Les Amériques entre intégration hémisphérique et tentation globale

Jure Georges VUJIC

Géopoliticien et écrivain franco-croate.

4eme trimestre 2013

La réflexion sur les Amériques et leur rôles dans le monde contemporain de plus en plus mul­tipolaire mène inévitablement à la question des échelles de réflexion et des niveaux d’interpré­tations. À l’échelle intercontinentale, on est en présence d’un continent où les États, compte tenu des rapports de forces, semblent osciller entre l’intégration et la fragmentation. Bien sûr à cette dualité de dynamiques, se superposent les différents modèles d’intégration et la dialectique centre-périphérie : l’intégration étatsunienne néolibérale, mercantile et verticale et l’intégration macro-régionaliste horizontale des pays émergents latino-americains. À l’echelle de la mondia­lisation, avec la percée économique de la Chine sur le continent sud-américain et dans la zone Asie-Pacifique, l’Amérique du Sud retrouve son rôle géostratégique dans le jeu des relations inter­continentales. En effet en tant qu’espace géostratégique bi-océanique incontournable dans la conjuguaison des continents, les macro-systèmes panaméricain et eurafricain, l’Amérique du Sud jouera incontestablement un rôle géostratégique important dans la stratégie américaine d’endi-guement de la Chine.

Diversité et contrastes des Amériques

Parler des Amériques en terme de géopolitique, revient à évoquer ce curieux tropisme sémantique de l’Amérique au pluriel, à savoir la prépondérance des États-Unis sur un continent marqué par les contrastes internes, à la fois économiques, politiques, culturels et civilisationnels. C’est aussi rendre compte d’énormes enjeux quant à l’unité de ce continent polymorphe qui oscille entre intégration et frag­mentation. En effet, la domination des États-Unis sur le continent pose le problème du statut géopolitique et épistèmologique impérial des États-Unis dans leur rap­port avec le reste du continent, le Mexique, l’Amérique centrale hispanique et les Caraïbes, à savoir la dialectique entre le centre et la périphérie, qui ressort des dis­proportions économiques, démographiques et culturelles[1]. L’Amérique, c’est avant tout une projection symbolique, mythique et historique de l’Ancien Monde dont la toponyme renvoie aux grandes découvertes du XVIe siècle (Amérique, Colombie, Nouvelle Angleterre, Nouvelle France, New York (ex : Nouvelle Amsterdam), Nouvelle Orléans, le rôle colonial et civilisationnel de l’évangélisation : Santa Cruz, Vera Cruz, Asuncion, Sao Paulo.

Mais l’Amérique c’est aussi la promesse du Nouveau monde, avec son identité particulière qui s’est forgée un peu par défaut, par réaction et par par opposition à l’Europe, même si au cours de l’histoire le cordon ombilical entre les États-Unis et l’Europe n’a jamais été complètement coupé avec l’Europe, comme en témoigne la persistance du Commonwealth et les liens étroits avec la reine d’Angleterre qui est le chef de l’État au Canada. Il ne faut pas aussi oublier la permanence de la dimen­sion religieuse messianique ou utopique : la terre promise, le Manifeste destiny, les Puritains du Mayflower en 1620, le rôle fondateur des utopistes au XIXe siècle : saint-simoniens, fouriéristes lesquels ont durant les siècles forgé le mythe du nou­veau monde, le fameux rêve américain qui fait toujours référence à l’esprit pionnier, le goût de l’initiative et de l’entreprise, l’image du self made man, l’idéal de la réussite matérielle, le bien-être et la richesse. Cependant, il faut rappeler que le manque de cohésion et d’intégration régionale du continent résulte historiquement du décou­page politico-administratif qui date de l’époque des vagues successives de peuple­ment des terres pionnières : on constate que les marges perpendiculaires constituent les voies de pénétration faites pour ouvrir les arrière-pays au peuplement et les inté­grer à l’économie coloniale : ainsi en est-il pour la frontière entre le Canada et les États-Unis, les frontières des Guyanes, ainsi que les limites des états du Nordeste brésilien héritées des anciennes capitaineries portugaises. Il faut aussi rappeler que X Homestead Act qui, en 1862 aux États-Unis, instaure le carroyage des terres instaure surtout l’accès à la terre pour les migrants et rend possible l’émergence d’une société fondée sur une classe moyenne importante. Aujourd’hui il est à la fois symptoma-tique et révélateur d’un certain esprit eurocentriste de parler du monde américain et non du monde amérindien, alors que l’identité américaine reste tout de même fortement tributaire de l’identité et de l’histoire indienne. Les Indiens en tant que population autochtone du continent avant la colonisation restent toujours la mau­vaise conscience des États-Unis. Durant des siècles de conquêtes et de guerres, les cultures indiennes ont été niées et les Indiens eux-mêmes exterminés. D’autre part la colonisation espagnole en Amérique centrale a provoqué une véritable catastrophe démographique chez les Indiens, une prise de conscience s’est produite en faveur des Indiens (le mouvement indigéniste) et chez les Indiens eux-mêmes Aujourd’hui, le mouvement indianiste et indigéniste rend compte de cette prise conscience en faveur de la sauvegarde de l’identité et des droits des Indiens qui non seulement ont ete spoliés de leurs terres mais ont subi durant des siècles une acculturation brutale. Ainsi le mouvement néo-zapatiste du sous-commandant Marcos reste vivace dans le Sud du Mexique la politique sociale indigéniste d’Evo Moralès en Bolivie et de Lula au Brésil, rendent compte de la multiculturalité de l’Amérique qui se doit d’intégrer cette spécificité et cette diversité culturelle à l’analyse géopolitique.

Hétérogénéité culturelle et inégalités socio-économiques

Sur le plan économique et social, le continent américain que caractérise une large hétérogénéité culturelle, reste néanmoins marqué par une disproportion bipo­laire entre le Nord riche et le Sud pauvre qui n’est pas sans rappeler la fracture socio-économique globale entre le Nord et le Sud. Bien sûr à l’interieur même de l’Amérique du Nord, anglo-saxonne et riche, il existe des lignes de fractures sociales chez les classes déshéritées alors que les contrastes sociaux entre classes riches et pauvres en Amérique latine restent quant à eux flagrants. Depuis la doctrine de Monroe (L’Amérique aux Américains), la domination de l’Amérique du Nord sur l’Amérique du sud n’a cessé de s’accroitre. L’idée audacieuse de Napoléon III d’eu­ropéaniser le Mexique et de lier l’Amérique latine aux monarchies européennes en installant Maximilien d’Autriche au pouvoir à Mexico s’est soldée par un échec, lequel a consacré les États-Unis comme puissance impériale sur le sud du continent. Conjuguée à l’application de la doctrine Mahan sur la nécessité de la puissance navale, la politique étatsunienne du gros bâton (big stick) dans les Caraïbes qu’ils considèrent comme leur arrière-cour, lui permettront de pénétrer en profondeur et d’asseoir leur domination économique et militaire sur le continent sud. L’annexion de Puerto Rico en 1898 et, la même année, la mise en place d’un protectorat sur Cuba suit la défaite de l’Espagne qui perd les Philippines et mettra un terme à la présence hispanique dans les Amériques. Dès lors, le contrôle des voies de passages stratégiques et commerciales sur le continent deviendra une priorité stratégique pour les États-Unis : contrôle du canal interocéanique de Panama, avec la création de la République de Panama aux dépens de la Colombie, en 1903, et immédiate­ment après, la cession par le nouvel État de la zone du futur canal interocéanique. Les États-Unis s’illustreront d’autre part une politique d’intervention et d’ingè-rence active dans le sud du continent destinée à déstabiliser les régimes politiques contraires à leurs intérêts géostratégiques dans la region : en 1954, au Guatemala, le renversement du colonel Arbenz coupable d’avoir porté atteinte aux intérêts des firmes étatsuniennes (la United Fruit, aujourd’hui Bananera), la déstabilisation du gouvernement du Président Salvador Allende, au Chili, l’invasion de la Grenade soupçonnée de collaborer avec le régime castriste, le soutien apporté aux contras en lutte contre le régime sandiniste au Nicaragua. Néanmoins, cette politique mon­trera ses limites avec les échecs succesifs rencontrés par les États-Unis pour renverser Fidel Castro à Cuba. Comme au temps de la colonisation espagnole du continent américain dénoncé par Bartolome de la Casas qui prendra la défense des indiens opprimés, la politique des grandes corporations nord-américaines en Amérique du Sud ressemble étrangement au sytème colonial de l’encomienda. Ce système consistait à donner « en commande » à un conquêrant une parcelle de territoire, et les indiens qui y habitaient, avec pour but de faire fructifier le pays, lever l’impôt auprès des indigènes. On est en droit de se poser cette question : Comme hier dans le nouveau monde, les États-Unis ne sont ils pas aujourd’hui le fer de lance d’une « encomienda globale », dynamique néocoloniale en recherche continue de terres en friche, de nouveaux marchés à conquérir ? Aujourd’hui, le colon a rangé sa sou­tane de pasteur presbythérien, pour propager aux quatre coins du monde parmi les indigènes la nouvelle foi au matérialisme du monde global, de la culture coca cola, de la musique techno et rap, et l’adhésion inconditionnelle quasimystique aux sacrosaints saints dogmes de la démocratie, du marché et des droits de l’homme.

Le dilemme quant au choix entre isolationnisme et interventionnisme dans la politique étatsunienne, reste un faux problème dans la mesure ou l’intervention­nisme étatsunien de type humanitaire, de « protection des civils »» ou dans le cadre de l’Otan est loin d’être en rupture avec la tradition isolationniste. Au contraire, cet interventionnisme, si l’on observe ses différentes formes au cours de l’histoire, (interventionnisme Wilsonnien botté de la Société de Nations, interventionnisme idéologique (défense du démocratisme moderne) durant le monde bipolaire et la menace communiste, l’unilatéralisme néoconservateur durant l’administration Bush et le devoir d’ingérence Clintonien, en est plutôt le prolongement dans l’es­prit de ceux qui voient pour le monde un avenir unipolaire, c’est-à-dire une confi­guration où les affaires du monde sont assimilées par les États-Unis à des affaires internes. Les États-Unis n’ont jamais renoncé à leur rêve néo-imperial et à leur volonté d’étendre au monde les valeurs américaines, l’« american way of life » après que s’y soient largement diffusées de part le monde déjà les nombreuses pratiques sociales et culturelles américaines à travers le relais du « Soft power américain » ; les médias, la musique et la cinématographie.

Triade, système-monde ou tripolarité ?

On sait que les États-Unis formaient un des pôles de la Triade avec l’Europe occidentale et le Japon, ils constituaient le centre politiquo-économique et culturel principal qui organisait et commandait le système-monde contemporain dans un sens Braudelien élargi, puisque ce dernier parlait d’économie-monde. Aujourd’hui néanmoins, on pourrait volontiers parler d’une évolution multipolaire voire tri-polaire du monde, à savoir un nouveau système-monde composé d’une nouvelle Union transatlantique (Nouveau marché transatlantique entre l’UE et les États-Unis)[2] en tant qu’Union occidentale sous contrôle politique de Washington et mi­litaire de l’Otan, une Union eurasiatique centrée sur la Russie et les États de la région Caucase-EUrasie et la Chine conquêrante[3]. Alors que la Chine s’est écono­miquement définitivement implantée sur le territoire Africain comme en témoigne l’expression « Chinafrique », l’accroissement des relations commerciales et écono­miques entre la Chine et l’Amérique du sud durant les dernières années semble ouvrir la voie vers une « Chinamérique », thèse qui viendrait renforcer le rôle du modèle chinois dans la reconfiguration géopolitique du monde. Cette percée de la Chine sur le continent sud-américain, que certains commentateurs designent déja comme un nouveau « péril jaune », prend indéniablement des dimensions géostratégiques globales, puisqu’elle remet en cause la domination économique étatsusienne sur ce continent depuis la doctrine Monroe. L’Amérique latine est devenue le principal fournisseur de cuivre et d’huile de soja pour la Chine, alors que cette dernière devenait le premier ou deuxième destinataire des exportations brésiliennes, chiliennes et péruviennes. En quelques années, la Chine a acquis une position stratégique et privilégiée en Amérique latine. Ainsi, entre 2000 et 2009, la part des importations argentines en provenance de la Chine a pratiquement triplé (de 4,6 à 12,4 %) tandis qu’elle a été multipliée par six pour le Brésil et le Mexique (de 2,2 % à, respectivement, 12,5 % et 13,9 %). De manière globale, « entre 2001 et 2009, les importations chinoises en provenance de l’Amérique latine passent de 6,7 à 64,4 milliards de dollars, et les exportations chinoises vers la région, de 8,2 à 57,1 milliards de dollars »[4]. Néanmoins il faut être prudent et l’exercice consistant à dresser un bilan chiffré s’est heurté au problème de la quantification des diffé­rents flux qui sont constitutifs de la relation économique entre les États-Unis et l’Amérique latine. Si les données concernant les échanges de biens et de services sont assez facilement recensées et lisibles, les mouvements des personnes et des capitaux sont empreints d’une triple opacité. Cette opacité tient d’abord à la pré­sence, en Amérique latine, de paradis fiscaux par lesquels transite une part de plus en plus considérable de l’IDE et des prêts consentis par des banques américaines. Elle tient par ailleurs à l’immigration illégale massive de Latino-Américains vers les États-Unis. Elle tient enfin à l’incapacité dans laquelle nous sommes de mesurer le poids économique du narcotrafic, qui est pourtant un élément majeur de la relation Nord-Sud au sein des Amériques.

Asymétrie inter-continentale entre centre et périphérie

Dans le cadre du système monde contemporain en voie de multipolarisation, l’Amérique latine en tant que proche périphérie sud et hémisphérique des États-Unis est au centre d’une reconfiguration régionale multipolaire (avec plusieurs pôles et regroupements macro-régionaux géopolitiques et économiques), de sorte que les États-Unis en tant que centre hémisphérique nord devront compter sur un mode d’intégration et de dialectique centre-périphérie plus souple et comportant des flux asymétriques diversifiés, qui relient le centre et la périphérie. L’un des mécanismes privilégiés, à la fois économique et monétaire d’intégration auquel ont recours les États-Unis tant à l’échelon intercontinental des Amériques qu’au niveau global, est l’arme financière du consensus de Washington qui désigne les quelques principes de base sur lesquels semble exister un consensus (un accord implicite, non formulé d’une façon explicite et, bien entendu, non validé par quelque vote que ce soit) sur la façon de gérer l’économie mondiale et sur les choix sociaux qui en résultent. Ce consensus est dit de Washington car il résulte des pouvoirs qui y sont concentrés : celui des États-Unis (ÉU), celui du Fonds monétaire international (FMI) et celui de la Banque mondiale (BM). Ce consensus s’inscrit dans la vague libérale actuelle qu’il contribue puissamment à alimenter et à laquelle la faillite sans appel du sys­tème collectiviste centralisé a conféré un certain crédit dans l’opinion. Il peut être résumé par quelques mots-clefs et principes : libéralisation des échanges commer­ciaux et financiers, privatisation, réduction du rôle de l’État, confiance dans l’initia­tive privée. Son application dans les pays du Sud prend le visage de l’austérité avec les plans d’ajustement structurel, c’est-à-dire les conditions d’assainissement des finances publiques qu’impose le FMI comme condition de nouveaux financements.

Les Amériques entre dynamiques d’intégration et de fragmentation

Lorsqu’on parle de l’intégration du continent américain, il convient tout d’abord de constater qu’il existe de nombreux obstacles à cette intégration qui sont d’ordre physique (chaîne de montagnes, espaces et régions désertiques, presistance de fronts pionniers etc..). À cela s’ajoute une fragmentation issue de la colonisa­tion et de la décolonisation, à savoir entre le monde anglosaxon situé au Nord et le monde latino-hispanique situé au Sud du continent. L’un des pivots conceptuels de l’intégration inter-continentale étatsunienne se fonde sur la libéralisation des marchés et des échanges commerciaux inter-continentaux[5]. À cela s’ajoute paral­lèlement une intégration bi-axiale : continentale/mondiale, qui entend valoriser et intégrer les espaces continentaux gagnants emetteurs de plus-values et de valeur ajoutée pour la mondialisation : il s’agit ici du rôle dynamique des mégalopoles du Nord et du Sud, en tant que pôles directeurs et en tant qu’espaces producteurs et ré­cepteurs. Dans d’autres cas cette intégration mondiale passera par le tourisme inter­national (station balnéaire) et par la décentralisation-délocalisation (Maquiladoras). L’intégration reste largement tributaire des principales façades et installations por­tuaires (Hubs et ports gateaways, Miami et l’exemple du port hub pour l’Amérique latine et les Caraibes), et des voies stratégiques pour le commerce maritime comme le canal de Panama. Bien sur les flux d’idées et de réseaux de services jouent un rôle important dans le dynamisme de cette intégration. Cette intégration d’autre part, se heurte à des obstacles géopolitiques comme autant de facteurs de fragmentation et souvent hérités de la période de la guerre froide: présences de guerillas marxiste-leninistes (FARC), soutien aux contras, groupes paramilitaires. On assiste paradoxalement à un renouveau des fragmentations politico-idéologiques[6], avec le retour d’une gauche anti-impérialiste et anti-américaine comme l’ALBA et le développe­ment de l’idéologie bolivariste Chavezienne. Avec son projet de création d’une zone d’intégration économique regroupant l’ensemble des pays de cette région, l’Alter­native Bolivarienne pour les Amériques (ALBA), lancé en 2004 avec Fidel Castro, Hugo Chavez présentait une alternative visant justement à contrecarrer le projet américain similaire de mise en place d’une vaste zone de libre échange économique des Amériques (ZLEA). Plusieurs chefs d’État issus de la gauche dont Evo Morales en Bolivie ou encore Rafael Correa en Équateur étaient ouvertement favorables aux plans et projets de Chavez pour lequel ils représentaient d’importants soutiens politiques. De plus, dans le domaine économique, les États du continent américain ont aussi graduellement diversifié leurs échanges économiques et commerciaux en développant des partenariats économiques avec d’autres puissances économiques du monde. C’est ainsi que l’Union européenne (UE), le Japon ou encore de plus en plus la Chine depuis quelques années, ont pu accroitre leurs échanges avec les pays du continent américain.

Parallèlement à ces flux visibles de l’intégration inter-continentale et mondiale, se développe une dynamique d’intégration par le « trou noir » économique et finan­cier. Il ‘sagit pour l’essentiel de cette forme d’intégration par le biais du commerce illégal de la drogue dans l’espace situé en Amérique centrale, dans l’arc caribéen et le nord du continent sud américain. Ces espaces recèlent non seulement les centres de production des drogues mais aussi les principales voies de communication vers les pays consommateurs comme par exemple Miami en tant que principal hubs pour le trafic de drogues. Les ÉU restent le premier espace récipient et consommateur de drogues en provenance du sud de l’Amérique. Il ne faut pas, de même, négliger le poids du « trou noir » de la fiscalité, l’Amérique des zones fiscales franches et des paradis fiscaux ou circulent et transitent d’énormes flux de capitaux transnationaux. Sur ce même espace incontrôlé circulent d’importants flux d’immigration clandes­tine avec l’extension du « tortilla wall ».

Macro-régionalisme et intégration horizontale

On peut distinguer sur le plan inter-continental Nord-Sud, une double jeu dialectique de l’intégration : une intégration-domination et une intégration-fragmentation. L’intégration nord-américaine reste toutefois déséquilibrée en raison de la configuration démographique, économique et culturelle de l’espace transfrontalier mexico-américain, où l’on distingue une ligne de fracture croissante entre le centre nord de l’espace dominant et l’espace sud dominé de la périphérie frontalière. La dynamique d’élargissement de l’ALENA voire de la ZLEA semble butter sur plusieurs obstacles liés aux variables et inégalités macro-économiques entre le noyau central développé (ZLE-Canada-UE en 1989) et le sud pauvre et marginalisé, mais aussi en raison des obstacles politiques à l’extension continentale de la ZLEA aux pays émergents sud-américains (2005) qui voient dans cette extension une manœuvre néocoloniale des États-Unis. Face à cette politique libre-échangiste d’intégration étatsunienne se développent des dynamiques d’intégration marcro-régionales alternatives : le MCCA (marché commun centre-américain) en 1960, le CAN (Communauté Andine des Nations) en 1969. Puis en 1997. Le

CARICOM (Marché commun des Caraibes) en 1973, le MERCOSUR qui doit

compter sur de nouveaux partenaires extra-européens comme la Chine qui est à la recherche de matières premières en Amérique latine. D’autre part, l’UNASUR en tant que pendant régional de l’ALENA pourrait devenir un puissant levier d’intégration et de concurrence. Avec l’importance stratégique et économique des pays du groupe BRICS et tout particulièrement du Brésil, on assite à l’avènement d’initiatives régionales intégrationnistes hybrides et en ordre dispersé, et l’on n’est pas loin de l’extension à l’ensemble de l’Amérique du sud du modèle Brasiguyen. Parmi ces modèles d’intégration, le Mexique, à travers son adhésion à l’Alena (Accord de Libre Echange Nord-Américain – NAFTA en anglais) a décidé de lier son sort à celui de ses puissants voisins. Mais avec cette position, il prend le risque de subir les effets néfastes de la fragmentation interne de son territoire entre le Nord, partie de la Mexamerica, et le Sud, pauvre, paysan et indien. Ainsi les États-Unis, même s’ils optent pour un modèle intégrationniste groupé, ne négligent pas le rôle des accords bilatéraux comme avec le Nicaragua, accords souvents plus efficaces. Le MCCA (Marché Commun Centre-Américain), la CAN (Communauté Andine des Nations, ex Pacte Andin) et le CARICOM (Marché Commun des Caraïbes) demeurent fragiles. La CAN, en particulier, ne résiste pas à la tendance centrifuge qui conduit certains de ses membres à rejoindre le Mercosul. Créé par le Brésil, l’Argentine, l’Uruguay et le Paraguay, le Mercosul en langue portugaise et Mercosur en langue espagnole (Marché Commun du Sud) apparaît aujourd’hui comme l’alternative la plus crédible au projet nord-américain. On signalera ses atouts, le principal étant d’avoir avec le Brésil, en réalité le Sudeste et le Sud du Brésil, une locomotive économique : Sao Paulo et sa région jouent le rôle d’un Nord interne au Mercosul, créant des complémentarités qui donnent un sens à l’intégration des économies partenaires. Le fait est que le Mercosul fait preuve d’une dynamique interne qui exerce une influence centripète sur ces voisins. Après l’association du Chili et de la Bolivie, ce sont le Vénézuela et le Pérou qui s’en sont rapprochés. Le Mercosul, c’est la volonté de créer un pôle qui rééquilibre le continent du côté du Sud et qui puisse tisser de solides liens économiques internationaux avec d’autres partenaires que les États-Unis : bien que freinés par la question agricole, les liens avec l’Europe se mettent en place. Dans ce sens, le Mercosul est donc aussi une stratégie pour s’insérer dans la mondialisation en position d’indépendance et de relative force.

Le modèle étatsunien de l’intégration néoliberale et mercantile

Le projet de la ZLEA correspond à celui de toute la mondialisation néolibérale : dérégulation des marchés financiers, financiarisation de l’économie, libre-échan-gisme et libéralisation totale des flux de capitaux, de sorte que ce projet représen­terait la quintessence des nombreuses propostions et modèles dans les années 80. Venues de la part d’économistes comme F. A. Hayek, les États-Unis de Ronald Reagan, la Grande-Bretagne de Margarett Thatcher, le FMI et la Banque mondiale, cette vague néolibérale a engendré un mouvement planétaire de libéralisation de l’économie basée sur la seule règle du plus bas coût de revient et donc sur la com­pétitivité. Ce qui a eu pour effet de favoriser les économies et les entreprises les plus puissantes et la mainmise du capital financier sur l’industrie[7]. Certains pays comme le Brésil ont émis des réticences quant au projet de la ZLEA, souhaitant que l’accord soit précédé d’une intégration commerciale de l’Amérique du Sud. Le projet de la ZLEA implique précisément de démanteler les lois et autres formes d’interventions publiques étatiques permettant de réguler le marché dans certaines limites. Ainsi, la ZLEA transformerait les Amériques en une unique et vaste zone d’investissement, de production et d’échange d’un PIB total de 11 000 milliards de dollars, économiquement sans frontières et donc sans protections ou préférences nationales pour les entreprises et populations locales. Comme pour l’Union euro­péenne, ce projet force des économies asymétriques à jouer sur le même terrain et selon les mêmes règles.

La Zone de libre-échange des Amériques (ZLEA), traité visant à éliminer toute barrière douanière parmi l’ensemble des États du continent américain (à l’excep­tion de Cuba), fut proposée pour la première fois lors du sommet des Amériques à Miami le 11 décembre 1994. Malgré les rencontres et sommets multiples effec­tuées entre les différents dirigeants politiques des nations concernées, un consensus général sur la portée dont l’accord devrait bénéficier n’a toujours pas été trouvé. Les États-Unis tendent à appliquer un simple élargissement de l’Accord de libre-échange nord-américain, alors que les petites et moyennes puissances continentales et régionales (dont les nations « bolivariennes ») et la grande puissance brésilienne, critiquent vivement la possibilité d’adopter un tel traité qui d’après eux viendrait a la fois renforcer la domination américaine et ne pas prendre en compte les pesan­teurs culturelles, socio-économiques des autres pays du sud du continent[8]. Force est de constater que malgré le paradigme libre-échangiste et l’idéologie du « tout com­merce » qui imprègne la vision géopolitique et géoéconomique du projet ZLEA, la situation d’asymétrie socio-économique des pays et des économies latino-amé­ricaines face au géant étatsunien, creusera d’avantage le fossé entre les deux mo­dèles économiques qui ne sont sur aucun point comparables. La libéralisation des marchés, la levée des barrières aux échanges commerciaux renforcera au contraire l’hégémonie économique des États-Unis et sera un frein au développement des politiques économiques faibles visant prioritairement à satisfaire les besoins de leurs populations, notamment en matière agricole. D’autre part, il est question de géné­raliser les normes de l’Alena à l’ensemble du continent et d’étendre les principes du traitement national et de non-discrimination à tous les domaines. On se souvient dès lors que l’extension à l’ensemble du continent des règles de l’Accord de libre-échange nord-américain (Alena) a ruiné l’agriculture mexicaine, sans parler, d’autre part, de la légitimité démocratique d’un tel accord lequel n’a pas été présenté aux parlements respectifs des États concernés d’Amérique du Sud.

Toutefois, en dépit de la pluralité des politiques d’intégration en présence, se cristalise progressivement une nouvelle configuration géoéconomique marco-régio­nale bipolaire : l’une avec le Bloc Mercosur et l’autre avec les États-Unis, l’Alliance pacifique, ce qui fait dire a Tim Groser que « L’Amérique latine est en train de s’orienter vers deux zones d’intégration économiques : l’une est déjà complétée : il s’agit de l’union douanière du Mercosur, qui inclut le Brésil, l’Argentine, le Venezuela et l’Uruguay. L’autre, l’Alliance pacifique, est en train de se bâtir et com­prend l’autre géant économique d’Amérique latine, le Mexique, plus la Colombie, le Chili et le Pérou. Tous adhèrent à la mondialisation, qui pour eux n’est pas une maladie à éviter mais une opportunité à saisir. Ils visent à établir un modèle d’inté­gration profonde assez similaire au programme européen »[9].

Question de méthodes : approche intégrationniste unitaire ou approche régionaliste multipolaire ?

On peut d’autre part s’interroger sur l’opportunité et la faisabilité d’une et unique forme d’intégration continentale sur ce vaste espace marqué par la diver­sité géographique et culturelle. Le phénomène de fragmentation est lui aussi di­vers et diffus. Il est à la fois marqué par une fragmentation géographique issue du déterminisme physique (le rôle des espaces maritimes discontinus, des distances, la discontinuité des axes de communication et des infrastructures de l’aménage­ment régional) qui crée des aires géoéconomiques de continuité, de discontinuitée, d’unité et de fragmentation spatiale. D’autre part, il ne faut pas négliger le poids du facteur social et historique d’un espace qui depuis la colonisation et la guerre froide a souvent été le théâtre de l’affrontement entre l’est et l’ouest, mais aussi du nord et du sud. Ainsi, il est plus exact de parler de modes d’intégration au pluriel, puisque que chaque politique d’intégration se développe à différentes échelles et sur le temps long. Certaines de ces politiques d’intégration seront le moteur et la cause de nouvelles fragmentations territoriales, sociales et géopolitiques lorsqu’elles s’inscrivent dans un schéma néocolonial de domination/exploitation. D’autres au contraire, donneront lieu à des recompositions territoriales, au travers de grands travaux d’aménagement : corridors de développement, grands axes routiers, des réseaux d’oléoducs et de gazoducs à l’échelle régionale (intégration énergétique : exemple du Venezuela au sein du Mercosur). L’intégration de ce continent sera largement tributaire de la modernisation et le développement des infrastructures régionales ou Iirsa, comme celles qui ont été prévues lors du Sommet des présidents de l’Amérique du Sud organisé à Brasilia (août 2000) qui prévoyait la construction de douze axes Nord-Sud à l’échelle de l’Amérique du Sud. Il ne faut pas d’autre part négliger le rôle intégrateur de la coopération transfrontalière entre deux États en tant qu’intégration « par le bas », (exemples : frontière américano-mexicaine (maqu-iladoras et flux migratoires) ; frontière entre le Chili et l’Argentine ; entre le Brésil, le Paraguay et la Bolivie (front du soja) ; etc.). Le choix des différentes approches intégrationnistes varient entre deux tendances : d’une politique d’intégration dont le but est l’instauration de relations équilibrées autour de la cohésion économique, géopolitique, sociale et spatiale et, d’autre part, la politique d’intégration-domina­tion à vocation purement mercantile qui privilégie l’asymétrie des relations avec les pays partenaires (et donc les fragmentations) et l’exploitation des ressources à leur profit sur um nodèle néocolonial : métropole-colonie, centre-périphérie. La poli­tique intégrationniste des États-Unis à l’égard de l’Amérique du Sud est largement inspirée par la conception particulière de la frontière dans la conscience collective et l’histoire nord Américaine. Ainsi la frontière peut être pensée est inscrite dans un cadre de représentation et c’est le cas de l’Europe comme une limite, une déli­mitation (limes, border), mais elle peut est aussi pensée comme un front pionnier, un espace à dépasser, à conquérir, c’est le cas de la conception américaine. Ainsi la politique d’intégration étatsunienne qui s’inscrit dans une logique libre-échangiste et mercantile avec le ZLEA, constitue indubitablement une approche régionale évolutive qui entend dépasser les simples limites, frontières, avec les États du sud américain, afin de transformer la périphérie sud américaine et la réorienter vers le centre. Comme nous l’avons déjà évoqué, le mythe pionnier de la frontière élaboré par Frederick Jackson Turner[10], repris plus tard par J. F. Kennedy dans son discours éléctoral sur la nouvelle frontière (New frontier) en 1960, coïncide avec l’expansion historique des Américains vers l’ouest de leur territoire. Mais on retrouve aussi cette conception du front pionnier en Europe avec la politique dite de voisinage de l’UE à l’égard des pays de l’est de l’Europe, mais aussi en Pologne dans ses relations avec la Biélorussie et l’Ukraine. L’objectif stratégique étant d’atteindre l’intégration de l’aire intermédiaire entre la Pologne et la Russie dans l’orbite occidentale, comme facteur de sécurité.

Bi-océanité et nouveau rôle des Amériques dans la reconfiguration géostratégique du monde

Pour comprendre enfin l’importance de l’Amérique du Sud dans la nouvelle reconfiguration géostratégique du monde et le déplacement du centre de gravité géopolitique des États-Unis vers la zone Asie-Pacifique, il convient de se réferrer à la géographie et à la carte géopolitique. Ainsi l’on constate que l’espace atlan­tique est un vaste continent maritime composé de deux continents conjugués, les deux Amériques d’un côté, le continent européen et l’africain, de l’autre. Le Maroc, comme le Portugal d’ailleurs, se situe pratiquement au centre de gravité de ce ma­cro-système et constituent des « hubs » atlantiques. À la jonction des continents conjugués, il existe deux « méditerranées » ; la première, l’américaine, avec la mer des Caraïbes et le Golfe du Mexique, qui est reliée via Panama à l’Océan Pacifique et la seconde, l’atlantique, avec la zone archipélagique des Açores, de Madère et des Canaries, connectée via Gibraltar et Suez, à l’Océan Indien. Ce n’est nullement un hasard si les États-Unis considèrent la zone caraïbe comme espace maritime privilé­gié et central du dispositif géoéconomique et stratégique américain. Les États-Unis ont d’ailleurs tendance à considérer le bassin caraïbe en tant que lac États-unien ou méditerranée américaine[11] (Mare Nostrum). Organisé autour du pôle majeur des États-Unis, le bassin caraïbe se caractérise par des contrastes marqués entre ses rives septentrionale et méridionale et par l’intensité des flux qui le traversent. C’est pour­quoi s’assurer une présence stratégique durable en Haiti constitue pour les États-Unis une priorité géostratégique de sa politique régionale. D’autant plus que les État-Unis craignent le renforcement des liens régionaux politiques et économiques entre les pays du bassin des caraïbes avec Cuba et l’Amérique Latine (le Nicaragua).

La zone Caraïbe, méditerranée américaine

L’obsession continuelle de l’administration américaine est la constitution d’une zone hispano-caraïbéenne sous contrôle Cubain ou latino-américain. En effet l’une des constantes de la géopolitique maritime cubaine est la constitution de la zone « Amérique latine-Caraïbes ». La zone caraïbe détachée du giron états-unien devien­drait un pivot de communications entre les deux Amériques et entre les Amériques et l’Europe, sur fond de regroupements régionaux euro-latino-américain. Cuba s’attache à procéder par projection sur la zone caraïbes à une territorialisation na­tionale-étatique, visant l’hétérogénéité du sous-système Amérique latine-Caraïbes et la déstabilisation du dispositif états-unien dans les Caraïbes. Au cœur de cette analyse géopolitique cubaine, l’insularité géographique de la zone archipélagique des caraïbes est fortement intégrée dans l’imaginaire cubain et appartient à l’héri­tage culturel castriste. Les recompositions à l’œuvre dans le paysage des associa­tions économiques régionales en Amérique latine, dans l’ombre des États-Unis, de l’internationalisation des échanges et de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), affectent le Bassin caraïbe. La lutte semble bien inégale entre l’Organisa­tion des États caraïbes (AEC), dont les compétences et les moyens sont limités et la Zone de libre-échange des Amériques (ZLEA) qui se met en place sous l’égide des États-Unis. Ainsi sans renoncer définitivement aux opérations militaires et aux pressions diplomatiques, les États-Unis ont multiplié les interventions économiques dans les années 80 (CBI ou Initiative du bassin caraïbe) et surtout à partir des an­nées 90, lorsque le président Bush fut l’initiateur de l’« Entreprise for the Americas Initiative » qui visait a propager le néolibéralisme dans la région. La création en 1973 de la « Communauté et marché commun des caraïbes (CARICOM) a repré­senté une étape dans la coopération économique régionale. L’organisation des États caraïbes (AEC)créé en juillet 1994, est chargée de la coordination des actions des pays membres dans la négociation avec les États-Unis visant à leur insertion dans la Zone de libre-échange des Amériques (ZLEA). Les États-Unis comptent établir une zone de libre échange à l’échelle du continent américain de l’Alaska à la Terre de feu, ce qui contrecarrerait les ambitions économiques européennes. D’autre part pour les États-Unis le bassin caraïbéen est un des réseaux « gateway » incontournable du trafic de drogues. Le développement accéléré de l’économie des drogues est un des aspects de la mondialisation des activités. Dans le bassin caraïbe, au rôle essentiel dans l’approvisionnement du marché états-unien, l’espace des stupéfiants s’organise en réseaux complexes, cohérents, solidement structurés et contrôlés par un grand nombre d’acteurs, institutionnels et privés[12]. L’intérêt stratégique fiscaliste n’est pas sans rappeler les zones franches des flibustiers du XVIe siècle. La situation et l’his­toire du Bassin caraïbe ont incontestablement favorisé le développement d’espaces fondés sur le principe de la dérogation permanente[13]. Ces pays jouent un rôle de sanctuaire fiduciaire des opérations fiscalistes de blanchiment d’argent et de dépôt. Tolérés puis légalisés, ils jouent un double rôle: ils sont des zones de non-droit et cependant ils participent à la régulation du système monde, capitaliste et financia-liste. L’enjeu géostratégique de Haiti et des Caraïbes plus largement prend aussi en compte le facteur migratoire. Nées de fortes disparités de développement et d’âpres tensions géopolitiques, les migrations caraïbes ont tissé des réseaux transnationaux renforçant l’interdépendance entre le Nord et le Sud et entre les pays du bassin caraïbe. En tant que prolongement de la façade maritime de la Floride, les Caraïbes constituent en quelque sorte le réseau migratoire, narco-économique et touristique de la ville de Miami, laquelle constitue une sorte de Plate-forme aéroportuaire du bassin caraïbéen ou transitent quotidiennement des milliards de dollars. En effet, la métropole de Miami est devenue en l’espace de deux décennies la principale porte d’entrée des États-Unis vers le Bassin caraïbe. Elle a largement supplanté quelques villes rivales. Mais elle devra encore franchir certaines étapes avant d’être sacrée « capitale du Bassin caraïbe ».

C’est ainsi qu’il faut toujours avoir à l’esprit que l’Amérique du sud constitue une pièce maitresse dans le jeu des relations intercontinentales, espace géostraté­gique bi-océanique (une facade maritime donne sur l’océan Pacifique alors que l’autre s’ouvre sur l’océan Atlantique) incontournable dans ce que le géopoliticien Haushofer appelle la « verticalité du système international»,à savoir la conjuguai-son des continents, les macro-systèmes panaméricain et eurafricain. On note aussi que la véritable limite stratégique entre atlantique nord et sud est constituée par le tropique du cancer (c’est aussi la limite sud de la zone d’action de l’Otan) et qu’à l’évidence les problèmes de sécurité intercontinentaux qui se posent sont cou­verts au Nord par l’alliance atlantique établie par le traité de Washington de 1949. Néanmoins force est de constater que c’est dans l’hémisphère sud que le système de sécurité semble le plus faible. Dans l’hémisphère austral, le continent sud-améri­cain a toujours fait l’objet d’un soin attentif de la part de l’USNavy. Les débats ont été nombreux avant les années 40 pour savoir s’il fallait défendre le lac américain (c’est-à-dire les Caraïbes) ou mieux le quart de sphère allant jusqu’à la pointe du Brésil, ou même encore tout l’hémisphère via un système interaméricain de sécurité s’appuyant sur le Brésil au Sud. Mais la IIe guerre mondiale est passée sans qu’un système n’émerge. La priorité est allée à l’Atlantique Nord et les tentatives d’OTAS (organisation du traité de l’atlantique Sud) après le pacte de Rio en 1947, les confé­rences de Nairobi (1951) et de Dakar (1954) ont été des échecs malgré la montée en puissance de la présence navale soviétique s’insérant dans un dispositif compé­titif régional. L’administration Reagan a relancé la réflexion dans les années 80 et une idée de défense commune entre États Sud-américains a réapparu ; une confé­rence sur la défense de l’atlantique Sud a même été convoquée à Buenos Aires en mai 1981 et des manœuvres conjointes effectuées. Mais l’affaire des Malouines/ Falklands a bloqué cette évolution non sans qu’un accord de facilités entre le Maroc et les autorités américaines ait été signé en mai 1982. Ce profil bas s’installe dès 1982 même si le retour militaire des Britanniques dans les Falklands a rétabli une certaine centralité stratégique dans l’atlantique sud. La stabilité sera recherchée par la réduction des tensions locales et le strict encadrement de l’influence soviétique. Une dernière tentative d’OTAS verra le jour via la création d’une zone de paix et de sécurité qui associera, en 1986, vingt et un pays africains aux pays atlantiques du Mercosur. Elle sera sans lendemain. Aujourd’hui la perturbation liée au récent acti­visme vénézuélien déclenche la question de la dimension sécurité du Mercosur et le retour d’une manœuvre indirecte de la flotte russe dans la méditerranée américaine suscite la relance d’une IVe flotte de l’US Navy.

Cependant, l’Amérique du sud se présente comme une zone de paix bénéficiant d’une relative stabilité stratégique intercontinentale dans l’hémisphère sud malgré l’absence de structure ou de mécanismes dédiés à la sécurité de l’espace maritime de l’atlantique austral[14]. Il faut aussi avoir à l’esprit que c’est précisement dans la zone de l’hémisphère sud et plus particulierement dans la zone australe, qu’inter­vient le « rôle pertubateur » d’acteurs extérieurs, à savoir les fameux pays du groupe BRICS qui remettent en cause la domination politique et économique des États-Unis. On relève ainsi d’intenses jeux de coopérations économiques et stratégiques au sein desquels interviennent le Brésil, l’Argentine et le Nigéria, la Chine, l’Inde, la Fédération de Russie, mais aussi l’Iran ou la Corée du Sud.

Le rôle des Amériques dans la stratégie Étatsunienne d’endiguement de la Chine

En effet cette nouvelle stratégie de néo-containement qui a pour but d’endiguer et d’étouffer la puissance asiatique dans la zone Asie-Pacifique, passe inévitablement par le nécessaire affaiblissement de la présence économique chinoise en Amérique du Sud. Cette stratégie se compose d’un volet militaire et d’un volet économique qui tous deux devraient se conjuguer pour assurer la suprématie globale des États-Unis. C’est ainsi que la région de l’hémisphère sud, du statut « d’arrière-cour » (des États-Unis) se transforme sur fond de nouvelle guerre économique sino-améri-caine dans la région Asie-Pacifique, en pivot inter-continental d’encerclement de la Chine, une forme de « rimland » bi-océanique (Atlantique-Pacifique) et inter-conti-nental. Sur le plan militaire, les États-Unis devraient indéniablement renforcer leur présence militaire dans la région, à mesure que leur potentiel militaire va s’accroître dans la reàgion Asie-Pacifique. On a ainsi pu assister au déploiement de 250 soldats americains à Darwin (nord de l’Australie) pour atteindre les 2 500 militaires. Avec la présence cumulée de bases américaines au Japon, en Corée du Sud, à Taiwan et à Guam, la base americaine de Darwin en Australie qui se projette sur l’accès de la Chine à l’océan pacifique, révèle ainsi la volonté des États-Unis de mettre en place une « Otan du Pacifique » pour encercler la Chine[15].

Dans le cadre du second volet économique de cette stratégie, les États-Unis entendent affaiblir le rôle hégémonique de l’Association des Nations du Sud-Est asiatique (Ansea, Asean en anglais) dans la région en mettant en place une zone de coopération économique régional par le biais d’un accord ambitieux de libre-échange entre quelques pays du Pacifique, dénommé « Accord d’Association Trans-Pacifique » (Aatp, Tpp), qui compte neuf membres : Australie, Brunei, Chili, États-Unis, Malaisie, Nouvelle-Zélande, Pérou, Singapour et Viêt-Nam. Certains pays de l’Amérique du Sud, comme ici le Chili et le Pérou, sont appelés à jouer un rôle déterminant et d’appoint en participant à plusieurs initiatives régionales, destinées à contrer et affaiblir de façon croisée, la pénétration de la Chine ou d’autres acteurs asymétriques dans la région. L’objectif des États-Unis face à la Chine consiste « à mettre à genoux son économie, grâce au blocus de ses voies d’approvisionnement en énergie », à savoir la priver de ses voies et sources d’approvisionnemnt en pétrole qui arrive en Chine par la Mer du Sud. Or, l’Amérique du Sud apporte 25 % du pétrole qu’importent les États-Unis et les plus grandes découvertes de brut dans la dernière décennie sont dans des eaux territoriales brésiliennes. D’autre part, les exportations du Venezuela vers la Chine sont considerables et malpercues par les États-Unis. Les investissements chinois dans ce pays ont atteint 40 milliards de dollars dès 2007. Pdvsa exporte 430 000 barils par jour de pétrole en Chine mais les compagnies chinoises étatiques Cnpc et Sinopec prévoient de multiplier par dix leur pompage de brut dans le pays jusqu’à arriver à 1,1 million de barils par jour en 2014, pour lequel elles ont reçu cinq zones dans la Ceinture Pétrolifère de l’Orénoque, qui requièrent environ 20 000 millions de dollars en investissement chacune. Les États-Unis doivent mettre en œuvre une stratégie de double contre-encerclement en direction du Pacifique et de l’Atlantique en tissant des alliances transversales et croisées en Asie et en Amérique Latine[16]. C’est pourquoi le Aatp (Tpp) inclut le Chili et le Pérou et espère impliquer le Mexique. D’autre part les quatre pays de l’Alliance du Pacifique (Chili, Mexique, Pérou et Colombie) ont décidé d’un commun accord d’établir un bloc commercial en juin 2012, pour créer un marché intégré avec ses bourses de valeurs et éliminer les tarifs douaniers après 2020. Dans le cadre cette même stratégie les États-Unis s’éfforceront de limiter l’influence croissante de la Chine sur la région, en courcircuitant les initiatives et la ccopération multipolaire ou bilatérale entre les pays de l’Atlantique sud (comme le Venezuela) avec la Russie et l’Iran. Ainsi, l’Amérique du Sud n’est pas loin d’une division en deux blocs régionaux et commerciaux, l’un Pacifique et l’autre de l’Atlantique du sud, blocs qui ne répondant aux attentes protectionnistes de certains pays, permettront par une habile diplomatie d’alliances croisées de renforcer les intérêts des États-Unis dans la région.

Géoéconomie et militarisation du continent latino-américain

S’il est vrai que depuis la fin de la « guerre froide » l’Amérique du Sud a perdu une partie de son importance militaro-stratégique, et que depuis la réorientation géos­tratégique des États-Unis vers l’Asie-Pacifique, on parle de désengagement militaire dans les Amériques, les données économiques et militaires sur le terrain semblent contredire cette « thèse du désengagement américain ». En effet, les États-Unis dis­posent et entretiennent toujours sur le continent un nombre important de bases militaires alors dont la présence est cette fois justifiée par les impératifs de la lutte contre la drogue et de la lutte antiterroriste. Après les attentats du 11 septembre 2001, les États-Unis ont au contraire augmenté le nombre de bases militaires afin de défendre les intérêts des grandes corporations et multinationales et afin de sécu­riser les voies de transports énérgétiques et l’approvisionnement en eau, pétrole et afin de contrôler la biodiversité. Une des illustrations marquantes de cette stratégie militaro-économique des États-Unis dans laquelle la militarisation du continent est inséparable du contrôle des ressources naturelles, est représentée par les grands projets d’infrastructures, comme le Plan Puebla-Panama, qui prévoit la construc­tion d’un canal terrestre, qui devrait relier le sud du Mexique à l’Amérique centrale, en passant par le Guatemala, le Belize, El Salvador, le Honduras, le Nicaragua, Costa Rica et Panama. L’enjeu géoéconomique de cette région est sa richesse en biodiversité et ressources naturelles. La convergence des intérêts géoéconomiques et géopolitiques américains est d’autre part visible dans le cadre du Plan Colombie qui parallèlement à son volet militaire qui finance et prévoit la participation de l’Equateur, la Bolivie et le Pérou dans les opérations militaires visant les principaux foyers de violence en Colombie, dispose d’un volet économique qui prévoit la réa­lisation de grands projets hydroélectriques, pétrolifères et miniers, financés par la Banque mondiale et par des corporations multinationales. Ainsi de nouvelles bases américaines se sont installées sur le continent sud comme à Manta (Equateur), Tres Esquinas y Leticia (Colombie), Iquitos (Pérou), Reina Beatrix (Aruba), Hato (Curaçao) et Comalapa (El Salvador). Ces bases complètent l’encerclement du continent par les États-Unis, lequel inclut également des bases militaires à Porto Rico (Vieques), Cuba (Guantanamo) et Honduras (Soto de Cano). Les États-Unis veulent construire neuf bases militaires en Argentine (Terre de Feu) et contrôler également la base d’Alcàntara au Brésil. La militarisation de ce continent s’est forte­ment accrue sous l’administration Bush, et a fatalement provoqué l’augmentation des violations des droits humains et de la répression des mouvements sociaux, le déplacement forcée de millions de personnes, la dégradation de l’environnement, ce qui par contre coup a engendré un ralentissement de ce processus de milita­risation. Sur le plan militaire la stratégie des États-Unis inclut la formation des militaires latino-américains, comme dans le cas de l’Opération Cabanas, réalisée en Argentine en 2001, avec la participation de 1 500 officiers des États-Unis, du Chili, du Brésil, de la Bolivie, de l’Equateur, du Paraguay, du Pérou et de l’Uruguay, alors que les États-Unis continuent d’investir dans cette formation et dans le comman­dement conjoint sur le territoire de la Triple Frontière entre le Brésil, le Paraguay et l’Argentine.

D’autre part sur le plan institutionnel, l’Union des Nations sud-américaines (Unasur) a lancé l’idée de créer un organe visant à promouvoir et intégrer la défense sud-américaine, qui devrait renforcer la sécurité mutuelle de ses États, tout en sau­vegardant une indépendance militaire à l’égard des États-Unis. C’est dans le sillage de cette initiative, que le Conseil Sud-Americain (CSD) a été officiellement lancé à Santiago au Chili au début du mois de mars 2009, même si ce nouvel organe de défense reste perçu par certains pays du continent comme une initiative imposée et « impérialiste » de la part du Brésil. Selon les douze pays de l’UNASUR partici­pants à cette initiative de défense, le CSD permettrait de mettre en place un forum dédié à l’analyse et la discussion des thèmes reliés à la défense et contribuerait à la consolidation du continent comme zone de paix et de coopération. le CSD contri­buerait aussi à la formation d’une identité sud-américaine de défense régionale. L’institutionnalisation de la CSD en tant qu’instrument decisonnel militaire régio­nal permettrait de contourner l’Organisation des États américains (OEA), dominée par les États-Unis qui ont traditionnellement soutenu les interventions et ingé­rences unilatérales étatsuniennes[17].

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LIVINGSTONE Grace, America’s Backyard: The United States and Latin America from the Monroe Doctrine to the War on Terror, Londres, Zed Books Ltd, 2009.

[1]Vr. Claude Julien, L’Empire américain, Knopf Doubleday Publishing Group, 1971.

[2]Ce grand marché Transatlantique devrait se mettre en place d’ici à 2015 en tant que nouvel ensemble UE-ÉU. (approuvé le 28 mai 2008 par les Institutions européennes) et resposera sur un Marché libre et dérégulé et un contrôle sur des données personnelles sur facebook et Gmail, puces RDFI, Cartes Bleues, caméras, biométrie, etc).

[3]Vr. L’article: http://french.ruvr.ru/2013 06 03/Vers-un-monde-tripolaire-2390/

[4]Vr. Frederic Thomas, « De quoi la relation Chine-Amerique latine est elle le nom ? », http:// www.cetri.be/spip.php?article2808

[5]SCHOTT Jeffrey J., « US Trade Policy: Method to the Madness? », Revised version of paper prepared for the International Affairs Institute, Rome, October 11, 2002. Peter G. Peterson Institute for International Economics, http://www.iie.com/publications/papers/paper. cfm?ResearchID=482, voir aussi SHEININ David, « The New Dollar Diplomacy in Latin America », American Studies International, vol. 37, n° 3, octobre 1999, 81-99.

[6]Les dispositifs mobilisateurs cités par le géopoliticien Francois Thual. Vr. THUAL François,

Méthodes de la géopolitique, Paris, Ellipses, 1996.

[7]Omar Aktouf, « Mondialisation : l’éternelle politique de l’autruche », Le Devoir, 6 septembre

2002.

[8]Lessard, G. «Les économies de petite taille et la ZLÉA.» mars 2(4): 5-24, 2000.. Vr. aussi Turcotte, S. L’intégration des Amériques:pleins feux sur la ZLEA, ses acteurs, ses enjeux. Montréal, Editions Fides, 2001.

[9]Vr. Tim Groser (ministre du Commerce international de Nouvelle-Zélande) « La Chine est entrée dans le système multilatéral, mais elle n’a pas encore choisi son rôle »: http://paris-international.blogs.la-croix.com/chine-États-unis-europe-se-redistribuent-les-cartes-du-commerce-international/2013/06/07/

[10]Frederick Jackson Turner, The Frontier In American History,New York, Henry Holt and Company, 1935.

[11]Vr. Henry Godard, Thierry Hartog, « Le Bassin caraïbe: lac états-unien ou méditerranée américaine ? » http://www.researchgate.net/publication/26431698_Le_Bassin_carabe_lac_tats-unien_ou_mditerrane_amricaine

[12]Vr. Jean-Paul Deler, Olivier Dollfus, Henry Godard, « Le Bassin caraïbe: interface et relais entre production et consommation de drogues», http://www.mgm.fr/PUB/Mappemonde/

M403/Drogue.pdf

[13]Vr. Michel Desse, Thierry Hartog, « Zones franches, offshore et paradis fiscaux: l’anti-monde légal », http://www.mgm.fr/PUB/Mappemonde/M403/Zonesfr.pdf

[14]SEONE José, ALGRANATI Clara, TADDEI Emilio, « Une décennie de luttes et de changements en Amérique latine », Alternative Sud, vol. XVIII (2011) 4.

[15]Colin Armand, « La Chine et l’Amérique latine : le grand chambardement ? », Revue Tiers Monde, 2011/4, n°208.

[16]WEINTRAUB Sidney, « US-Latin American Economic Relations », Journal of Interamerican Studies and WorldAffairs, printemps 1997.

[17]Vr. SANCHEZ, Alex, « The South American Defense Council, UNASUR, the Latin American Military and the Region’s Political Process », Council on Hemispheric Affairs (COHA), 1er octobre 2008, http://www.coha.org/2008/10/the-south-american-defense-council-unasur-the-latin-american-militaryand- the-region’s-political-process

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