à travers le monde, et a largement été contextualisé et institutionnalisé.[116] L’opérationnalisation et la mise en œuvre du discours de la GWOT comprennent une dimension militaire et d’autres formes d’action contre le terrorisme comme un véritable « objet » et un phénomène unique, en dépit de son caractère disparate[117].

Pourtant, l’adoption de politiques au niveau mondial contre ce fléau nécessite un consensus politique et social étroit, impossible à obtenir sans un préalable accord sur la signification du terrorisme, qui reste l’un des termes les plus contestés dans les sciences sociales. Dans The Terrorist Trap (1994), Jeffrey D. Simon affirmait qu’il y a au moins 212 définitions différentes du terrorisme utilisées dans le monde, 90 d’entre elles sont utilisées par les gouvernements et d’autres organisations[118]. La nécessité d’une définition cohérente et consensuelle du terrorisme est une base essentielle pour une meilleure compréhension. Répondre à certaines questions fondamentales est nécessaire avant que les gouvernements construisent et développent des programmes, plans et stratégies pour faire face à la menace. Sans une telle évaluation et consensus, il serait très difficile de façonner correctement les programmes et concentrer les ressources. Désigner les concepts clairement et précisément reste une condition préalable absolue à une politique efficace[119].

Au lieu de cela (et afin de soutenir des politiques porteuses d’intérêts nationaux principalement américains) les Etats-Unis ont agit de diverses manières (hard et soft) pour mondialiser le discours et, nécessairement, les pratiques de la GWOT. En outre, pour que la coopération internationale dans ce domaine puisse fonctionner et réussir, les pratiques de la guerre ne doivent pas seulement être acceptées, régularisées et institutionnalisées, mais aussi apparaitre comme la seule option pour la paix mondiale. Mais la GWOT a été déstabilisatrice. Beaucoup de gens ne pensent pas du terrorisme comme un problème militaire, ni n’en parlent en termes de « guerre mondiale contre le terrorisme » sauf peut-être comme une métaphore. La réponse américaine et de l’Europe a militarisé le conflit, tant en termes de la rhétorique de la « guerre », et en termes d’opérations militaires réelles. Soutenue par un discours idéologique et « construite comme une rhétorique politique dominante, la ‘guerre contre le terrorisme’ définit une menace existentielle qui, en raison de son ampleur, nécessite l’adoption de mesures de sécurité exceptionnelles ».[120]Les discours que Washington et ses alliés les plus proches ont avancés (affirmant la nécessité de mondialiser la sécurité) ont pris une intensité et une portée sans précédent. Ils le justifient en propageant l’idée d’une (in) sécurité mondiale, attribuée au développement des menaces de destruction et perturbation de masse provenant des organisations terroristes et criminelles ou autres, et les gouvernements qui les soutiennent. Cette mondialisation est censée rendre les frontières nationales obsolètes, et obliger les autres acteurs sur la scène internationale à collaborer[121].

Egalement, les autorités qui prétendent être en charge de déterminer les paramètres des politiques anti-terroristes doivent se présenter comme disposant des connaissances faisant autorité sur la nature du terrorisme. Mais la vision des Américains est « euro-centrique ». Leur connaissance du terrorisme et des cultures étrangères est superficielle et stéréotypée. L’islam et terrorisme ne sont pas synonymes. Porter le voile et porter une ceinture explosive sont deux choses entièrement différentes. Peu importe car « l’effort scientifique et politique d’amalgamer différents groupes de résistance dans un ‘ennemi terroriste’ homogène », écrivent Strindberg et Warn, « fait partie intégrante de la politique de la puissance néocoloniale laquelle toutes les luttes ‘indigènes’ contre les structures de pouvoir établies sont placés au-delà de la raison et du dialogue »[122]. Cela pour dire que le terrorisme est une préoccupation réelle, mais les objectifs des Etats-Unis sont multiples et parfois nuisent  à la lutte antiterroriste. Les représentations ont un énorme pouvoir dans la construction de la réalité sociale, surtout si elles sont associées à des conquêtes politiques et impériales. La représentation de « l’Autre » négativement implique généralement des relations de pouvoir inégales. Les paramètres, la géo-culture et l’arrière-pensée/fond du débat sur la mondialisation, « nouvelle guerre » et « nouveau terrorisme » (entre autres) ne peuvent pas être saisies sans la prise compte des relations historiques et théoriques entre la domination économique et politique de l’Occident et de la production intellectuelle de l’Ouest. 

Au final, une telle approche fait naître un cadre relationnel complexe. Dans la pratique, conclut James Carrier, nous sommes confrontés à un modèle asymétrique qui « privilège l’Occident comme la norme par rapport à lequel tous les autres sont définis » en raison de son pouvoir historique, politique et économique. Les Occidentaux possèdent une autonomie relative à construire des images de sociétés étrangères comme ils l’entendent en raison du déséquilibre politique existant : « les anthropologues occidentaux, décrivant les sociétés qu’ils ont étudiées attentivement et sympathiquement, sont susceptibles de faire face seulement à leur propre honneur comme un examen de la représentation qu’ils produisent. Même si ceux qui sont décrits viennent de lire et rejeter la représentation, leur rejet est peu susceptible d’être exprimé dans les contextes académiques et sociaux qui comptent le plus pour les anthropologues ». Ce qui « n’est guère rassurant ». Plus important, les « études multidisciplinaires de la stigmatisation ont révélé ses trois aspects les plus importants: peur, stéréotypes et contrôle social, qui sont sa principale composante affective, cognitive et comportementale. Ces études indiquent également que, à côté de l’effet restrictif habituellement invoqué des différences indésirables qu’elle a sur les réalisations et les opportunités sociales, l’imposition d’un contrôle social est décisive dans la stigmatisation »[123].

[1] Joseph R. Cerami & Lisa M. Moorman, Leadership and National Security Reform: The Next President’s Agenda, Strategic Studies Institute, octobre 2008, p. 3

[2] Robert H. Dorff, « Democratization and Failed States: The Challenge of Ungovernability », Parameters, été 1996, pp. 17-31; Jean Germain Gros, « Towards a taxonomy of failed states in the New World Order: decaying Somalia, Liberia, Rwanda and Haiti », Third World Quarterly, vol. 17, n°. 3, 1996, p. 455-471 (461); Gerald B. Helman & Steven R. Ratner, « Saving failed states », Foreign Policy, vol. 89, 1992-1993, pp. 3-20

[3] Robert Scheer, « An Excuse-Spouting Bush Is Busted by 9/11 Report », Los Angles Times, 27 juillet 2004 ; Richard Immerman, historien et ancien haut officier du renseignement, fait valoir que l’analyse stratégique du renseignement n’a jamais compté dans le processus décisionnel de la sécurité nationale des Etats-Unis. Stephen MARRIN, « The 9/11 Terrorist Attacks: A Failure of Policy Not Strategic IntelligenceAnalysis », Intelligence and National Security, vol. 26, n°. 2, 2011, pp. 182—202

[4] Nassim Nicholas Taleb, The Black Swan, Random House, New York, 2007 http://shifter-magazine.com/wp-content/uploads/2015/02/Taleb_The-Black-Swan.pdf

[5] Le Rapport de la Commission nationale sur les attaques terroristes contre les États-Unis a consacré le chiptre 2 au « foundation of the new terrorism ». Voir The 9/11 Commission, The 9/11 Commission Report: Final Report of the National Commission on Terrorist Attacks Upon the United States, W. W. Norton & Company, 2004, p. 74-70; Paul L. Bremer, « A New Strategy for the New Face of Terrorism », The National Interest, 2001, pp. 23-30; Matthew J. Morgan, « The Origins of the New Terrorism », Parameters, vol. 34, N°. 1, printemps 2004), pp. 29-43 ; Ian Lesser (et autres), Countering the New Terrorism, RAND, Santa Monica, 1999, p. 2

[6] Voir l’entretien de l’auteur avec Mohsen Abdelmoumen, “Tewfik Hamel: We don’t fight against mosquitoes with a Kalashnikov, but in « cleaning the swamp » that support them”, The American Herald Tribune, 21 juillet 2016 http://ahtribune.com/politics/1082-tewfik-hamel.html La version française de l’entretien est disponible sur European Security & Defense http://www.european-security.com/index.php?id=7246

[7] Tewfik Hamel, « L’échiquier syrien: du terrorisme comme “la continuation de la politique par d’autres moyens” », Le Quotidien d’Oran, Alger, 1 mars 2016

[8] David C. Rapoport, “The Fourth Wave of modern terrorism”, In Audrey Kurth Cronin & James L. Ludes (dir.), Attacking Terrorism, Georgetown University Press, Washington, D.C., 2004, pp. 46-73

[9] Bruce Hoffman, Inside Terrorism, St. Andrew’s, London, 1998, pp. 200, 204, 212 ; Bruce Hoffman, « America and the New Terrorism: An Exchange », Survival, Vol. 42, N°. 2, été 2000, p. 162. Ian Lesser (et autres), Countering the New Terrorism, RAND, Santa Monica, 1999, p. 2.

[10] Walter Laqueur, “Postmodern Terrorism”, Foreign Affairs, Septembre/Octobre 1996; Walter Laqueur, The New Terrorism: Fanaticism and the Arms of Mass Destruction, Oxford, London, 1999, p. 4

[11] En 1974, Brian Jenkins suggéra ; « Les attentats terroristes sont souvent soigneusement chorégraphiés pour capter l’attention des médias électroniques et de la presse internationale » qui se révèlent incapables de négliger ce que Bowyer Bell a pertinemment décrit comme « un événement (…) spécialement élaboré pour répondre à leurs besoins ». En d’autres termes, le « terrorisme est destiné aux gens qui regardent, pas aux victimes réelles. Le terrorisme est un théâtre ». Voir Bruce Hoffman, « Une forme de guerre psychologique », dans « Contrer la mentalité terroriste », eJournal USA, vol. 12, n°. 5, mai 2007, pp. 8-12. Sur cette « relation symbiose » entre le terrorisme et les médias, voir, dans ce même numéro, l’article de Gabriel Weimann, « Le théâtre des médias », dans « Contrer la mentalité terroriste », eJournal USA, vol. 12, n°. 5, mai 2007, pp. 30-34.

[12] Brian Michael Jenkins, « The New Age of Terrorism », In David Kamien (dir.), McGraw-Hill Homeland Security Handbook, The McGraw-Hill Companies, Inc., New York, 2005, pp. 117-130 

[13] US National Commission on Terrorism, Countering the Changing Threat of International Terrorism: Report of the National Commission on Terrorism, Washington, D.C., 2000, p. 2.

[14] Bruce Hoffman, « Holy Terror: The Implication of Terrorism Motived by a religieu Imperative », Rand, Santa Minica, 1993, p. 2 http://www.rand.org/content/dam/rand/pubs/papers/2007/P7834.pdf

[15] Bruce Hoffman, Inside Terrorism. Revised and Expanded Edition, Columbia University Press, New York, 2006, p. 83. Pour Pape, le terrorisme suicide n’est pas expliqué par le fanatisme religieux. « Bien que les motifs religieux puissent avoir leur importance, le terrorisme suicide moderne n’est pas limité au fondamentalisme islamique. Les groupes islamiques reçoivent le plus d’attention dans les médias occidentaux, mais le leader mondial du terrorisme suicide est en fait les Tigres de libération de l’Eelam tamoul (LTTE), un groupe qui recrute de la population majoritairement hindoue dans le nord et l’est du Sri Lanka et dont l’idéologie a des éléments Marxistes/léninistes. Les LTTE représentent à eux seuls 75 des 186 attentats suicides de 1980 à 2001. Même parmi les attaques suicides islamiques, les groupes à orientation séculaire représentent environ un tiers de ces attaques ». Robert A. Pape, « The Strategic Logic of Suicide Terrorism », American Political Science Review, vol. 97, N°. 3, 2003, pp. 1-19 (1)

[16] Juergensmeyer Mark, The New Cold War? Religious Nationalism Confronts the Secular State, University of California Press, Berkeley, 1993

[17] John Calvert, “The Mythic Foundations of Radical Islam”, Foreign Policy Research Institute, Philadelphie, 1 décembre 2004

[18] James A. Piazza, « Is Islamist Terrorism More Lethal?: An Empirical Study of Group Ideology, Organization and Goal Structure », Terrorism and Political Violence, vol. 21, n°. 1, 2009, pp. 68-88 ; Peters distingue les terroristes « practical » et « apocalyptic ». Ralph Peters, « When Devils Walk the Earth: The Mentality and Roots of Terrorism, and How to Respond », Center For Emerging Threats and Opportunities, Marine Corps Warfighting Laboratory, Quantico, 2004 ; James A. Bates, « The War on Terrorism Countering Global Insurgency in the 21 st Century », Jsou Report 05-8, Joint Special Operations University, Florida, 2005, p. 3 

[19] Dennis Sandole, Peace and Security in the Postmodern World, Routledge, London & New York, 2007, p. 1.

[20] « La guerre comme cognitivement connue de la plupart des non-combattants, la guerre comme une bataille dans un champ entre les hommes et les machines, la guerre comme un événement massif décisif dans un litige dans les affaires internationales: une telle guerre n’existe plus ». Rupert Smith, The Utility of Force, Allen Lane, London, 2005, p. 1 et 3;

[21] Mary Kaldor, New and Old Wars: Organized Violence in a Global Era, Polity Press, Cambridge, 1999, p. 1-3, 7, 6-9, 33-46, 158, 170.

[22] Sir Rupert Smith & Ilana Bet-El, « Military Capabilities for “War Amongst the People” », In Adapting America’s Security Paradigm and Security Agenda », National Strategy Information Center, Washington, DC., 2012, p. 45-49.

[23] « Comisaf Initial Assessment (Unclassified) -Searchable Document », Wasginhton Post, 21 septembre 2009

[24] Colin S. Gray, « How Has War Changed Since the End of the Cold War? », Parameters, 2005, pp. 14-26 (19) ; Frank G. Hoffman, « Looking back », Armed Forces Journal, 1 aout 2007

[25] « Comme le deuxième millénaire de notre ère touche à sa fin, la tentative de l’État de monopoliser la violence entre ses propres mains est chancelante […]. Si les tendances actuelles se maintiennent, le genre de guerre qui est basé sur la division entre le gouvernement, l’armée et le peuple semble être en voie de disparition. La hausse des conflits de faible intensité peut, à moins qu’il puisse être rapidement circonscrit, finir par détruire l’Etat. Sur le long terme, la place de l’Etat sera remplacée par des organisations guerrières d’un type différent ». Martin van Creveld, The Transformation of War, Free Press, New York, 1991, p. 192 et 197; Martin van Creveld, « The Fate of the State », Parameters, printemps 1996, pp. 418

[26] Tewfik Hamel ; « De la « Long War » à l’« Asia-Pacific Pivot »Vers la non centralité de la guerre irrégulière ? », NAQD, N° 31, 2014, pp. 53-81

[27] John Arquilla & David Ronfeldt, The Advent of Netwar, RAND Corporation, Santa Monica, 1996, pp. 3-4.

[28] Mary Kaldor, « In Defence of New Wars », Stability: International Journal of Security & Development, Centre for Security Governance (CSG), Canada, vol. 2, n°. 1: 4, 2013, pp. 1-16, http://www.stabilityjournal.org/articles/10.5334/sta.at/

[29] William S. Lind & Keith Nightengale & John F. Schmitt & Joseph W. Sutton & Gary I. Wilson, « The Changing Face of War: Into the Fourth Generation », Marine Corps Gazette, Octobre 1989, pp. 22-26;  William S. Lind & John F. Schmitt & Col Gary I. Wilson, « Fourth Generation Warfare: Another Look », Marine Corps Gazette, décembre 1994, pp. 34-37; Thomas X. Hammes, « The Evolution of War: The Fourth Generation », Marine Corps Gazette, septembre 1994 ; Robert J. Bunker, « Generations, Waves and Epochs: Modes of Warfare and the RPMA », Airpower Journal, printemps 1996 ; Robert J. Bunker, « Epochal Change: War Over Social and Political Organization », Parameters, été 1997, pp. 15-25

[30] Frank G. Hoffman, « Expeditionary ethos »,  Armed Forces Journal, 1 mars 2010

[31] Joint Forces Command, The Joint Operating Environment : Tendance & Challenges for the Future Joint Force Through 2030, décembre 2007, p. 45

[32] Rupert Smith, The Utility of Force, Allen Lane, London, 2005 ; Roy Godson & Richard Shultz, “Adapting America’s Security Paradigm and Security Agenda”, National Strategy Information Center, Washington, D.C, 2010.

[33] Mary Kaldor, New and Old Wars: Organized Violence in a Global Era, Polity Press, Cambridge, 1999.

[34] Kalevi J. Holsti, The State, War, and the State of War, Cambridge University Press, Cambridge, 1996.

[35] Martin Van Creveld, The Transformation of War, Free Press, New York, 1991.

[36] Samuel P. Huntington, The Clash of Civilizations and the Remaking of World Order, Simon & Schuster, New York, 1996

[37] Charles Krulak, « The Strategic Corporal: Leadership in the Three Block War », Marine Corps Gazette, vol. 83, n°.  1, janvier 1999, pp. 18-23 ; Charles C. Krulak, « The Three Block War: Fighting in Urban Areas », Vital Speeches of the Day, vol. 64, n°. 5, 15 décembre 1997, pp. 139-141  

[38] Mary Kaldor, « Cosmopolitanism vs. Nationalism: The New Divide? », In Richard Caplan & John Feffer (dir.), Europe’s New Nationalism, Oxford University Press, Oxford, 1996, p. 44.

[39] Mary Kaldor &  Diego Muro, « Religious and Nationalist Militant Groups », In Mary Kaldor & Helmut Anheier & Marlies Glasius (dir.), Global Civil Society, Oxford University Press, Oxford, 2003, p. 182

[40] Mary Kaldor, New & Old Wars, op.cit., Mary Kaldor, « In Defence of New Wars », Stability: International Journal of Security & Development, Vol. 2, N°. 1, 2013 http://www.stabilityjournal.org/articles/10.5334/sta.at/

[41] Ministry of Defense, DCDC Global Strategic Trends Programme 2007-2036, London, mars 2007, p. 67-70.

[42] Dennis M. Drew & Donald M. Snow, Making Twenty-First-Century Strategy : An Introduction to Modern National Security Processes and Problems, Air University Press, Alabama, novembre 2006, p. 143-144; Herfried Münkler, Les Guerres nouvelles, éd. ALVIK, Paris, 2003, p. 7-8

[43] Hans Binnendijk, Transforming America’s Military, NDU Press, Washington, D.C., 2002, p. xix

[44] General Gordon R. Sullivan & Colonel James M. Dubik, « War in the Information Age »,  U.S. Army War College, Carlisle Barracks, juin 1994

[45] « De la montée en puissance de la vision scientifique du monde dans les XVIIe et XVIIIe siècles à nos jours », écrit Bousquet, « une symbiose de plus en plus intime entre la science et la guerre s’est imposé avec la dépendance croissante du développement et de l’intégration de la technologie au sein des assemblages sociaux complexes de la guerre ». Expliquant comment les technologies clés de l’histoire moderne ont évolué en métaphores de l’organisation sociale –permettant, à leur tour, à l’armée, en tant qu’organisation, de se réguler- il note que « quatre régimes distincts de la scientific way of warfare, dont chacun est caractérisée par une constellation théorique et méthodologique spécifique : Guerre mécanique, thermodynamique, cybernétique et chaoplexic. Au cœur de chaque régime, nous trouvons une technologie paradigmatique associée, respectivement l’horloge, le moteur, l’ordinateur et le réseau […] Les quatre régimes qui la composent sont caractérisés par les technologies dominantes successives et les métaphores de la machine (l’horloge, le moteur, l’ordinateur et le réseau) et les sciences respectives qu’ils l’ont prise en charge (mécanisme, thermodynamique, cybernétique, chaoplexity) ». Antoine J. Bousquet, The Scientific Way of Warfare, Columbia University Press, 2009, p. 4, 30.

[46] John Arquilla & David Ronfeldt, Networks and Netwars, RAND, Santa Monica, 2001

[47] Antulio J. Echevarria II., Fourth-Generation War and Other Myths, U.S. Army War College, Nov 2005, p. 4

[48] selon la description de John Keegan dans son livre A History of Warfare (1993). William A. Stofft & Gary L. Guertner, Ethnic Conflict: Implications for the Army of the Future, U.S. Army War College, 14 mars 1994

[49] U.S. Marine Corps, Warfighting, MCDP1, Department of the Navy, Wasington, D.C., 20 juin 1997, p. 3, 48.

[50] MarieJoëlle Zahar, « Protégés, Clients, Cannon Fodder: Civilians in the Calculus of Militjas », In Simon Chesterman éd.), Civilians in War, Lynne Rienner Publishers, Inc., Boulder & London, 2001, p. 50-53

[51] Stathis N. KALYVAS, Les guerres civiles après la guerre froide, op.cit, p. 112

[52] M.L. Van Creveld, The Transformation of War, op.cit, 216-220.

[53] Rémy M. Mauduit,  « La sécurité nationale et la stratégie de l’armée de l’Air », Air & Space Power Journal, hiver 2005, pp. 4-5

[54] Voir les articles 52 et 57 du Protocole additionnel aux Conventions de Genève du 12 août 1949 relatif à la protection des victimes des conflits armés internationaux (Protocole I), 8 juin 1977.

[55] Unicef, Machel Study 10-Year Strategic Review: Children and Conflict in a Changing World, Office of the Special Representative of the Secretary-General for Children and Armed Conflict & United Nations Children’s Fund, United Nations, New York, avril 2009, p. 8 ; David Keen, « War and Peace: What’s the Difference? », In Adekeye Adebajo & Chandra Lekha Sriram, Managing Armed Conflicts in the 21 st Century, Routledge, London & New York, 2001, p. 3-4

[56] William S. Lind & Keith Nightengale & John F. Schmitt & Joseph W. Sutton & Gary I. Wilson, “The Changing Face of War: Into the Fourth Generation,” Marine Corps Gazette, Octobre 1989, pp. 22-26 http://globalguerrillas.typepad.com/lind/the-changing-face-of-war-into-the-fourth-generation.html

[57] Anthony H. Cordesman, The Lessons and Non-lessons of the Air and Missile Campaign in Kosovo, Praeger, London, 1998, p. 62

[58] Program on Humanitarian Policy and Conflict Research, Transnationality, War and the Law: A report on a roundtable on the transformation of warfare, international law, and the role of transnational armed groups, Program on Humanitarian Policy and Conflict Research, Harvard University, Cambridge, avril 2006, p. i-ii.

[59] Yahya Sadowski, The Myth of Global Chaos, Brookings Institute Press, Washington, D.C., 1998

[60] Tewfik Hamel, “The Fight against Terrorism and Crime: A Paradigm Shift?”, International Journal of Criminology, Policy Studies Organization, Washington, Vol0. 4, N°. 1, Printemps 2016, pp. 3-31 (11-13)

[61] Robert D. Kaplan, « Le Coming Anarchy », Atlantic Magazine, février 1994 ; Robert D. Kaplan, « Old States, New Threats », The Washington Post, 26 avril 2006

[62] S. Huntington, « The Clash of Civilizations »; B. Barber, « Jihad vs. McWorld » et ; R. Kaplan, « The Coming Anarchy », in Patrick O’Meara & Howard D. Mehlinger & Matthew Krain (dir), Globalization and the Challenges of a New Century: A Reader, Indiana University Press, Bloomington, 2000.

[63] Friedman lui aussi est convaincu « que ce sont ces guerres internes qui façonnent de plus en plus les affaires internationales, de la Russie au Mexique à la Turquie ». Mais « pourquoi ces guerres internes sont devenues si intense? La coutre réponse est la ‘mondialisation’ », dit Thomas L. Friedman, « Foreign Affairs;Turkey Wings It », The New York Times, 17 juillet 1996 

[64] Yahya Sadowski, The Myth of Global Chaos, Brookings Institute Press, Washington, D.C., 1998, p. 4, 66

[65] Ian roxborough, “Weary Titan, Assertive Hegemon: Military Strategy, globalization, and U.S. Preponderance”, In Bruce Mazlish & Nayan Chanda & Kenneth Weisbrode, The Paradox of a Global USA , Stanford University Press, Stanford, 2007, pp. 122-147; Ian Roxborough War, “American Hegemony, and the Politics of Globalization”, The European Legacy, Vol. 8, N°. 3, 2003, 281-297

[66] En contraste avec la pensée des conservateurs et des théoriciens du chaos et le discours de l’administration Bush, « Les musulmans ne haïssent pas nos libertés, mais haïssent plutôt nos politiques », reconnait la Defense Science Board. Tom Regan, “U.S. Middle East Policy: They hate our policies, not our freedom”, The Christian Science Monitor, 29 novembre 2004: “Changing Course – A New Direction for U.S. Relations with the Muslim World”, Report of the Leadership Group on U.S.-Muslim Engagement, septembre 2008, p. 15; Will Dunham, « Panel Sees U.S. Losing ‘War of Ideas’ Among Muslims », Reuters, 24 novembre 2004 ; Steven Kull (et autres), “Muslim Public Opinion on US Policy, Attacks on Civilians, and al Qaeda”, World Public Opinion, Program on International Policy Attitudes, University of Maryland (PIPA), 24 avril 2007; Office of the Under Secretary of Defense for Acquisition, “Technology, and Logistics, Report of the Defense Science Board Task Force on Strategic Communication”, Government Printing Office, Washington, DC: septembre 2004, p. 14-15; Anwar Sadat Chair for Peace and Development, University of Development University of Maryland and Zogby International, 2006 Annual Arab Public Survey, presented at the Brookings Institution, 8 février 2007. 

[67] Voir par exemple « Bush: ‘We wage a war to save civilization itself’ », CNN, 8 novembre 2001 Anna M. Agathangelou & L. H. M. Ling, « Power, Borders, Security, Wealth: Lessons of Violence and Desire from September 11 », International Studies Quarterly, vol. 48, n°. 3, septembre 2004, pp. 517–538.

[68] John Ashcroft, « Prepared Remarks of Attorney General John Ashcroft », National Religious Broadcasters Convention, Nashville, Tennessee, 19 février 2002 https://www.justice.gov/archive/ag/speeches/2002/021902religiousbroadcasters.htm

[69] John Lynn, De la guerre : une histoire du combat, Tallandrier, Paris, 2006, p. 493.

[70] Benjamin Schwarz, « The Diversity Myth », The Atlantic Monthly, mai 1995 ; John Arquilla & David Ronfeldt, The Advent Of Netwar, Rand Corporation, 1996, p. 55. 

[71] General James L. Jones, Commander, Useucom; official statement before The House Armed Service Committee, 9 mars 2005, p. 2. « Global Trends 2025: A Transformed World », National Intelligence Council, Washington, DC, November, 2008, p. vi ; E.D. McGrady & Karen Smith, « Haiti  and the Future of Warfare », Center for  Naval Analyses, juin 1998  (CRM 96-126.10)

[72] La « tension entre les forces ‘Lexus’ de l’intégration économique et les forces ‘Olive Tree’ de l’identité et du nationalisme ». « Après le 11/9 », dit-il, « the olive tree wars became all-consuming ». Thomas L. Friedman, The World Is Flat, Straus and Giroux, New York, 2007, p. 8-9

[73] Alain Touraine, Un nouveau paradigme. Pour comprendre le monde d’aujourd’hui, Fayard, Paris, 2005, p. 9

[74] Les trois tomes s’intitulent « La société en réseaux », « Le pouvoir de l’identité » et « Fin de millénaire ». Manuel Castells, The Information Age. Volume II: The Power of Identity, 2e éd., Wiley-Blackwell, Londes, 2010.

[75] United Nations, « Impact of Armed Conflict on Children: Report of the expert of the Secretary-General, Ms. Graça Machel, submitted pursuant to General Assembly Resolution 48/157 », UN document A/51/306, New York, 26 August 1996, p. 13 http://www.un.org/documents/ga/docs/51/plenary/a51-306.htm

[76] Steven Metz,“America in the Third World”, U.S. Army War College, Carlisle, 20 mai 1994, p. 11-12.

[77] National Intelligence Council, Global Trends 2015: A Dialogue About the Future. With Nongovernment Experts, NIC 2000-02, Washington, D.C, décembre 2000, p. 50.

[78] Jean-Marc Leclerc, « Le plan français de lutte contre le trafic de Cocaïne », Le Figaro, 8 octobre 2009 ;  Mohamed Boufatah, « GSPC infiltre les rebelles nigériens : La secte nigérienne Boko Haram autait été formée pat GSPC-Al Qaida, soutenait hier un quotidien nigérien », L’Expression (Alger) 3 aout 2009.

[79] James H. Mittelman & Robert Johnston, « The Globalization of Organized Crime, the Courtesan State, and the Corruption of Civil Society », Global Governance, vol. 5, n°. 1, Janvier–Mars 1999, pp. 103-126

[80] Tewfik Hamel, « La lutte contre le terrorisme et la criminalité: Un changement de paradigme? », Sécurité globale, N°. 5, 2016, p. 45-79. https://www.cairn.info/load_pdf.php?ID_ARTICLE=SECUG_161_0045

[81] John M. Hagedorn, A World of Gangs, University of Minnesota Press, Minneapolis, 2008, p. xxiv, 21

[82]Kimberley Thachuk & Sam J. Tangredi, “Transnational Threats and Maritime Responses”, in Sam J. Tangredi (Dir.), Globalization and Marine Power, INSS, National Defense University, Washington, D.C, décembre 2002.  

[83] Douglas Farrah, “Al-Qaeda Cash Tied to Diamond Trade,” Washington Post, 2 novembre 2001; Douglas Farrah, “Report Says Africans Harbored Al-Qaeda,” Washington Post, 29 décembre 2002.

[84] Liana Sun Wyler & Nicolas Cook, “Illegal Drug Trade in Africa: Trends and U.S. Policy”, CRS Report for Congress, Congressional Research Service, 30 septembre 2009; Sandy Winnefeld, “Maritime Strategy in an Age of Blood and Belief”, Proceedings Magazine, vol. 134/7/1, 265, juillet 2008.

[85] « Lyes Boukra. Directeur par intérim du Centre africain d’étude et de recherche sur le terrorisme (Caert) : « La rançon sert à sauver une vie pour en tuer des centaines d’autres » », El-Watan, 25 mars 2010 :

[86] Joshua S. Goldstein, Winning the War on War, Dutton Adult, 2011, p. 3 et 5.

[87] Tewfik Hamel, « Le concept de mondialisation à la lumière des nouvelles mutations géostratégiques », Rapport d’INESG, Institut National d’Etudes de Stratégie Globale, Présidence de la République, Alger (Algérie), 2015.

[88] Kofi Annan, discours prononcé à Los Angles devant le ‘World Affairs Council’ le 3 décembre 2003;  « Les cent ans après 1900 ont été sans conteste le siècle le plus sanglant dans l’histoire moderne, beaucoup plus violent en termes relatifs ainsi qu’en termes absolus que n’importe quelle époque antérieure », écrit Niall Ferguson, The War of the World: Twentieth-Century Conflict and the Descent of the West, Allen Lane, 2006 ; Steven Pinker, « Why Is There Peace? », The Greater Good Science Center, University of California, Berkeley, 1 avril 2009; Peter Singer, « Is Violence History? », The New York Times, 6 octobre 2011 ; Milton Leitenberg, Deaths in Wars and Conflicts between 1945 and 2000, Cornell University Peace Studies Program, Occasional Paper, n°. 29, Center for International and Security Studies, University of Maryland, juin 2006; voir aussi James F. Hoge Jr., « The Cruelest Century », The Washington Post, 5 novembre 2006 ; John V. Denson, A Century of War : Lincoln, Wilson, & Roosevelt, Ludwig von Mises Institute, Alabama, 2006. 9

[89] Ramses Amer (et autres). « Major Armed Conflicts », In SIPRI Yearbook 1993: World Armaments and Disarmament, Oxford University Press, Oxford, 1993, p. 81-118 (81) ; Jonathan Clarke, “Present at the Re-Creation: The Need for a Rebirth of American Foreign Policy”, Cato Institute Policy Analysis, n°. 191, Cato Institute, 31 mars 1993

[90] Sharon Wiharta & Neil Melvin & Xenia Avezov, The New Geopolitics of Peace Operations : Mapping the Emerging Landscape, Sipri, Stockholm, septembre 2012, p. 3.

[91] Human Security Report: War and Peace in the 21st Century, p. 147.

[92] Kristian Gleditsch, « A Revised List of Wars Between and Within Independent States, 1816–2002 », International Interactions, vol. 30, n°. 3, 2004, pp. 231–262.

[93] « Human Security Report 2005: War and Peace in the 21st Centry”, Human Security Report Project at the Human Security Centre, The University of British Colombia, Liu Institute for Global Issues, Oxford University Press, New York, 30 novembre 2005, p. 16.

[94] Robert C. Owen, « Aerospace Power and Land Power in Peace Operations », Aerospace Power Journal, automne 1999, p. 1 

[95] Selon le communiqué de presse accompagnant la publication d’un rapport de The Human Security Report, une étude financé par cinq pays et publié par Oxford University Press. Andrew Mack, « Peace on Earth? Increasingly, Yes », The Washington Post, 28 décembre 2005

[96] Andrew J. Bacevich, The Limits of Power, Henry Holt & Company, LLC., New York, 2008, p. 156-157

[97] Michael J. Mazarr, « Extremism, Terror, and the Future of Conflict », Policy Review, mars 2006 ;  

[98] Tewfik Hamel, « Mondialisation, discours de la mondialisation et souveraineté », Strategia, n°. 5, Ministère de la Défense, Alger, 2eme Semestre 2016, pp. 87-12

[99] Siniša Maleševic, The Sociology of War and Violence, Cambridge University Press, New York, 2010; Siniša Malešvic, « The Sociology of New Wars? », International Political Sociology, The Governance and Social Development Resource Centre (GSDRC), University of Birmingham. vol. 2, n°.2, 2008,  pp. 97-112

[100] United States Marine Corps, « Marine Corps Operating Concepts, 3éd., Washington, juin 2010, p ; 109-10; Thomas E. Ricks, « The Future of War? », Foreign Policy, 5 février 2014 ; Max Boot, « The Evolution of Irregular War”, Foreign Affairs, avril-mars 2013; David Kilcullen, Counterinsurgency, Oxford University Press, New York, 2010, p. ix-x

[101] Patrick Porter, Military Orientalism: Eastern War Through Western Eyes, Columbia University Press, New York, 2009.

[102] Edward Said, « Orientalism Reconsidered », In Gearóid Ó Tuathail & Simon Dalby & Paul Routledge (sous. dir.), The Geopolitical Reader, Routledge, London/New York, 1998, pp. 256-261 (publié initialement en 1984) http://frenndw.files.wordpress.com/2011/03/geopol-the-geopolitics-reader.pdf

[103] Stathis Kalyvas, « ‘New’ and ‘Old’ Civil Wars: A Valid Distinction? », World Politics, vol. 54, n°. 1, 2001, pp. 99-118 ; Stathis N. Kalyvas, « Les guerres civiles après la Guerre froide », In Pierre Hassner & Roland Marchal, Guerres et sociétés États et violence après la Guerre froide, éd. Karthala, 2003, pp. 107-135 4.

[104] John Keegan, ‘The end of war?’, Daily Telegraph, 4 August 1997

[105] Van Creveld, The Transformation of War, 1991, p. 139; John Keegan dans son Histoire de la guerre, par exemple, « définit l’art de la guerre non occidental comme ‘l’autre formé’ justaposée à l’occidental : ‘La guerre orientale, dans la mesure où nous savons l’identifier et la désigner comme différente de la guerre européenne, est caractérisée par des traits qui n’appartiennent qu’à elle. Elle est avant tout évasive, différée et indirecte’ ». Un point de vue que rejet John Lynn, De la guerre : Une histoire du combat. Des origines à nos jours, Tallandrier, Paris, 2006, p. 25. « L’islamisme radical perçoit dans le djihad un instrument juridique pour le renouveau militant du pouvoir islamique. L’islamisme radical n’accepte le concept occidental de la guerre en fonction de la loi. Par conséquent, il ne peut pas accepter l’égalité juridique de la violence entre les belligérants. Pour les islamistes radicaux, la guerre existe comme un état perpétuel de confrontation exclusive d’hostilités parce que la guerre est un devoir religieux qui rend caduques les conventions contractuelles définissant juridiquement les règles du conflit. Les traités sont temporaires. La position juridique d’un Etat musulman dans de telles conditions est sans importance parce que le conflit défend les principes religieux, et non pas les frontières nationales. En un mot, guerre menée dans le cadre du djihad islamiste radical est un concept totalement indépendant de paix », écrit Lew B. Ware, « A Radical Islamist Concept of Conflict », In Stephen C. Pelletiere (dir.), Terrorism, U.S. Army War College, mai 1995, p. 44; voir aussi Christopher Coker, The Warrior Ethos: Military Culture and the War on Terror, Routledge, New York, 2007, p. 73; Robert Spencer & David Horowitz, Obama and Islam, David Horowitz Freedom Center, USA, 2010, p. 12

[106] L’auteur reconnait que les Talibans eux-aussi ont offert leur évaluation des combattant occidentaux : « The Taliban also talked of a culturally-defined struggle, reinforcing the myth of the hardened warrior fighting a weak, materialistic West » Patrick Porter, Military Orientalism: Eastern War Through Western Eyes, Columbia University Press, New York, 2009, p. 145.

[107] First, the Taliban did not come out and fight. In a tactical moment, self-preservation trumped religious sensitivity. More deeply, the idea that […] ritual honour is the Afghans’ political centre of gravity, contradicts other patterns of behavior”, explique Patrick Porter, Ibid, p. 29, 143-145, 149

[108] Patrick Porter, Military Orientalism: Eastern War Through Western Eyes, Columbia University Press, New York, 2009, p. 10, 15, 23-24.

[109] Koen Stroeken, War, Technology, Anthropology, Berghahn Books, New York, 2012

[110] L’Armée a créé des centres de formation culturelle en 2005, l’Armée de l’Air en 2006, et la Marine en 2007. US Government Accountability Office, « Language and Culture Training », GAO-12-50, Report to Congressional Committees, Washington, DC., Octobre 2011 http://www.gao.gov/products/GAO-12-50 Rochelle Davis, « Culture, a Weapon System on the Wane », MER264, N°. 42, Middle East Research and Information Project, Washington, DC., automne 2012

[111] Laurie Rush, « Archaeological Ethics and Working for the Military »,  In Robert A.Rubinstein & KerryFosher & Clementine Fujumura (dir.), Practicing Military Anthropology : Beyond Expectations and Traditional Boundaries, Kumarian Press, Sterling, VA, 2013, p. 16

[112] Christopher Varhola, « Ethnicity and Shifting Identities », In Robert A.Rubinstein & KerryFosher & Clementine Fujumura (dir.), Practicing Military Anthropology, Kumarian Press, Sterling, VA, 2013, p.  107

[113] « Such an approach to stigma brings forth its complex relational framework and allows it to be understood as “not primarily a property of individuals as many have conceptualized it to be but a humanly constructed perception, constantly in flux and legitimizing our negative responses to human differences” ». Maria Todorova, Imagining the Balkans. Oxford University Press, Oxford, 2009, p. 61.

[114] Jack S. Levy & William R. Thompson, The Arc of War: Origins, Escalation, and Transformation, University of Chicago Press, 2011  

[115] Eva Herschinger, Constructing Global Enemies, Routledge, London & New York, 2011, p. 1

[116] Barry Buzan, “Will the ‘global war terrorism’ be the new Cold War?”, International Affairs, vol. 82, n°. 6, 2006, pp.1104: Barry Buzan & Ole Wæver « Macrosecuritisation and security constellations », Review of International Studies, vol. 35, n°. 2, 2009, pp. 253-276

[117] « Ce que beaucoup d’Occidentaux rejettent comme ‘terrorisme’ », écrit Bacevich, « devrait être considéré comme une panoplie de techniques employées pour miner les avantages apparents des forces de haute technologie conventionnelles. Les méthodes employées comprennent pas seulement le terrorisme […] mais elles intègrent également la propagande, la subversion, l’agitation populaire, guerre économique, et a attaques hit-and-run sur les forces régulières […]. Le thème commun de ces techniques, dont aucune n’est nouvelle, est la suivante: éviter les forces de l’ennemi; exploiter les vulnérabilités de l’ennemi ». Andrew Bacevich, « The Islamic Way of War », American Conservative, 11 septembre 2006

[118]  Thomas Copeland, « Is the ‘New Terrorism’ Really New? An Analysis of the New Paradigm for Terrorism », Jounal of Conflict Studies, Vol. XXI, N°. 2, hiver 2001

[119] « Tant qu’il n’y a pas d’accord sur ‘ce qui est le terrorisme?’, il est impossible d’attribuer la responsabilité aux pays qui soutiennent le terrorisme, de formuler des mesures pour faire face à un niveau international au terrorisme, et de lutter efficacement contre les terroristes, les organisations terroristes et leur alliés », ecrit Boaz GANOR. Cité dans Richard Jackson & Lee Jarvis & Jeroen Gunnin& Marie Breen-Smyth, Terrorism: A Critical Introduction, Palgrave Macmillan, New York, p. 107

[120] Gabe Mythen & Sandra Walklate, « Terrorism, Risk and International Security: The Perils of Asking ‘What If?’», Security Dialogue, vol. 39, N°. 1-2, avril 2008, 221-242 (255)

[121] Didier Bigo, « Globalized (in)Security: the Field and the Ban-opticon », Didier Bigo & Anastassia Tsoukala, Terror, Insecurity and Liberty : Illiberal practices of liberal regimes after 9/11, Routledge, 2008, pp. 5-49

[122] « The result is a range of interlocking neo-Orientalist imaginings of a global Arab-Islamic terrorist cabal, a monolithic and evil Enemy Other, and the negation of “Western” culture and values confirming Samuel Huntington’s clash of civilizations theory », ajoutent Anders Strindberg & Mats Warn, « Realities of Resistance: Hizballah, the Palestinian Rejectionists, and Al-Qa’ida Compared », Journal of Palestine Studies, vol. 34, n°. 3, 2005, pp. 23-41.

[123] Maria Todorova, Imagining the Balkans. Oxford University Press, Oxford, 2009, p. 61.

Article précédentLa Turquie et le Djihad Syrien: Financement du terrorisme ou Realpolitik?
Article suivantTurquie-Monde arabe  le retour fugace de l’Histoire

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.